RE2020 : le futur label RBR-T cristallise les frustations et les désirs

RE2020 : le futur label RBR-T cristallise les frustations et les désirs

La concertation sur la RE2020 en logement neuf est close depuis le 13 avril. La première étape de la réflexion sur le futur label qui complètera la RE2020 s’est terminée le 7 mai. Où en sommes-nous ?




L’enquête publique sur la partie déjà publiée de la RE2020 – le logement collectif, les maisons individuelles isolées, les maisons groupées – est terminée depuis le 13 avril. Le logement neuf sera donc soumis à la RE2020 à partir du 1er janvier 2022. Les parties prenantes sont divisées en deux camps aux opinions clairement différentes.

 

Les tenants d'une Progressivité et d'une revoyure (à la baisse)

 

Les premiers - Capeb, FFB, FPI, Pôle Habitat FFB, Scop-BTP, Unsfa, Untec, USH – sont contents. Ils sont notamment satisfaits de l’affaiblissement de l’exigence sur le Bbio pour les petits bâtiments et de la clause dite « de revoyure » qui a émergé lors de la réunion du CSCEE (Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique) du 13 avril.

 

Ces organisations indiquent en effet dans leur communiqué que « quelques ajustements restent souhaitables et le caractère soutenable des seuils fixés après 2025 doit être confirmé ». Le projet prévoit, rappelons-le, une sévérisation progressive des exigences, repoussée à 2025, 2028 et 2031. En plus, le gouvernement a accepté une clause de revoyure.

 

Comme le texte définitif de ce bout de RE2020 n’est pas publié, on ne peut pas encore savoir par quel mécanisme elle sera activée. Cependant, ces 8 organisations comprennent clairement cette clause de revoyure comme un moyen d’affaiblir les exigences à l’avenir. Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au logement, pour sa part, parle de’ la clause de revoyure comme d’une possibilité d’évolution « dans un sens ou un autre ».

 

Un second groupe de participants au processus d’élaboration de la RE2020 - AIMCC, Cler, Collectif Effinergie, Collectif Isolons la Terre, France Nature Environnement, Groupement du Mur Manteau, MANASLU.Ing, Pôle Fibres-Energivie – a adopté un tout autre ton.

 

Ces déçus qui veulent protéger le Bbio

 

Le titre de son communiqué du 23 avril est sans détour : « Nouvelle réglementation environnementale pour le neuf : la transition écologique à nouveau sacrifiée ! ». Au moins, c’est clair.

 

Ce second groupe rappelle que le CSCEE a rendu un avis non-unanime et explique « Réduisant les exigences de performance énergétique des petits bâtiments collectifs et des maisons individuelles sans les compenser par celles pesant sur les grands, la nouvelle mouture de la RE2020 enterre les ambitions de réduire globalement le « Bbio » de 30% cantonnant la réduction des seuils à -20 voire -15% ! »

 

Le second groupe s’appuie sur une enquête réalisée par le BE Pouget Consultants montrant que le Bbio des bâtiments neufs construits aujourd’hui atteint déjà -23% par rapport aux exigences de la RT2012 et rappelle que l’objectif d’un Bbio – 30% « représentait un consensus salué par l’immense majorité des acteurs ».

 

 

 

Ce second groupe rappelle également qu’une enquête de l’IFPEB (Institut Français pour la Performance du Bâtiment) montre que 65 % des constructions neuves labelisées E+C- atteignent déjà un niveau Bbio de -30% sans surcoût » et demande : « Où sont les études de ceux qui arguent d’impossibilités techniques ou économiques, la France souhaite-t-elle à nouveau être condamnée pour inaction climatique ? » ©PP

 

Bref, rien ne va plus. Heureusement, développé par la Plan Bâtiment Durable (PBD), le futur label qui accompagnera la RE2020 est en préparation.

 

Le label RBR-T ?

 

Le Plan bâtiment durable a en effet constitué un groupe de travail baptisé RBR-T pour Réflexions Bâtiments Responsables-Territoires et l’a chargé de développer un nouveau label. Le groupe RBR-T avait publié une première note en décembre 2020.

 

Cette première note a suscité des réactions, dont le PBD a publié la synthèse. Divisé en 7 sous-groupes, le groupe de travail a continué son labeur et, fin mars 2021, le PBD a publié sept nouvelles notes sur la neutralité carbone, sur la mesure des performances énergétiques effectives, sur le bâtiment qui coopère avec les réseaux, sur le confort et la santé, sur la gestion durable de l’eau, sur l’économie circulaire et sur la biodiversité.

 

Nous ignorons pour l'instant quelle sera la forme de l'incitation à adopter ce futur label. Ce sera sans doute un droit à surconstruire en échange d'une performance accrue. Ce mécanisme avait assuré la fortune du label BBC associé à la RT2005. Mais le remplacement des POS (Plan d’Occupation des Sols) par les PLU (Plan Local d’Urbanisme) empêche pour l’instant une décision nationale sur ce thème. Chaque PLU doit inclure la possibilité de surconstruire en échange d’une performance supplémentaire. Réviser les PLU existants pour inclure cette disposition prendra des années. Sans compter que près de la moitié des communes françaises n’a toujours pas de PLU.

 

 

 

Puis, le 6 avril 2021, le Plan Bâtiment durable a lancé une concertation sur ses travaux jusqu’au 7 mai 2021. Ce futur label sera strictement volontaire. On ne sait pas encore quelles incitations l’accompagneront. Emmanuelle Wargon a indiqué réfléchir à une disposition nationale permettant d’augmenter la surface constructible en échange d’une performance accrue par rapport à la RE2020. ©PP
 

 

Le futur label cristallise les frustrations et les désirs

 

Les tenants d’une vraie performance environnementale des bâtiments fondent désormais tous leurs espoirs sur ce futur label pour renverser la tendance et vraiment aborder la protection de la planète. Lorsqu’on lit les contributions des sous-groupes, un thème ressort constamment : il faut dépasser le périmètre du bâtiment et l’élargir à l’ilot, au quartier, à l’agglomération, etc.

 

Les dernières notes publiées parlent en effet de « contribuer à des réductions d’émissions de GES au-delà du périmètre de construction du bâtiment », évoquent les bâtiments qui exportent de l’énergie, les solutions énergétiques pour l’ilot et le quartier, le lien entre le bâtiment et la mobilité, les achats d’ENR de compensation faisant le lien entre le bâtiment et le territoire, etc.

 

Le second thème très présent est le développement des compteurs intelligents connectés pour l’eau, pour les énergies, pour les paramètres du confort. Il s’agit d’alerter les occupants ou les gestionnaires des logements quand survient une dérive – la détection d’une fuite d’eau, par exemple – de manière à la corriger rapidement. Incidemment, ce développement correspond aussi à un effort de vérité : suivre et afficher les consommations réelles d’eau et d’énergie, en les mettant en rapport avec les paramètres de confort choisis par les occupants.

 

Enfin, le Bepos (Bâtiment à Energie Positive), qui a complètement disparu de la RE2020, effectue son grand retour par l’intermédiaire de la contribution du GT3 : « Bâtiment qui coopère avec les réseaux ». Le PBD indique que toutes les contributions enregistrées jusqu’au 7 mai seront rendues publiques sur son site.

 

« En complément de ce mode de contribution et en fonction des besoins identifiés, précise le PBD, des échanges et réunions complémentaires seront organisés ». Pour la suite, le PBD n’indique pas de calendrier, mais précise que « l’ensemble des contributions et des échanges menés pendant cette première période de concertation seront pris en compte pour faire évoluer les premières propositions ; les conclusions seront rendues publiques, débattues puis présentées à l’Etat afin de lui permettre de définir les orientations du futur label ».

 

 

 

Le travail commence juste, tous les espoirs sont permis. Et, en attendant le label, le gouvernement pourrait entamer les discussions sur le volet tertiaire de la RE2020. Surtout sur la partie concernant les bureaux et les locaux d’enseignement qui doivent, en principe, être soumis à la RE2020 dès le 1er janvier 2022. ©PP




Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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