L’accueil au rez-de-chaussée en fond de cour manquait de lumière naturelle. D’où l’idée de le transférer au premier étage, libérant ainsi de l’espace pour une grande salle de réunion souvent mise à disposition d’associations.
De toute façon, l’ancien escalier ne répondait pas aux normes d’un ERP. Il a donc été remplacé par une cage d’escalier de secours encloisonné, doublé d’escaliers permettant d’accéder aux trois niveaux supérieurs.
Trois escaliers droits et superposés jouent la discrétion et la continuité avec un revêtement en linoléum que l’on retrouve dans les bureaux et même sur les tables. Les garde-corps sont réalisés par l’entreprise Klein, qui s’est chargé des menuiseries extérieures.
Ces rampes noires, dont la couleur évoque la façade, dialoguent avec une grande paroi couverte de carreaux en bois debout de chêne de Bourgogne, œuvre de l’entreprise EMAG en charge de tout l’aménagement intérieur en bois.
On peut y lire le vestige de la visée première du maître d’oeuvre Pierre Truong, qui aurait bien aimé marier à l’extérieur une essence locale exposée au vieillissement naturel, et ces châssis noirs qui trament la façade.
Les deux grands vases blancs en terre cuite, conçus par le maître d’œuvre, commandés à Goicoechea et posés sur un socle en acier (ent. Klein), se seraient davantage démarqués d’une enveloppe qui aurait pris une teinte argentée, dirigeant le regard vers ces sous-pots en plastique pourvus des initiales de la Fondation, imprimés en 3D par Pierre Truong. Mais il a bien fallu s’entendre avec les copropriétés mitoyennes.
Le jeu entre la netteté stable de l’acier et l’évolution naturelle du bois reste donc confiné à l’intérieur.
Selon Pierre Truong : « Les ‘carreaux’ de chêne de 25 mm sont collés et nous savons qu’ils vont se déformer. Cela va créer un jeu tridimensionnel en plus des effets produits par la juxtaposition de motifs graphiques qui sont autant de pièces uniques. Cela donnera d’autant plus envie de caresser, de palper le bois en empruntant l’escalier ».
L’acier, le bois, deux matériaux originels de la construction, sont mis en exergue. Et la maçonnerie, alors ? Pierre Truong s’amuse à la mettre en scène de façon pour ainsi dire inversée, comme mobilier.
L’escalier monumental qui entraîne les visiteurs à l’étage rompt avec l’orthogonalité, les trames. Par sa couleur blanche unie et ses courbes, il rappelle les deux grands vases de la façade.
L’entreprise de gros-œuvre EERTC dirigée par Christian Chevereau n’a guère le choix que de réaliser les travaux sur place, à la fin de l’année 2014, et début janvier, le décoffrage s’achève alors que le chef maçon Raynald, entend retentir non loin les coups de feu du massacre de la rédaction de Charlie Hebdo.
En montant, l’œil du visiteur est plutôt captivé par la magnifique lampe qui surplombe l’escalier, et que Pierre Truong a dessinée et fabriquée par impression 3D : « Ce ne serait pas possible autrement ».
Les plinthes en retrait et réfléchissantes confèrent quelque chose d’immatériel, même aux parois. Puis le regard se pose sur une toute petite table de la salle d’attente, un cube un peu allongé, massif, habillé de travertin.
Pour la poésie du béton brut, il faudra chercher ailleurs. Ici, même le carrelage est une occasion pour apporter paradoxalement une touche de liberté. Ici, la trame orthogonale des carreaux de chêne est bannie au profit d’un ingénieux motif détramé qui se compose de deux formats différents, pour un résultat qui n’est plus clinique, mais ludique.