Angélique Chedemois, à Queniquen près de Guérande, a d’abord transformé une ancienne bergerie en quatre logements, en 2012, baptisée Etoile Noire. Puis elle a achevé l’an dernier un projet de quatre logements mitoyens, baptisé Satellite. L’approche est similaire et dans les deux cas, la production d’électricité photovoltaïque dépasse nettement la consommation. Interview.
Architecte installée à Paris et à Guérande, Angélique Chedemois travaille actuellement sur un projet d’éco-hameau de 27 logements à Saint-
Cyr-en -Arthies dans le Vexin (95) en processus participatif. Elle s’associe au montage d’une coopérative d’habitation citoyenne de 25 logements « Habitat Énergies Solidaires « à l’éco-quartier Maisonneuve à Guérande (44).
Angélique Chedemois : Tout d’abord, la démarche consiste à intégrer le bureau d’étude, en l’occurrence le BET Aireo de Nozay, très en amont. Mais aussi de travailler avec les entreprises locales et si possible avec les techniques qu’elles maîtrisent déjà. Ensuite, il faut viser des bâtiments « manifeste » mais en évitant le surinvestissement et en se passant notamment de labels.
Pour ce qui est des choix techniques proprement dit, la bergerie était construite avec des poteaux de 220x220 mm en bois, invitant à y greffer des parois à ossature bois en exploitant la profondeur des poteaux pour atteindre une forte isolation (laine de roche). Une contre-isolation intérieure complète le complexe et permet le passage des fourreaux électriques sans percer l'étanchéité.
Les refends séparatifs sont en parpaings doublés, à la fois pour des raisons d'inertie et de simplicité locale. Les planchers sont collaborants, un système de Cosylva à tenons en inox avec coffrage 3 plis et une dalle de 7 cm, derechef gage de performance acoustique et d'inertie. En toiture, une forte isolation, de l’ordre de 36 à 40 cm, mais en couches croisées plutôt qu’en vrac. Les chevrons autoportants supportent des panneaux photovoltaïques.
Un poêle à pellets est couplé avec un ballon d’eau chaude thermodynamique pour l’ECS. Entre Etoile Noire et Satellite, quelques évolutions : l’ossature bois revient au 140 mm courant, préfabriqué en atelier, avec une contre-cloison de 100 mm. La peinture noire de Biofa a été remplacée par un bardage de même couleur de Sivalbp.
Nouvel ensemble Satellite intégrant élégamment les panneaux photovoltaïques
Pas tout à fait. Les maîtres d’ouvrage, mes parents en l’occurrence, avaient une forte sensibilité écologique, il s’agissait d’aller le plus loin possible dans cette direction, mais sans objectifs chiffrés en termes de performance.
Nous nous sommes d’abord tournés vers le label suisse Minergie mais il ne nous a pas semblé adapté à notre territoire. La compacité du volume de la bergerie, avec 300 m2 au sol, facilitait les choses et l’exposition était favorable pour une couverture photovoltaïque qui remplissait plusieurs fonctions à la fois, c’était une façon de payer à crédit une nouvelle toiture.
Bref, les conditions étaient réunies, tout comme d’ailleurs pour le projet Satellite, moins compact, mais avec une façade plein sud idéalement exposée, et où nous avons pu réutiliser les carnets de détails déjà pensés, ainsi que le savoir-faire.
La descente d’eau pluviale est intégrée dans le dispositif de façade
Oui et non. Parmi les intervenants, une entreprise comme l’entreprise Crusson, spécialisée en génie climatique et locale (Ndlr : basée à Saint Lyphard - 44), est à la pointe de l’approche écologique depuis plus de 20 ans.
Par ailleurs, le bureau d’études a formé les compagnons charpentiers en matière d’étanchéité à l’air, et le recours à la contre-cloison a amplement facilité la gestion de cet impératif, sachant qu’une seule entreprise avait en fin de compte la responsabilité de la performance d’étanchéité, qui s’est révélée excellente.
Les installateurs qui ont travaillé sur le projet Etoile Noire ont salué cette démarche qui simplifiait leur intervention. Quant au projet Satellite, le pilote du chantier était au départ très sceptique vis-à-vis de l’intérêt de l’ossature bois et des objectifs de type Bepos, mais il a finalement été totalement convaincus.
Côté nord, l’accès est exploité comme baie vitrée
Ce qui est modélisable, c’est une approche qui se préoccupe d’abord de l’étanchéité à l’air, en second lieu de l’isolation et seulement en troisième lieu des choix de systèmes d’équipements comme les chaudières. Par contre, dans de nombreuses configurations, on ne se retrouve pas dans un contexte idéal comme pour Etoile Noire ou Satellite.
Faut-il alors systématiquement compenser cela par des équipements techniques qui impliquent des surcoûts importants ? Ou bien ne s’agit-il pas plutôt d’avancer pas à pas, intelligemment, dans un budget qui reste raisonnable pour l’utilisateur ? Est-ce raisonnable d’imposer le Bepos dans le neuf partout ? Ne conviendrait-il pas de faire plutôt porter l’effort sur l’amélioration du cadre de vie en rénovation ?
Je peux prendre l’exemple de ma copropriété à Paris, qui se compose de 105 lots, dans le 19e. Le bâtiment, bien que construit en 1970, n’est pas si mal classé. Il est classé D car les murs en béton de 20 cm ont été à l’époque isolés et cloisonnés par un doublage en brique.
Le BET Pouget, ainsi que l’architecte François Pélegrin, vont chercher à identifier les actions opportunes et abordables, selon une logique naturelle. Le prêt qui va nous être accordé va nous permettre de mener d’abord une action groupée pour remplacer les menuiseries qui ne l’ont pas encore été, ce qui va améliorer l’étanchéité à l’air et pousser à la seconde étape, l’installation d’une VMC. Et dans dix ans, à l’occasion du prochain ravalement, le dispositif sera sans doute complété par une ITE.
Satellite : chambre à l’étage avec accès au balcon