L'État veut-il tuer les micro-entreprises ?

Réduction du seuil de TVA à 25 000 € en micro-entreprise. © Freepik

Le gouvernement a déclenché un 49.3 afin d’adopter sans vote le projet de loi finances 2025. Or, ce PLF contient un amendement visant à réduire le seuil de TVA à 25 000 euros. Faut-il s'en réjouir ?




Le 3 février 2025, le gouvernement a déclenché un 49.3 afin d’adopter sans vote le projet de loi finances 2025. Or, ce PLF contient un amendement visant à modifier l'article 293b du Code Général des Impôts en réduisant le seuil de TVA à 25 000 euros.

 

 


Régime micro-social et TVA

Les micro-entrepreneurs peuvent bénéficier de la franchise en base de TVA si leur chiffre d’affaires reste sous certains seuils, ces derniers dépendant de la nature de l’activité exercée. Ils sont réévalués tous les trois ans et les montants en vigueur depuis le 1er janvier 2025 (et jusqu'à ce fameux 49.3) étaient de 37 500 euros pour les artisans, professions libérales et prestations de services (commerciales et artisanales) ; et 85 000 euros pour l'achat et vente de marchandises, ainsi que les activités d’hébergement.

Depuis l'adoption du PLF 2025, il y a désormais un seul et unique seuil de franchise de TVA à 25 000 euros pour toutes les activités. Le seuil majoré sera quant à lui revalorisé à 27 500 euros.

Dès lors, pour les micro-entrepreneurs, cela signifie que :

– si le chiffre d'affaires de l'année civile précédente est en-dessous de 25 000 euros (seuil de franchise), alors la franchise en base continue de s'appliquer ;

– Si le chiffre d'affaires dépasse le seuil de franchise de 25 000 euros, et ce sans aller jusqu'au seuil majoré de 27 500 euros, l'entreprise est soumise à la TVA à compter du 1er janvier de l'année suivante (1er janvier 2026) ;

– Enfin, si le chiffre d'affaires en 2025 (année civile en cours) dépasse le seuil de tolérance de 27 500 euros, alors l'entreprise est soumise à la TVA dès le jour du dépassement (bien que ce seuil ne s’appliquera qu’à partir du 1er mars 2025, et ce sans rétroactivité sur les premiers mois de l'année 2025).

 

 

 

Que veut le gouvernement ?

Par cette limitation, le gouvernement dit vouloir remplacer et simplifier les quatre seuils par un seuil unique de 25 000 euros, lutter contre les évitements de TVA ainsi que contre la concurrence entre PME ayant recours ou non à la franchise.

Pour rappel, selon l'Insee, les entreprises artisanales sous le régime de micro-entrepreneur occupent une place de plus en plus importante dans le monde de l’artisanat (environ un tiers des entreprises), avec une forte disparité géographique. La répartition par secteurs d’activité est relativement proche entre les artisans micro-entrepreneurs et les entreprises classiques. Dans les deux cas, le secteur de la construction est le plus important.

Les revenus de l’activité artisanale des entreprises classiques sont nettement supérieurs à ceux des micro-entrepreneurs. Parmi ces derniers, un sur trois a eu une activité salariée durant l’année en complément de son activité d’artisan.

 

 

 

Du côté de ceux qui se réjouissent

 

Des mesures attendues qui répondent aux demandes de la CAPEB


Dans son communiqué de presse, la CAPEB déclare accueillir "avec satisfaction cette nécessaire adoption du budget", relevant "que le budget adopté prend en considération un certain nombre de mesures qu’elle avait préconisées pour être à la hauteur du défi de la rénovation et préserver ainsi l’activité des entreprises artisanales du bâtiment et le pouvoir d’achat de leurs clients." La CAPEB se réjouit, entre autres, de :

– la suppression des formulaires CERFA pour l’attestation des taux de TVA réduits sur les travaux de rénovation ;

– Et la mise en place d’un seuil unique de franchise de TVA à 25 000 euros, qui "permet de renouer avec la vocation initiale des micro-entreprises, à savoir celle d’un tremplin vers une activité pérenne et un statut protégeant mieux le chef d’entreprise."



 

"Rétablir un minimum d’équilibre concurrentiel à l’égard des artisans" (dixit la FFB)

Même son de cloche du côté de la FFB : la suppression des attestations de TVA, remplacée par une mention sur les devis, est une "vraie mesure de simplification demandée depuis longtemps par la FFB."

Quant à la limitation de la franchise de TVA accordée aux micro-entrepreneurs, elle concourt à "rétablir un minimum d’équilibre concurrentiel à l’égard des artisans". Le retour à un niveau plus raisonnable de franchise doit permettre au régime de renouer avec sa vocation initiale : "un marchepied vers l’entreprise, et non pas un régime qui encourage durablement la concurrence déloyale."
 
 

 

 

Du côté de ceux qui sont contre

La FNAE (Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs), la seule organisation syndicale professionnelle représentative du régime micro-entrepreneur reconnue par l’État français, et l'Adie ont essayé d'œuvrer afin d'obtenir l'abandon de cette mesure lors de l'examen par la Commission mixte paritaire.

Politiquement parlant, LFI (La France Insoumise) compte déposer une motion de censure sur le projet de loi de finances pour 2025.

Toutefois, le Rassemblement National et le Parti Socialiste ont fait savoir qu’ils ne s’associeraient pas à cette motion de censure.

 

 

 

Le point noir : l'augmentation brutale de la TVA sur les chaudières à gaz

La CAPEB rappelle que l’augmentation de la TVA sur les chaudières à gaz à très haute performance énergétique, de 5,5 % à 20 %, représente une augmentation de plus de 700 euros sur une installation moyenne de 5 000 euros, raison pour laquelle la CAPEB avait demandé un maintien du taux à 5,5 % pour ces équipements et, à défaut, avait consenti à une hausse modérée pour rejoindre le taux de TVA de 10 % appliqué aux travaux de rénovation. Une approche qui "devait permettre à chacun de pouvoir continuer à améliorer la performance énergétique de son logement à la hauteur de ses moyens."

Là encore, la FFB est sur la même longueur d'ondes. Cette dernière n'a cessé de plaider pour un taux intermédiaire de 10 % pour permettre une adaptation progressive du marché. Et cela, d’autant plus que pour des raisons à la fois techniques et budgétaires, nombre de Français ne pourront pas se passer du gaz.




Source : batirama.com / Laure Pophillat

L'auteur de cet article

photo auteur Laure Pophillat
Laure Pophillat est rédactrice web polyvalente depuis plusieurs années. Curieuse, éclectique et investigatrice, tous les thèmes pertinents (et donc passionnants) l’intéressent ! Pour Bâtirama, elle rédige avec bonheur sur un large spectre de sujets couvrant l’entièreté de la filière BTP (actualités, conjoncture, réformes, innovations, etc.). Elle apprécie notamment réaliser des portraits de femmes et d’hommes engagés, inspirés et inspirants, dans un environnement, celui du BTP, toujours en mouvement.
1 Commentaire
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  • par Construp
  • 06/02/2025 17:10:31

Bonjour, Vous demandez si le gouvernement veut tuer les micro-entreprises. Je n'en sais rien, mais ce que je constate, c'est que la plupart des auto-entrepreneurs que je rencontre régulièrement sur les chantiers réalisent des CA équivalents à 10 fois le plafond autorisé par leur statut, le plus souvent grâce à l'aide de personnes non déclarées. Ces entreprises peuvent dans ces conditions pratiquer des prix si bas, que quand un vrai artisan présente son devis au client, il se fait au mieux renvoyer poliment, au pire traiter de voleur, alors que c'est lui qui paie la TVA, l'Urssaf, les assurances obligatoires, et l'IRPP. Je suis persuadé que beaucoup de gens dans les ministères savent que le statut de micro n'est pas utilisé comme tremplin vers la création d'une vraie entreprise, mais plutôt comme moyen de fraude (la fraude, elle, n'est pas micro, mais massive). Comme la plupart des chantiers ne sont pas déclarés, ils ne sont pas assurés non plus, mais les clients ne s'en rendent compte qu'après un sinistre. Sans doute que l'Etat baisse le seuil pour ne pas faire trop de vagues, ce qui rendra les gros abus encore plus visibles, et permettra de diligenter les contrôles qui y mettront fin.

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