Le congrès 2025 de la CAPEB s’est déroulé le 11 avril à la Maison de la Mutualité, à Paris. Intitulé "L’entreprise artisanale du bâtiment : le modèle de demain", il a principalement transmis deux messages.
Le premier message du congrès, défendu notamment par Sylvain Moreau, directeur des statistiques d’entreprises à l’INSEE, Thomas Allen, directeur de l'Observatoire des entreprises à la banque de France, Nicolas Portier, auteur d’une étude sur les Très petites entreprises pour l’institut Terram, David Morales, vice-président de la CAPEB en charge des dossiers économiques et Christophe Bellanger, trésorier de la CAPEB, consiste à expliquer que l’entreprise artisanale, décentralisée, proche de ses clients, souple et adaptable, à l’écoute de son territoire et non-délocalisable est un modèle à défendre, particulièrement bien adaptés aux nombreux challenges de notre époque. © PP
Le second message rappelle que depuis plusieurs années, la CAPEB a adopté une attitude constructive. Jean-Christophe Repon, lors de son intervention a énuméré les propositions mises en avant par la CAPEB. En voici trois.
L’une des principales est sans doute celle de la création des GME ou Groupements Momentanés d’Entreprises. C’est un accord privé entre entreprises qui leur permet de s’organiser pour réaliser un marché auquel elles n’auraient pu soumissionner si elles avaient été seules. Elles sont alors cotraitantes, c’est-à-dire qu’elles accèdent toutes en direct au marché et non en tant que sous-traitantes. Le GME n’existe que pour la durée d’un chantier. Quel que soit le type de GME, il est alors nécessaire de conclure une convention écrite qui définit les règles de fonctionnement interne au groupement.
Selon la CAPEB, le GME permet aux entreprises artisanales d’obtenir de nouveaux marchés. Les entreprises sont en accès direct au marché et non pas sous-traitantes. La convention signée par les entreprises donne les réponses juridiques aux principaux aléas (retard, défaillance …). Chaque entreprise est potentiellement un "apporteur d’affaires". Le maître d’ouvrage a un interlocuteur unique : le mandataire commun. Le GME est souple.
Enfin, l’optimisation de la coordination entre les entreprises permet des gains de temps. Bref, que des avantages. Mais voilà, la création du GME figurait dans une loi sur la simplification, mais elle a été retoquée par le Conseil Constitutionnel, en tant que cavalier législatif : autrement dit, le GME n’avait rien à faire là. La CAPEB estime qu’il serait simple au gouvernement d’étendre le bénéfice du GME aux entreprises artisanales et aux TPE pour tous les marchés, simplement par décret.
Seconde proposition, la CAPEB avait soumis plusieurs recommandations aux parlementaires à propos de la loi contre la fraude. Elle déplore non-seulement de ne pas avoir été entendue, mais que certaines dispositions du texte voté par le Sénat se traduisent par de nouveaux reculs pour les entreprises artisanales.
Par exemple, la loi limite la sous-traitance à deux rangs en maisons individuelles, mais introduit un troisième rang de sous-traitance en logement collectif. Elle regrette aussi la possibilité ouverte aux sociétés commerciales d'obtenir un label leur permettant de faire réaliser des travaux de rénovation, alors qu’elles n’ont aucune compétence en la matière et que, parallèlement, la qualification RGE est rigoureusement exigée des entreprises du bâtiment qui les effectuent. Il s’agit clairement d’un dévoiement de la règle et d’une concurrence déloyale pour les artisans qui assument, seuls, la responsabilité des travaux réalisés, indique la CAPEB.
Troisième proposition, le refus d’élargir l'accès au label RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) par la validation des acquis de l'expérience (VAE) demeure incompréhensible. Cette initiative avait pour but de faciliter l'accès des artisans à cette qualification essentielle, mais elle demeure depuis plus d’une année dans l’attente d’une décision gouvernementale.
La CAPEB insiste sur un point fondamental : c’est la compétence des entreprises du bâtiment qui doit prévaloir. Il est impératif que toute entreprise facturant des travaux de rénovation énergétique soit une entreprise du bâtiment disposant des compétences et des qualifications requises, et les fraudes doivent être sévèrement sanctionnées pour préserver la crédibilité de la politique de transition énergétique. Plus de 55 000 entreprises du bâtiment, sur un potentiel de 500 000 entreprises artisanales, ont actuellement la qualification RGE et sont pleinement engagées pour la rénovation énergétique de qualité.
Même si aucun ministre n’est apparu au congrès, plusieurs élus locaux étaient présents et sont intervenus, dont Xavier Bertrand, président de la région des Hauts-de-France. © PP
Face à ses propositions, rien ne change. La CAPEB a clairement le sentiment de ne pas être écoutée.
Dans son discours de clôture, Jean-Christophe Repon a dit "L’absence de ministre aujourd’hui nous montre que nous ne sommes pas jugés prioritaires. Comment ne pas y avoir du mépris ? Nous avons pourtant vu toute la matinée que le modèle de l'entreprise artisanale du bâtiment est un sujet essentiel pour l'avenir. Il faut que tout le monde en ait conscience car nous sommes à un moment charnière. Je tiens à vous témoigner de ma fierté pour le travail mené qui nous a conduit notamment à rester majoritaire sur le champ des entreprises comptant jusqu’à dix salariés". ©PP
Plusieurs intervenants membres de la CAPEB ont remarqué qu’ils ne sont pas, comme les agriculteurs, capables de manifester avec leurs tracteurs et de se faire entendre rapidement. Si rien ne se passe, toutefois, la direction de la CAPEB va se concerter avec les membres de de la confédération pour mettre au point des stratégies de ripostes qui les feront remarquer et, espèrent-ils, entendre du gouvernement.
Après tout, le gouvernement devrait se souvenir que la CAPEB, organisation patronale représentative de l’ensemble des entreprises du bâtiment, est l’organisation patronale majoritaire dans l’artisanat du Bâtiment, c’est-à-dire les entreprises inscrites au répertoire des métiers qui emploient ou non des salariés. La CAPEB est aussi la première organisation professionnelle de France en nombre d’adhérents (62 000 entreprises). Elle représente à ce titre : 500 000 entreprises, soit 96 % des entreprises du bâtiment, employant entre 1 et 10 salariés, 570 000 salariés, soit 45 % des salariés dont 14 % de femmes, 60 000 apprentis formés dans le bâtiment et presque la moitié du chiffre d’affaires du bâtiment (47 %).
De plus, le SDI (Syndicat des Indépendants et TPE) indique dans son dernier sondage des TPE du bâtiment paru début avril, que 23 % des chefs d’entreprises dans cette catégorie envisagent de cesser leur activité en 2025.