« On ne sait toujours pas ce qui va se passer au 1er janvier 2019 en matière de « primes Hulot », et on ne connaît ni le contour des aides, ni leur date d’entrée en vigueur ni les conditions d’éligibilité. Personne ne sait rien ! » s‘exaspère le président de la Fédération française du Bâtiment, Jacques Chanut.
Une interrogation empreinte d'inquiétude sur la date d’entrée retardée de ces aides encore inconnues : elle pourrait faire perdre de précieux mois de carnets de commande aux professionnels.
Autre motif d’inquiétude pour l’organisation professionnelle : la possibilité que le système excluant les fenêtres et chaudières du CITE (Crédit d’impôt à la transition énergétique) soit considéré comme définitif alors qu’une simple suspension avait été annoncée lors de sa mise en place, selon Jacques Chanut. « Nous allons rencontrer François de Rugy et mettre le sujet sur la table » annonce le président de la FFB.
« Nous avons déjà fait des propositions pour calibrer les aides aux fenêtres, et axer le CITE sur le remplacement des fenêtres à simple vitrage, mais là, nous n’avons aucune réponse. Le statu quo serait un renoncement, or, il nous faut un arbitrage rapide » insiste Jacques Chanut.
A ces inquiétudes, s’ajoutent un marché stagnant de l’amélioration-entretien caractérisé par une très faible dynamique au 1er semestre 2018, en glissement annuel, soit + 1,2 % (après avoir enregistré 1,7 % au précédent semestre). La tendance globale de ce marché sur le premier semestre ressort aux environs de 1 %.
Or, rappelle la FFB, ce marché de l’amélioration entretien est important pour les professionnels puisqu’il représente traditionnellement entre 55 et 65 % de leur activité. Quelle explication donner à cette stagnation ? « Cela est certainement dû à un environnement institutionnel instable » commente Jacques Chanut.
Seule bonne nouvelle dont peuvent se féliciter les professionnels du Bâtiment : le maintien de la TVA à taux réduit de 5,5 % pour les travaux de rénovation. « C’est aujourd’hui le système le plus visible et le plus puissant pour accompagner le marché » remarque le président de la FFB.
Quant au logement neuf, la FFB évoque déjà le terme de retournement notamment dans les territoires où le PTZ a été raboté avec le double impact de la suppression des APL accession et de la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS).
« L’individuel diffus souffre beaucoup et ce sont les ménages les plus modestes qui en pâtissent » ajoute Jacques Chanut. Ainsi, dans l’individuel diffus, les ventes plongent de 13,7 % en glissement annuel sur les sept premiers mois de l’année.
Dans la promotion immobilière, les ventes au détail abandonnent 0,8 % au 1er semestre de l’année par rapport au semestre précédent, tandis que les mises en vente reculent de 6 %. Enfin, les promoteurs relèvent un franc recul de 14,2 % des ventes en bloc, traditionnellement destinées au secteur HLM.
« Ces difficultés en amont commencent à avoir un impact sur nos clients » résume Jacques Chanut qui relève que les permis et mises chantier de logement se replient respectivement de 7,5 % et 3,4 % en glissement annuel.
En revanche, le non résidentiel affiche de bonnes performances (+ 4,2 % en autorisations et + 13,8 % en mises en chantier), les locaux commerciaux échappant à l’engouement général (- 21,8 % en autorisations et + 13,7 % en mises en chantier).
La commande publique a notamment été dynamique après quelques mois d’inquiétude des collectivités territoriales qui ont retardé leurs investissements. Cela se traduit par une forte hausse de la construction des bâtiments administratifs (+ 7,2 % en autorisations et + 25,2 % + en mises en chantier).
Alors pourquoi le décrochement du logement neuf ? Une panne de croissance, et la prudence des ménages inquiets d’une hausse du chômage expliquent ces piètres performances, selon l’analyse de la FFB qui relève que le contexte économique ne permet pas de comprendre ce décrochage. La tendance actuelle tourne en effet autour de 400 000 mises en chantier en 2018, contre près de 430 000 en 2017, soit - 7%.
« Il faut reparler de zonage et notamment d’un zonage de projets, qui permettrait de définir un nombre limité mais précis de logement en PTZ ou Pinel à construire, dans un périmètre donné, par exemple, auprès d’une gare » explique Jacques Chanut qui entend bien engager ce débat avec ses interlocuteurs au gouvernement dès que possible.
L’heure est aux difficultés de recrutement avec une activité encore en hausse de 2,5 %. Ainsi 30 000 postes ont été créés au premier semestre 2018, dont 7 000 intérimaires en équivalent-emplois à temps plein et 23 000 salariés, selon la FFB.
Toutefois, les professionnels redoutent un effet de surchauffe face aux difficultés de recrutement et à la hausse des matières premières, alors que les coûts de construction, eux, demeurent stables.
« On craint une fragilisation des entreprises d’autant plus que certaines mesures envisagées par le gouvernement pourraient augmenter le coût du travail. C’est le cas du possible rognage de la déduction forfaire spécifiques (DFS) de 10 % dont bénéficie la profession » selon l’organisation professionnelle qui redoute un recours accru au travail détaché illégal.
Enfin, concernant les 430 000 personnes inscrites à Pôle emploi dans les métiers du Bâtiment, le président de la FFB, veut toujours « essayer de comprendre ce qui se passe ». Il faut regarder les fichiers et identifier les profils en attente d’emploi, et nous sommes en discussion avec Pôle Emploi sur ces sujets » indique le président de la FFB qui ne compte pas s’arrêter là.
« La promotion de l’image de nos métiers demeure capitale, et nous allons présenter nos activités aux demandeurs d’emploi, notamment grâce à notre opération nationale « 15 000 Bâtisseurs » destinée aux jeunes dans les quartiers prioritaires » termine le président de la FFB décidé plus que jamais à « agir plutôt que commenter ».
Source : batirama.com / Fabienne Leroy