Le Réseau Breton Bâtiment Durable a organisé la visite d’un chantier de rénovation d’une maison individuelle classée au patrimoine dans la capitale bretonne.
Ce chantier s’inscrit dans une bâtisse du 18e siècle, située rue de Paris, comprenant six appartements. Une SCI en fit l’acquisition en 2011 avec le projet d’y créer trois maisons individuelles de 180 m2, et ce en trois tranches : la vente de la première maison devant financer les travaux de la seconde qui, une fois louée, permettrait d’investir dans la troisième.
A l’origine, le maître d’ouvrage planifiait une rénovation traditionnelle qui fut d’ailleurs concrétisée pour le premier lot et seulement esquissée pour le second. Car il changea d’avis entretemps et décida finalement d’adopter une démarche plus respectueuse de l’environnement pour la deuxième maison.
L'architecte Charlotte Piel de l’agence Lezeko spécialisée dans l’écoconstruction est intervenue sur le chantier en cours de rénovation
C’est à ce moment qu’intervint l’architecte Charlotte Piel de l’agence Lezeko spécialisée dans l’écoconstruction. « Lorsque nous avons pris en main le lot 2, le clos couvert avait déjà été effectué sur la totalité de la bâtisse, explique-t-elle. Nous devions donc nous adapter à l’existant réalisé par le premier maître d’œuvre.
Nous savions d’emblée que nous ne pourrions pas réaliser une maison passive puisque nous ne pouvions pas intervenir sur l’enveloppe : impossible d’isoler les façades par l’extérieur sachant que l’on se trouve en secteur ABF ;
D’autre part, nous devions conserver le double vitrage déjà installé et la dalle en béton du rez-de-chaussée. Néanmoins, notre objectif était de tendre le plus possible vers les exigences du standard passif et d’utiliser des matériaux biosourcés ».
Le bureau d’études Bee+ réalisa au préalable une Simulation Thermique Dynamique de l’enveloppe du bâtiment dans sa version initiale afin de bien identifier les principales sources de déperdition d’énergie… Il apparut que le renouvellement d’air (absence de récupérateur de chaleur) engendrait 26% de ces déperditions, les infiltrations 15%, les ponts thermiques 14%, etc.
A partir de là, différents arbitrages furent effectués. Les pièces de vie initialement prévues au nord (côté jardin) ont été rebasculées au sud (côté cour). Pour assurer l’étanchéité à l’air, une membrane hygrovariable a été mise en place sous la toiture, un vide technique dévolu au passage des réseaux évitant les traversées de membrane.
L’étanchéité au vent a été traitée avec un pare-pluie en toiture et un enduit monoair sur les murs en parpaing. « Ces deux paramètres (étanchéité à l’air et au vent) sont décisifs pour assurer la pleine efficacité de l’isolant et sa pérennité », insiste Charlotte Piel.
La gestion des ponts thermiques a nécessité l’isolation du mur de refend, du nez de dalle. Le plancher chauffant prévu dans la première version du projet a été abandonné au profit de radiateurs basse température et d’une chaudière gaz à condensation. Un petit poêle à bois est aussi prévu au rez-de-chaussée en chauffage d’appoint. Une VMC double flux permet le renouvellement d’air avec récupération de chaleur.
La pose de laine de bois dans les combles a pour but d'assurer un déphasage plus important et de limiter les périodes de surchauffe
Pour gérer l’hygrothermie de ce bâtiment ancien, des blocs de liège ont été posés en pied de mur, de façon à faire barrière aux remontées capillaires.
Et un dégrossi chaux-sable a été appliqué sur les murs en pierre. Il sert d’interface entre la pierre, matériau froid, et l’isolant hydrophile, matériau chaud, « solution qui parait plus satisfaisante aujourd’hui que d’installer une lame d’air », indique Charlotte Piel.
Enfin, l’un des objectifs était aussi d’améliorer le confort d’été : la pose de laine de bois dans les combles permet un déphasage plus important et limite les périodes de surchauffe.
Isolation en panneaux de fibre de bois, de liège, ou en coton recyclé (très performant en termes acoustiques) ; entrevous en bois moulé ; peinture -bretonne ! - Algo produite à base d’algues et très pauvre en COV… Tous les matériaux sont biosourcés.
Au final, le budget de rénovation de cette maison de la rue de Paris a grimpé de 13% par rapport à celui initialement prévu dans l’approche classique. Il s’élève à 2000 € HT/ m2 SRE contre 1765 € dans la version 1 du projet.
En revanche, la facture énergétique de l’habitation baissera de près de 50% (1764 €/an contre 3381€). Le besoin de chauffage s’établit à 72 kwh/m2.an pour une température intérieure de 20°C, alors qu’il aurait été de 132 kwh dans le modèle traditionnel.
Comme prévu, le standard passif n’est pas atteint, mais son référentiel, utilisé comme source d’inspiration, a permis d’améliorer la performance thermique de l’habitation dans des proportions remarquables compte-tenu des contraintes inhérentes au projet.
Source : batirama.com/ Coline Gady