Plus de 1.900 victimes se sont déjà jointes à cette procédure afin d'aboutir au procès de 14 personnes, a indiqué Antoine Vey, l'avocat de l'Association des victimes de l'amiante (AVA), qui espère une audience à "l'horizon 2023". La citation vise les infractions suivantes : "homicides et blessures involontaires", "non-assistance à personne en péril", "complicité d'administration de substance nuisible", "complicité de tromperie aggravée" et "association de malfaiteurs".
"Nous avons à coeur de dénoncer (...) un fonctionnement qui a existé entre 1982 et 1995 et qui (...) a permis à des industriels de l'amiante, appuyés en cela par des lobbyistes rémunérés pour le faire, d'anesthésier les pouvoirs publics", a expliqué Me Vey. Ces industriels ont diffusé "des informations délibérément falsifiées (...) afin de conduire les pouvoirs publics à ne prendre aucune décision visant à protéger la population" et faire en sorte "qu'aucune décision ne soit prise ni dans le cadre national ni dans le cadre international (...) en vue d'interdire l'amiante", a-t-il ajouté.
L'avocat a déploré que depuis les premières plaintes déposées en 1996, les informations judiciaires ouvertes dans la foulée aient été "saucissonnées". "Ça a conduit à environ une trentaine de procédures conduites parallèlement et avec une efficacité inégalée dans le processus judiciaire", a déploré Me Vey.
Depuis environ deux ans, la plupart des dossiers de l'amiante instruits à Paris se sont conclus par des non-lieux." A peu près rien de très concret n'a été fait dans ce dossier au niveau de la responsabilité des membres du comité officieux qui s'appelait le comité permanent amiante" (CPA, dissous dans les années 1990), a observé l'avocat.
Ce comité, "occulte" et "subventionné par les industriels de l'amiante", selon Me Vey, est au coeur de la procédure entamée, qui vise à citer devant le tribunal 14 personnes membres ou ayant agi avec le comité.
Me Vey a refusé de dévoiler l'identité des personnes visées. Mais parmi elles figurent des personnes mises en examen en 2011 et 2012 dans deux dossiers emblématiques du scandale sanitaire, ceux du campus parisien de Jussieu et des chantiers navals Normed de Dunkerque, et dont les poursuites avaient été définitivement annulées par la Cour de cassation en 2018.
Au total, "plus de 35.000 personnes" sont décédées de l'amiante entre 1965 et 1995, a indiqué Me Vey, ajoutant que d'ici 2025 cette substance conduirait à près de 60.000 décès. En marge du dépôt de la citation directe, plusieurs dizaines de victimes ou proches de victimes se sont rassemblées non loin du tribunal judiciaire de Paris avec des pancartes affichant le visage de leurs proches disparus ou une banderole: "Nos empoisonneurs doivent être jugés sans délai".