Campons le décor, à Fontenay-sous-Bois, près de Paris. Le complexe sportif Salvatore Allende de 10.000 m² environ, construit en 1973, abrite une piscine, une patinoire, un gymnase et plusieurs autres salles de sport.
Le complexe sportif Salvatore Allende compte parmi les équipements historiques. Jean-Philippe Gautrais, à gauche, le maire de la ville, fréquentait déjà la patinoire lorsqu’il était pré-ado. A droite, Guislain Lours, responsable énergies et fluides à la direction des bâtiments de la ville de Fontenay-sous-bois, a supervisé le processus de modernisation de la production de froid de la patinoire. ©PP
La piscine a été rénovée en 2014. La municipalité, apparemment de longue date éprise de vertitude, l’a raccordée au réseau de chauffage urbain géré par une régie municipale, présidée par le maire de Fontenay-sous-Bois. Ce réseau comporte une chaufferie centrale équipée de quatre chaudières, dont une au gaz, une unité de cogénération alimentée par la chaudière gaz, un réseau souterrain de 25 km de long et cent six sous stations. Il fonctionne pour l’instant au gaz naturel et à la biomasse, avec une température de départ de 110°C par la température extérieure de base. Etant donnée la puissance de la chaudière gaz, la chaufferie est assujettie à un tarif gaz dit "au jour le jour" qui change en fonction des prix de marché. La municipalité avait un projet de conversion de la partie gaz à la géothermie profonde. Comme l’explique Guislain Lours, responsable énergies et fluides à la direction des bâtiments de la ville de Fontenay-sous-bois, la municipalité a décidé d’avancer la conversion pour que la géothermie profonde, avec des forages 1.800 à 2.000 m, soit opérationnelle dès 2027. Ce qui, au passage, abaissera la température de départ aux alentours de 90°C et nécessitera une adaptation des sous-stations.
Bref, en 2019, dernière année d’exploitation complète, le complexe sportif Salvadore Allende avait consommé 2,9 GWh de chaleur fournis par le réseau de chaleur urbaine, et 2,4 GWh d’électricité, dont 500MWh pour la production de froid de la patinoire.
Le coût total en 2019 culminait à 450.000 € TTC. Le prévisionnel pour 2023 prévoit un montant trois fois plus élevé.
MCI, filiale d’Equans, elle-même récemment cédée par Engie au groupe Bouygues, exploitait l’installation de production de froid de la patinoire avant sa rénovation. Elle était équipée de groupes à l’ammoniac (R717). MCI a remporté le marché de rénovation de la production de froid de la patinoire, dans le cadre d’un contrat de garantie de performances jusqu’en 2026 et assure donc également la maintenance jusqu’à cette date.
MCI estime que dès 2023, alors que l’installation est toujours en rodage, l’économie d’électricité de 30% environ entraînera une économie de 30.000 € TTC pour la ville. Cette réduction de consommation vient, pour l’instant, simplement du fait que le nouveau système est nettement plus efficace que le précédent.
Lancés en avril 2021 pour un montant total de 800.000 € TTC, plus 25.000 € TTC/an pour l’exploitation jusqu’en 2026, les travaux ont été terminés mi-août 2022, à temps pour la réouverture de la patinoire pour la rentrée. La patinoire fonctionne d'août à juin. Durant la saison, elle accueille des compétitions de hockey sur glace, des associations, du patinage artistique, patinage de vitesse, dance sur glace – grâce à cette visite, nous avons compris que patinage artistique et dance sur glace sont deux activités différentes -, initiation, etc. Chacun de ces usages requiert de la glace d’une épaisseur et d’une densité particulière. L’installation de froid fonctionne avant tout pour les besoins de la patinoire et pas pour maximiser la production de chaleur pour la piscine. L’engagement de performance pris par MCI porte sur l’EER. Exprimé sans unité, EER ou Energy Efficiency Ratio est la puissance froid produite en KW, divisée par la puissance électrique appelée en KW.
En réalité, l’engagement de MCI ne revient pas à une seule valeur d’EER, mais se traduit par une matrice d’EER qui lie usage de la patinoire (donc épaisseur et dureté de glace), température extérieure et EER minimum à atteindre. Au cours des 9 premiers mois d’exploitation, MCI et la municipalité sont contents : l’EER atteint jusqu’à 4,72. Ce qui dépasse les objectifs de la garantie d’exploitation.
A la demande de la municipalité, MCI, un spécialiste du froid depuis 60 ans, comme le rappelait Cyril Bezet qui s’occupe de l’Île de France et du Centre pour MCI, a donc installé un système d’une puissance nominale de 560 kW froid, fonctionnant au CO2 (R744). Le GWP (Global Warming Power ou contribution à l’effet de serre) du CO2 est égal à 1, tandis que son ODP (Ozone Depletion Potential ou contribution à la destruction de la couche d’ozone) est nul. C’est un fluide naturel qui n’est pas soumis au règlements européens Reach ou F-Gaz. ©PP
Le groupe froid, assemblé par l’italien SCM Frigo SpA, membre du groupe Beijer Ref et spécialiste du CO2, comporte huit compresseurs Bitzer. Les compresseurs alignés dans le bas de la machine sont les principaux. Les trois autres n’interviennent qu’en cas de très forte demande. Parmi ces cinq, quatre sont à vitesse fixe, tandis que le cinquième est piloté en variation de fréquence. C’est lui qui démarre en premier et monte en puissance jusqu’à sa puissance nominale. A ce moment-là le pilotage de la machine démarre un compresseur à vitesse fixe pour le remplacer. Et ainsi de suite. ©PP
En raison de l’espace disponible dans la chaufferie existante, le groupe CO2 de SCM Frigo n’est pas aligné dans un seul châssis, comme c’est l’usage en industrie. La partie comportant les échangeurs est montée sur un second châssis, placé à côté de celui qui supporte les compresseurs. ©PP
La dalle de la patinoire a été conservée. Le fluide secondaire est toujours du Monoéthylène Glycol (MEG). Ceci est l’échangeur Alfa-Laval entre le CO2 et le MEG qui refroidi la dalle de la patinoire. En dessous, les deux pompes KSB ETB 200-150-250 d’un débit nominal de 350 m³/heure sous une pression de 16 mCL qui se chargent de la circulation du MEG. ©PP
Voici l’échangeur à plaques entre l’installation de froid et la chaufferie de la piscine. C’est un échangeur Barriquand d’une puissance nominale de 500 kW. Le fluide primaire est le MEG. L’échangeur est calculé pour des températures d’entrée de 60°C et de 40°C en sortie. Le fluide secondaire est de l’eau produite avec un débit maximum de 26 m³/heure et des températures d’entrée de 35°C. Il charge le ballon isolé qui fait office de primaire de chargement pour la chaufferie de la piscine où il alimente trois échangeurs, un par bassin, et l’échangeur de production d’ECS. ©PP
S’il n’y a aucun besoin de chaleur dans la piscine, un gascooler LUVE de type XDHV 1N avec une puissance de rejection de 876 kW se charge d’évacuer la chaleur extraite de la patinoire. Il est dimensionné pour une température extérieure de 37°C et affiche un débit d’eau de 0,48 m³/heure pour un débit d’air de 90.670 m³/heure. Doté de 4 ventilateurs EC (alimentés en courant continu, sans balais pour la variation de puissance), sa puissance électrique appelée est limitée à 8 kW.
Un échangeur Alfa Laval de 92 kW (R744 au primaire, MEG au secondaire), alimenté par la récupération de chaleur sur le groupe froid, sert à fondre la neige dans la fosse à neige. Lorsque la zamboni passe sur la glace pour l’égaliser, il en rase une partie en surface. Cette "neige" ne peut pas être jetée à l’égout en l’état. Elle est placée dans une fosse, fondue par la récupération de chaleur sur le groupe CO2, puis l’eau est évacuée.
Depuis la mise en service de l’installation CO2 mi-août 2022, 71 MWh de chaleur ont été récupérés pour contribuer à la production d’ECS pour les vestiaires de la piscine et au réchauffage des bassins.
Toute l’installation est suivie par une supervision, développée par MCI à partir de PCVue. Alimentée par quantité de sondes, elle suit les appels de puissance et les consommations d’électricité en temps réel. Et, naturellement, calcul le fameux EER. La puissance électrique appelée par le gascooler est intégré dans le calcul de l’EER, ainsi que celles de toutes les pompes côté production de froid. ©PP