Les architectes Fumihiko Maki (concepteur d'une des tours de Ground Zero à New York) et Paul Chemetov (célèbre pour l'iconique "paquebot" de Bercy) sont décédés à quelques jours d'intervalle : jeudi 13 juin dernier, pour l'architecte japonais, et ce lundi 17 juin pour l'architecte français.
L'architecte japonais, lauréat du prestigieux prix Pritzker (1993), la plus haute distinction en architecture (soit l'équivalent du Nobel pour les autres disciplines), s'est éteint jeudi dernier à l'âge de 95 ans, tel que l'a annoncé son agence dans un communiqué.
Né à Tokyo le 6 septembre 1928, Fumihiko Maki a d'abord étudié au Japon auprès de Kenzo Tange, grand maître de l'architecture japonaise de l'après-guerre, très influencé par Le Corbusier, avant de poursuivre sa formation aux États-Unis, où il a démarré sa carrière dans les années 1950 en tant qu'architecte et enseignant.
En 1965, il est de retour à Tokyo et fonde son propre cabinet d'architecture, Maki and Associates, toujours en activité aujourd'hui (et comptant le rester).
"Pour moi, le projet de création le plus significatif est ma société - Maki and Associates. Elle reste une œuvre perpétuellement en cours, évoluant sans cesse en adoptant de nouvelles idées au fil du temps, assurant ainsi sa pérennité", selon une citation de Fumihiko Maki mentionnée mercredi par son cabinet. À l'inverse d'autres grands architectes japonais contemporains, Fumihiko Maki était plutôt méconnu en France, où il n'a été associé qu'à un seul projet, le plan d'urbanisme du quartier d'affaires de Châteaucreux à Saint-Etienne (sud-est) dans les années 2000-2010. © Dima Gavrysh / Associated Press
Avec d'autres anciens disciples de Kenzo Tange, comme Kisho Kurokawa (1934 - 2007) et Kiyonori Kikutake (1928 - 2011), Fumihiko Maki était l'un des fondateurs du métabolisme, un mouvement d'architecture avant-gardiste nippon des années 1960 qui proposait de concevoir les bâtiments comme des organismes vivants. Cette néo-architecture utopique, qui a connu son âge d'or dans les années 1960-70, proposait de considérer l'architecture comme un processus vital, avec des structures s'intégrant harmonieusement dans l'environnement urbain, mais aussi remplaçables, voire modulables.
Parmi la pléthore de réalisations à l'actif de l'architecte japonais se trouve l'une des tours de bureaux de Ground Zero, à New York, sur les ruines du World Trade Center reconstruit après les attentats du 11 septembre 2011 (4 WTC, 2013). © courtesy Silverstein
L'architecte Paul Chemetov, à jamais célèbre pour le "paquebot" du siège du ministère des Finances, dans le quartier de Bercy, à Paris, s'est éteint comme son homologue jaoponais, à l'âge de 95 ans.
Fils d'émigrés russes, dont l'illustrateur Alexandre Chemetoff dit Chem, ce diplômé des Beaux-Arts de Paris a été influencé par les conceptions du Corbusier. Passionné d'urbanisme, Paul Chemetov, ici en photo devant Bercy, a remporté de nombreux concours publics d'architecture lui permettant de réaliser plusieurs édifices, notamment en région parisienne. Longtemps adhérent au Parti communiste, il se disait au service des habitants les plus modestes. En 2015, il avait ainsi pu coordonner la rénovation de l'imposant immeuble des Coursives à Pantin (Seine-Saint-Denis), plus de 30 ans après avoir en supervisé sa construction. © Pascal Pavani / AFP
Le "paquebot" de Bercy, bâti entre 1984 et 1989, est sans doute l'œuvre la plus connue de l'architecte. Le fameux bâtiment permet de regrouper le ministère des Finances dans un seul quartier. "Bercy est le seul bâtiment administratif construit perpendiculairement à la Seine", rappelle sur son site internet le ministère, relevant sa "symbolique médiévale", avec des douves et une porte d'honneur en bronze.
Paul Chemetov a aussi conçu :
– la réhabilitation de la Grande Galerie de l'évolution du Muséum d'histoire naturelle à Paris ;
– La place Carrée au sein du Forum des Halles ;
– La prolongation de l'axe Tuileries-Étoile au-delà de La Défense ;
– Et encore l'ambassade de France en Inde.
Toutefois, certaines de ses réalisations, critiquées pour leur esthétique démodée, ne lui ont pas survécu. En banlieue sud de Paris, il a attaqué en justice les démolitions dans le département de l'Essonne d'un immeuble d'habitation à Courcouronnes et celle du siège de l'Assurance-maladie à Vigneux-sur-Seine. L'architecte avait perdu ses deux procès.