Quel que soit le domaine d’intervention, les différentes utilisations des liants bitumineux peuvent induire une exposition directe des travailleurs aux bitumes mais surtout à leurs émissions, lorsqu’ils sont chauffés pour leur manipulation.
L’exposition des travailleurs aux liants bitumineux et à leurs émissions implique ainsi les voies respiratoire, cutanée, par contact direct avec les produits et orale, via l’ingestion de produits ou de leurs émissions (contact main-bouche, notamment).
En l’absence d’harmonisation au niveau national et international
Par ailleurs, le benzo(a)pyrène, traceur historique du risque cancérogène mesuré dans les émissions de liants bitumineux, n’est plus le seul traceur pertinent et l’Anses formule des recommandations de rechercheafin de mieux appréhender le risque sanitaire.
Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a récemment classé l’exposition aux bitumes oxydés et à leurs émissions lors des travaux d’étanchéité comme cancérogène probable pour l’homme et l’exposition aux bitumes et leurs émissions lors de la pose d’enrobés et/ou lors de travaux d’asphaltage comme cancérogène possible.
Au-delà du potentiel cancérogène, les études épidémiologiques ont mis en évidence l’existence d’effets respiratoires (asthmes, bronchites chroniques…) liés à une exposition des travailleurs.
Des effets cardiovasculaires et immunotoxiques sont également suspectés. Pour les effets cutanés, l’Anses souligne qu’il n’est pas encore possible de tirer des conclusions définitives sur l’existence d’un risque de cancer cutané et que des données sont nécessaires afin d’évaluer les effets conjugués liés à une co-exposition aux émissions de bitumes et aux rayonnements solaires.
Au regard de ces différents éléments, l’Anses conclut à l’existence d’un risque sanitaire associé à une exposition des travailleurs aux liants bitumineux et à leurs émissions. En conséquence, elle considère que les expositions professionnelles aux liants bitumineux et leurs émissions devraient être réduites.
La réduction des expositions passe prioritairement par des mesures de prévention collective et d’adaptation de l’organisation du travail. Elles visent à permettre notamment la réduction et le captage des fumées émises, la réduction d’impact de la chaleur ainsi que de la coexposition aux produits bitumineux et au rayonnement solaire.
Enfin, l’Anses attire l’attention sur une problématique nationale émergente. En effet, dans une logique de réduction des coûts, la majorité des travaux routiers concernent aujourd’hui la rénovation et l’entretien du réseau existant impliquant la mise en oeuvre d’opérations de recyclage et de rabotage des anciens revêtements routiers.
L’Anses insiste donc sur l’importance de la mise en place d’une surveillance étroite des émissions potentiellement dangereuses pour les travailleurs(amiante, goudrons, etc.) générées lors des ces opérations.
*L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail
La consommation moyenne annuelle française de bitume est estimée à plus de 3 millions de tonnes (entre 2000 et 2010), avec une part de plus de 90 % consacrée aux applications routières, les 10% restant concernant les applications industrielles (activités d’étanchéité et d’isolation).