Fiscalité des VUL : faut-il craindre les évolutions ?

VUL : fiscalité et exclusions. © Citroën

À l’avenir, les VUL pourraient voir leur fiscalité s’alourdir encore un peu plus. L’exclusion des centres villes menace aussi les plus anciens d’entre eux.




"Les utilitaires ont au moins une chance, ils ne sont toujours pas soumis au malus", nous dit Marc Horwitz, journaliste spécialiste de la fiscalité des VUL. "Cette taxe qui s’applique sur les rejets de CO2 et donc le niveau de consommation, concerne les seuls VP". Jusqu’à aujourd’hui en effet, les véhicules professionnels en sont exonérés. Mais jusqu’à quand ? Les caisses de l’État sont vides et il est donc tentant pour le gouvernement, empêtré dans des déficits abyssaux, d’édicter de nouveaux impôts…

Les fourgons sont en revanche concernés par le malus au poids. Pas de chance, pour des véhicules en moyenne assez lourds ! À Paris, c’est la double peine puisque les utilitaires sont, en outre, assujettis pour la plupart au stationnement "SUV" qui pénalise les véhicules dépassant 1 600 kg. Les fourgons les plus lourds paient donc leur heure de parking jusqu’à 3 fois plus cher que les VP. Mais la mairie travaillerait sur une exemption pour les camionnettes à usage professionnel. À suivre donc...

 

 

 

Pas de malus, du coup, pas de bonus non plus

Les VUL, tenus hors du système du malus, n’ont, par ricochet, pas droit au bonus écologique, notamment concernant l’achat de véhicules électriques. C’est assez logique ! Mais, du coup, vu le prix des modèles en question, il faut vraiment avoir la fibre écolo chevillée au corps pour se lancer.

 

Les modèles électriques restent encore onéreux. Ici, la flotte Citroën, dont le ë-jumper, à droite, à 56 400 € (sans options) dans sa version électrique. © Citroën

 

Ou encore ici le Peugeot E-expert, dont les tarifs vont de 42 588 € à 52 308 € (prix moyen de 47 364 €). © Peugeot

 

 

Et l’Europe dans tout cela ? "L’UE n’a pas latitude sur les systèmes de bonus/malus qui restent des règlements nationaux", décrypte notre expert. "Pour l’instant donc, l’instance supranationale reste à l’écart". Jusqu’à quand ? Elle pourrait très bien intervenir sous le prétexte de rendre plus écolo le secteur des VUL, qui ne l’est pas trop actuellement. Rappelons qu’en France notamment, le marché des VUL reste ultra-dominé par le diesel. Ce carburant représente près de 80 % des ventes d’utilitaires chez nous. Et le parc roulant des VUL est, quant à lui, diésélisé à hauteur de 93 %.

 

Le Fiat scudo cargo, disponible en version électrique ou diesel. © Fiat

 

Le parc roulant des VUL reste ultra-dominé en France par le diesel. Les professionnels ont acheté encore 80 % de modèles à gazole cette année (ici, le Peugeot boxer 6 diesel). © Peugeot

 

 

 

ZFE, une large part des VUL exclue

L’instauration des ZFE (Zones à Faibles Émissions), on en compte une quarantaine aujourd’hui en France, constitue également une sérieuse menace pour les possesseurs de camionnettes, diesel notamment. En gros, ce label s’applique aux villes de plus de 150 000 habitants. Celles-ci interdisent la circulation des véhicules les plus polluants.

Les ZFE concernent désormais une quarantaine de villes françaises. En gros, celles de plus de 150 000 habitants. © www.écologique-solidaire.gouv.fr

 

 

Pour pouvoir pénétrer dans ces zones à faibles émissions, il faut arborer la bonne vignette CritAir. Étaient exclus jusque-là les véhicules dont le CritAir était supérieur à 3, soit les plus anciens d’entre eux et notamment, les vieux diesels.

 

Tous les VUL Crit’Air 0, 1 ou 2, c’est-à-dire les modèles les plus récents à essence ou hybrides ainsi que les modèles électriques ont toujours le droit de rouler dans les grandes villes. © www.écologique-solidaire.gouv.fr

 

 

Depuis le 1er janvier, l’interdiction de ZFE a été élargie aux véhicules CritAir 3. Il s’agit en gros :

– des voitures ;

– et des petits utilitaires diesel antérieurs à 2011, et essence antérieurs à 2006.

 

Cela représente près de 29 % des véhicules en circulation en France. Bref, près d’une auto sur trois se retrouve ainsi privée de circulation dans les grandes villes.  

 

Le calendrier de mise en place des ZFE a un peu dérapé… Initialement, les Crit’Air 3 devaient être interdites de ville dès 2022. Elles ne le sont que depuis début 2025 et encore sans verbalisation dans la plupart des cas. © www.écologique-solidaire.gouv.fr

 

 

 

Phase transitoire…

Bon, pas de panique pour autant. Pour le moment, la plupart des villes ne verbalisent pas. Elles sont dans une phase de "sensibilisation pédagogique" : en clair, la période est à l’explication, pas à la verbalisation. Cette "phase" devrait perdurer jusqu’aux élections municipales de mars 2026. Tiens, tiens comme c’est bizarre… Il serait idiot d’agacer les électeurs. L’application de cette règle attendra donc cette échéance.

Les édiles et les pouvoirs publics redouteraient également, semble-t-il, un nouvel épisode de révolte populaire type Gilets Jaunes. Rappelons que le mouvement avait été déclenché à l’époque, par la hausse du prix du… diesel. Traumatisées par le souvenir de ce soulèvement d’une rare violence, les instances dirigeantes, étatiques ou locales, se pressent lentement. Du coup, la mairie de Paris a promis que les éventuels contrôles ne donneraient pas lieu à des PV, pour le moment. Les premières contraventions ne tomberont pas avant 2026. Idem à Grenoble et Montpellier, deux villes pourtant "très en avance" sur le dossier. Seule l’agglomération lyonnaise serait passée à l’action.
 

"Pour qu’il y ait PV il faut des panneaux à l’entrée des villes", rappelle Marc Horwitz." Pour le moment, dans de nombreuses villes il n’y a pas." Pas de panneau et donc pas de PV, c’est tellement simple ! ©

 

 

Officiellement encore, les radars de vidéoverbalisation capables de détecter les autos interdites ne sont pas encore prêts. Cela laisse un peu de temps aux possesseurs de vieux véhicules pour se retourner.

 

Les propriétaires de vieux véhicules ont encore le temps de se retourner. © Renault

 

 

L’air s’améliore déjà

L’État a lui-aussi fait un peu marche arrière. Il vient d’édicter qu’en cas d’amélioration de la qualité de l’air, les zones ZFE n’étaient plus dans l’obligation d’appliquer les restrictions Crit’Air. Une dérogation qui arrive fort à propos. Ainsi Marseille, Rouen et Strasbourg sont-elles passées de ZFE à simples "territoires de vigilance". Avec à la clé, le gel de nouvelles restrictions. À Strasbourg, l’interdiction aux CritAir3 est repoussée à Janvier 2027.

L’écologie est priée de s’adapter à l’état psychologique et surtout économique et financier du pays et de ses habitants. Bref, le pragmatisme l’emporte.

 

 

 

Des brouettées de dérogations

Pragmatisme toujours, Paris octroie 22 dérogations de toutes sortes à de multiples catégories de conducteurs :

– les travailleurs en horaires décalés "commençant ou finissant leur activité professionnelle entre 21 heures et 6 heures" échappent ainsi à l'interdiction ;

– Les véhicules transformés : benne, benne amovible, plateau… y échappent aussi : cela devrait permettre à une partie des artisans du BTP de continuer à rouler en ville au volant de leur VUL polluant ou non.

Quand l’écologie s’efface devant le concret, le quotidien ... Saluons ici ces initiatives inhabituelles, signes d’une forme de bon sens qui ne court pas si souvent les rues. 




Source : batirama.com / Nicolas Dembreville

L'auteur de cet article

photo auteur Nicolas DEMBREVILLE
« Depuis tout petit, j’aime l’automobile et sous toutes ses formes. » Les utilitaires, par leur côté pragmatique et fonctionnel, intéressent vivement Nicolas Dembreville, journaliste parisien de 52 ans. Décrypter l’actuel “passage à l’électrique” plus ou moins contraint par la législation de ce secteur, le passionne. Il cherche à informer, renseigner, accompagner les artisans le mieux possible dans cette révolution automobile. En parallèle, Nicolas écrit également sur l’horlogerie, le design ou les phénomènes de société.
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