Si la rue de la Huchette, dans le Ve arrondissement de Paris, a conservé son tracé moyenâgeux, l’architecture de ses bâtiments date des XVIIIe et XIXe siècles.
RIVP, important bailleur social parisien, a engagé un programme remarquable sur un immeuble R+5 du XVIIIe siècle, comprenant la réhabilitation du corps principal du bâtiment et la reconstruction d’une aile contiguë, de même hauteur.
Ce chantier de 1,8 million d’euros s’inscrit dans le cadre du Plan Climat Paris, qui prévoit notamment de rendre l’habitat durable et sobre en carbone. Le bâtiment devra utiliser au plus 80 kWh d’énergie primaire/m2.an. Les 607 m2 Shon seront livrés en 2016.
Les maîtres d’œuvre, le cabinet DLA Dumont Legrand Architectes et le BET LM Ingénieur, s’inscrivent tous deux dans une démarche environnementale. Dès le stade de l’esquisse, ils ont travaillé de concert dans l’idée de conserver les atouts du mode constructif de l’époque.
Peu modifié depuis 1862, l’immeuble conservera son aspect extérieur. Il abritera 10 logements (2 studios de 25 m2 par étage) et un local commercial, en rez-de-chaussée et sous-sol.
L’aspect le plus intéressant de la réhabilitation réside dans le choix d’une isolation en béton de chanvre pour améliorer les performances thermiques des murs. Construits en pierre depuis les fondations jusqu’au deuxième étage, puis en maçonnerie, avec des épaisseurs dégressives, ces murs, enduits de chaux, avaient pour caractéristiques une forte inertie et une importante perméance à la vapeur d’eau.
Pour conserver cet atout, qui participe de la longévité du bâtiment, les maitres d’œuvre ont choisi une isolation « respirante », elle aussi. Comme la pierre et la chaux, le béton de chanvre permet en été, l’évaporation de l’eau dans l’épaisseur du mur, qui absorbe la chaleur et procure une certaine fraîcheur. En hiver, la condensation de l’eau dans le mur dégage de la chaleur.
Côté intérieur du bâti, 100 mm de doublage isolant béton de chanvre (Tradical PF 70 + Chanvribat) ont été projetés mécaniquement, opération qui a pris moins d’une semaine. Après séchage (1 cm par semaine), la finition a été réalisée par un enduit à la chaux épais de 15 mm. L’isolation intérieure présente une inertie hygrothermique similaire à l’inertie de masse du mur.
A l’extérieur, 40 mm d’enduit hygrothermique chaux-chanvre (Tradical PF 80M + Chanvribat), ont été projetés à la truelle, puis couverts de 20 mm d’enduit de finition chaux-sable. L’isolation extérieure permet de réduire les ponts thermiques de l’enveloppe, de la même façon qu’à l’origine, sans entraîner de surépaisseur.
Avec ce chantier, l’entreprise Batirenov (filiale de Bouygues) réalisait sa première application de béton de chanvre ; une expérience positive, selon les opérateurs, qui ont apprécié la simplicité de la mise en œuvre (pas de pare-vapeur, de lame d’air à prévoir, pas de scotch, etc.).
Le béton de chanvre s’applique directement sur le support purgé de l’ancien enduit, avec une accroche mécanique parfaite, du fait de la cohésion des matériaux. De même, les enduits de finition s’appliquent aisément sur le béton de chanvre.
Effectuée du début à la fin par le même intervenant, la mise en œuvre simplifie le déroulé du chantier et permet de mieux maîtriser sa durée.
Homogène, la durée de vie des divers matériaux favorise la tenue dans le temps du bâtiment.
Recyclable à 75% et utilisant une fibre naturelle, le béton de chanvre améliore grandement le bilan carbone du projet, pour une majoration de 5 à 10% du coût du gros œuvre.
Cohérente avec les qualités initiales de la construction, la solution retenue ici pour améliorer les performances thermiques du bâtiment a valeur d’exemple pour les futures rénovations d’immeubles du même type, dont quelque 6000 sont recensés dans la capitale.