Les industriels de la ventilation et les installateurs de ces matériels étaient bercés d’espoir. Depuis le lancement des débats sur la RE 2020, des promesses – orales – avaient été formulées sur la mise en œuvre d’une procédure obligatoire de réception des installations de ventilation des bâtiments résidentiels dans le texte applicable en janvier 2022.
Au retour de la réunion du « Club Ventilation » à la DHUP, ce 22 juin, les participants ont déchanté. De réception en bonne et due forme ne reste plus dans la RE 2020 qu’une attestation délivrée au maître d’ouvrage de l’installation de cet équipement, sans mention de la vérification de son bon fonctionnement.
Au syndicat des industriels Uniclima, par ailleurs membre de la récente Association française de la ventilation, ce retour d’information a fait l’effet d’une bombe. Jean-Paul Ouin, son délégué général, s’est fendu d’un courrier courtois et direct pour demander à rencontrer la ministre chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, pour développer ses arguments.
« Dans les faits, explique-t-il, la réception va se résumer à un vague contrôle qui restera purement indicatif et l’information sur l’absence de conformité ne sera pas portée à la connaissance du maître d’ouvrage donc des consommateurs. » Il rappelle qu’en 2018, « plus de 70% des opérations de construction contrôlées [...] présentaient au moins un défaut sur le système de ventilation. »
Au fil du durcissement de la réglementation sur la construction neuve, ce sujet de la ventilation grossit à vue d’œil. Avec la RT 2012 et l’application des mesures d’étanchéité à l’air des enveloppes des bâtiments, les industriels et ingénieurs avaient pointé l’anachronisme de la réglementation de 1983 sur la ventilation mécanique ; celle-ci tenait largement compte des entrées d’air parasites.
À la faveur des réglementations européennes sur la conception des produits et l’application des principes d’étanchéité des réseaux aérauliques, la filière ventilation pensait boucler, en partie, ce sujet avec cette dernière vérification technique sur le chantier.
Pour Uniclima, ce recul de l’administration signifie laisser perdurer une anomalie, à savoir, « cautionner par voie réglementaire la non-qualité des bâtiments sur le terrain de la qualité de l’air intérieur. » Et d’ajouter : « Cette non-qualité peut se traduire pour les industriels par un risque assurantiel important alors même que c’est la mise en œuvre des équipements qui pose problème. »
Dans le contexte global d’une construction, surtout d’une maison individuelle, la ventilation est concrètement au centre de véritables enjeux et pâtit d’un faible poids. D’une part, cet équipement est indispensable pour maintenir la pérennité du bâti et la qualité de l’air intérieur, mais d’autre part, il s’agit d’un lot très modeste au regard de l’ensemble de l’ouvrage – quelques centaines d’euros pour une simple flux.
Qui plus est, plusieurs intervenants sont concernés : l’électricien ou le chauffagiste qui la pose, le menuisier qui installe les fenêtres équipées de bouches, le plaquiste qui fermera les cloisons où sont logées les gaines… La responsabilité d’un défaut en fin de chantier est d’autant plus problématique.
Promoteurs ou maîtres d’ouvrage pourraient juger excessifs de reprendre à grands frais l’exécution de cette installation. Les blocages sur ce sujet seraient essentiellement le fait des promoteurs privés comme des bailleurs sociaux pour qui cette vérification est perçue comme une dépense inutile. En clair, le bon air intérieur est loin d’avoir le poids symbolique qu’a pris le carbone dans la RE 2020.
Uniclima espère réveiller de la filière ventilation à la suite de ce courrier. Pour marquer la détermination des industriels qui ont travaillé ce sujet depuis des mois, Jean-Paul Ouin a complété sa missive de « suggestions » très précises : pour le moins, l’indication dans l’attestation du résultat de l’inspection.
Il rajoute la recherche d’une égalité de traitement entre les différentes solutions de ventilation, telles simple flux ou double flux, soumis au protocole Promovent, et celles dites non-contrôlables, comme la ventilation hybride. Il propose l’instauration d’un registre de contrôle pour collecter les données de chantier et améliorer les bonnes pratiques ; et aussi, amener les parties prenantes à participer plus activement aux travaux de réglementation. À suivre.
Source : batirama.com/ Bernard Reinteau