"Le vrai problème, ce serait le remplissage des stockages au printemps et à l'été, en préparation de l'hiver 2022-2023", a souligné Catherine MacGregor, DG du groupe français Engie, dans une interview aux Echos. "Il serait très difficile de trouver les volumes nécessaires et ce serait très dur en cas de conflit long en Ukraine".
"En réalité, nous entrerions alors dans un nouveau monde pour l'énergie, sous l'effet d'un choc physique et d'un choc de prix sans précédent qui transformerait sans doute durablement le paysage énergétique", analyse Mme MacGregor. "Pour l'hiver qui se termine, il n'y aurait pas de problème d'approvisionnement, d'autant plus qu'il est plutôt clément. Même en étant totalement privés du gaz russe, nous pourrions faire face grâce aux fournisseurs d'autres pays, par gazoduc ou par navire méthanier pour le GNL", a souligné la DG d'Engie.
La crainte de perturbations des exportations en provenance de Russie, qui fournit 40% des importations de gaz européen, ont fait flamber son cours en Europe à un nouveau record historique vendredi 4 mars. Le gaz russe représente 20% des approvisionnements d'Engie. Le groupe négocie des volumes additionnels avec la Norvège, les Pays-Bas, l'Algérie et les Etats-Unis "mais il faut être lucide", a souligné Mme McGregor: "les leviers qui sont à notre main sont d'une portée limitée. Ils ne seront pas suffisants pour remplacer tout le gaz qui vient de Russie aujourd'hui".
En cas de coupure, "il n'est pas inimaginable que les pouvoirs publics mettent en place des mesures de limitation de la demande", a souligné la DG d'Engie. Les industriels comme les citoyens pourraient également baisser leur consommation, notamment le chauffage. Il faudrait aussi "plafonner les prix de gros du gaz en Europe, qui aurait le mérite par ricochet de limiter les prix de l'électricité", et accélérer dans les énergies renouvelables, que ce soient les éoliennes ou le biométhane, selon Mme MacGregor.