Photo : La tour Pleyel, en cours de rénovation, à Saint-Denis. © Sylvain Hitau
Construite entre 1969 et 1973, la Tour Pleyel se dresse sur 129 mètres à Saint-Denis (93), au Nord de Paris. Elle a abrité pendant des décennies des bureaux jusqu'en 2008 où, vieillissante, elle a été rachetée par la société Financière des Quatre Rives avec l'objectif de créer un programme mixte tertiaire et complexe hôtelier.
En 2016, une première phase de travaux s'est attelée au gigantesque chantier de désamiantage et de curage, mettant à nu l'ossature béton de l'édifice. Sa forme pyramidale a été préservée et un étage en structure métallique a été ajouté portant à 40 son nombre de niveaux. Le groupe allemand H-Hotels va signer ainsi son premier établissement en France.
Modernisée, la tour doit être livrée fin d'année 2023 avant les JO de Paris et comptera 697 chambres et au total 40.000 m². Les espaces intérieurs ont été reconfigurés en chambres et circulations. Les planchers en caissons béton sont recouverts d'une chape sèche légère et isolée acoustiquement.
Le nouvel habillage des façades comprend des bandes filantes vitrées ainsi qu'un capotage alu blanc des poteaux béton. © Sylvain Hitau
Outre la transformation de la tour, il est aussi prévu la construction d'un immeuble en U de six étages baptisé Music-Hall et d'une tour de 21 étages nommée Maestro, deux édifices qui vont accueillir 34.500 m² de bureaux, un centre de conférences et des commerces et restaurants. Baptisé Paris Pleyel, ce programme ambitieux a été confié par la maîtrise d'ouvrage à l'architecte Sretchko Markovic de 163 Ateliers et pour la décoration intérieure à Axel Schoenert de l'agence ASAA.
Les planchers curés sont composés de poutres et de caissons en béton qui sont médiocres d'un point de vue acoustique. Sur 40 étages, l'isolation acoustique devait être renforcée entre niveaux ainsi qu'en horizontal afin d'éviter les transmissions parasites dans la dallette béton, une difficulté venant des fuites acoustiques dues aux caissons de béton.
L'acousticien Jérôme Falala, fondateur et associé de Studio FA, le bureau d'études acoustique sur le projet, précise que "des tests ont été réalisés sur site en phase études à l'aide de trois cellules d’essai : deux côte à côte et une au dessus, permettant de mesurer l'isolation acoustique brute de part et d'autre du plancher et ainsi qu’horizontalement entre futures chambres. Le preneur a fixé dans son cahier des charges des performances supérieures à la réglementation, à des niveaux qui sont assez habituels pour un hôtel de cette catégorie."
Ainsi la réglementation acoustique pour les hôtels demande pour le bruit d'impact sur le plancher de 60 dB max en réception dans une chambre, suivant un bruit normalisé réalisé par une machine à chocs. Le cahier des charges demandait un bruit de choc de seulement 45 dB max. Pour l'isolement aux bruits aériens entre chambres, la demande réglementaire est de 50 dB minimum et le cahier des charges du projet exigeait 52 dB ce qui est quasi identique à la réglementation dans l'habitat à 53 dB. Il fallait donc renforcer les planchers tant en transmission directe de niveau à niveau, qu’au sein d’un même étage en luttant contre les transmissions parasites via le plancher existant.
L'idée étant de ne pas surcharger la structure existante, la chape traditionnelle du fait de la contrainte de poids n'a pas été retenue et son usage a été limité aux circulations. "Différentes solutions de chapes ont été testées avec la cellule d’essai. La chape allégée a été écartée car elle donne une sensation assez désagréable de sonner creux. La réponse retenue au final est la combinaison d'un plafond suspendu étanche en plaque de plâtre et isolant et d'une chape sèche sur laine minérale. En séparatif, il a été retenu des cloisons sèches optimisées avec des plaques de plâtre de haute densité qui permettent de limiter les encombrements. Les cloisons sont installées avant les chapes et plafonds étanches, permettant ainsi de s’affranchir des fuites parasites par les planchers existants", complète Jérôme Falala. Il faut noter l'absence de contrainte acoustique sur le revêtement de sol, l'idée étant de pouvoir changer de finition en fonction de l'aménagement intérieur retenu.
France Sols, filiale de l'entreprise générale Spie Batignolles, s'est vu confier le macro-lot sols et finitions sur le projet. La chape sèche choisie pour les planchers des 40 étages est un produit Fermacell, qui représente environ 800 m² par étage, pour les chambres et certaines circulations sauf les escaliers, du niveau 4 au 37, soit en tout de l'ordre de 22.000 m². La pose de la chape a démarré mi-janvier et va se poursuivre jusqu'à l'été. Quatre niveaux sont réalisés en deux semaines en mobilisant deux équipes de pose.
"Une spécificité des planchers existants en caissons béton, est que chacun a une flèche de 3/4 cm en creux au centre, qu'il faut rattraper avec des granules qui sont lissés à la règle avant de poser la chape sèche", détaille Sofiane Kartout, conducteur de travaux chez France Sols. © François Ploye
Les dalles Fermacell de 4 cm d'épaisseur sont légères et performantes acoustiquement. Les géomètres ont fait des relevés par scan 3D au cm, et France Sols a effectué une campagne complémentaire au lasermètre avec une précision au mm. Les ouvriers disposent sur leurs tablettes des plans colorés par zones en fonction de l'épaisseur de granules. Les granules sont répandus sur les caissons béton entre 1 et 12 cm de hauteur, et sur ce projet la moyenne de granules est de 3 cm avec un rattrapage allant jusqu'à 6 cm.
Les panneaux de gypse sur isolant sont ensuite emboîtés et agrafés entre eux, suivant un croisement en quinconce comme pour un parquet. © François Ploye
Créée en 1974, la société Fermacell, qui compte trois usines en Espagne, Allemagne et Pays-Bas, a rejoint le groupe James Hardie Bâtiment en 2018. Thomas Galvez, référent Fermacell île-de-France & Nord Est pour le groupe, explique que "sur ce projet nous étions les seuls à apporter pour la chape la réponse technique, en acoustique, en poids avec ici 44 kg/m² et en temps de pose. Coupe-feu (CF) 1H, ces plaques sont fabriquées en gypse, avec du liant naturel, du papier recyclé et de l'eau. Les panneaux sont commercialisées en 50 cm par 1,50 mètre avec 5 cm de battue et une épaisseur comprise entre 20 et 45 mm, et ici sur ce projet en 40 mm dont 20 mm de laine de roche."
Des bandes résilientes sont placées en périphérie des pièces pour la rupture acoustique et reprendre la dilatation du sol. © François Ploye
Les plus grands chantiers de France
La mythique tour de Saint-Denis est en phase de rénovation lourde, en vue d’une transformation en un hôtel de luxe. Le travail d'isolation acoustique sur les planchers intègre l'usage d'une chape sèche Fermacell.