"Après avoir examiné tant la recevabilité des recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission des pourvois", écrit dans sa décision la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire. De ce fait, la Cour de cassation a rejeté mercredi les pourvois déposés par les associations de défense de victimes de l'amiante et des parties civiles après le non-lieu dans l'affaire de la contamination des salariés des Chantiers navals du Nord et de la Méditerranée (Normed).
Dans un communiqué, l'association des victimes de l'amiante et autres polluants (AVA), le comité anti-amiante Jussieu et l'association régionale de défense des victimes de l'amiante du Nord-Pas-de-Calais (Ardeva) déplorent une "fin en eau de boudin", et ce "dans un dossier aussi emblématique que celui des chantiers navals de Dunkerque au bout de 27 ans d'instruction est une tache de plus sur l'institution judiciaire, dans laquelle les victimes et les citoyens en général ont déjà perdu confiance". Lesdites associations regrettent que la Cour de cassation ait écarté leur pourvoi "en refusant tout simplement" de l'examiner "sans un mot d'explication", considérant cela comme "un nouveau palier dans le mépris pour les victimes".
Une information judiciaire avait été ouverte à Paris après la plainte déposée en mai 2006 par un ancien électricien de Normed atteint d'un mésothéliome pleural, reconnu comme maladie professionnelle.
À savoir que la Normed (ou Chantiers navals du Nord et de la Méditerranée) est une société créée en 1982 sur décision du ministre de la Mer, Louis Le Pensec, et qui regroupait plusieurs chantiers navals et entreprises de la construction navale, en France : Dunkerque, La Ciotat et La Seyne-sur-Mer. Le 24 juin 1986, la société est en cessation de paiement, puis en liquidation le 20 février 1989. Les trois chantiers navals de Dunkerque, La Ciotat et La Seyne-sur-Mer ferment leurs portes à la suite de la liquidation de la Normed.
Deux responsables de Normed dans les années 1980 avaient été mis en examen en 2008 pour homicides involontaires et non-assistance à une personne en danger. Un troisième mis en cause, haut-fonctionnaire à l'époque des faits, avait vu sa mise en examen annulée en 2018.
Au printemps 2021, les juges d'instruction avaient rendu un non-lieu, estimant que l'enquête n'avait "pas permis d'établir l'existence d'une faute commise par les personnes mises en examen dans ce dossier". Les parties civiles avaient contesté ce non-lieu devant la cour d'appel de Paris, cette dernière confirmant l'abandon des poursuites le 5 octobre 2022, avant de former un pourvoi devant la Cour de cassation.
Ces dernières années, la plupart des dossiers de l'amiante instruits à Paris se sont soldés par des non-lieux, au grand dam des victimes qui réclament un procès pénal pour juger les responsables de ce scandale sanitaire.