Ce mardi 7 mai 2024, le tribunal correctionnel de Montpellier vient de condamner la commune de Vias, ainsi que son maire Jordan Dartier, à "respectivement 1,25 millions d'euros dont 1 million avec sursis, et 500 000 euros, dont 480 000 avec sursis" comme à dédommager à hauteur de 10 000 euros l’association de protection de l'environnement FNE (France Nature Environnement) pour non-respect de la loi littoral.
Le maire a fait appel.
Élu plus jeune maire de l’Hérault en 2014 à l’âge 27 ans, Jordan Dartier, avocat de profession, avait de l’ambition pour sa commune et souhaitait réparer une injustice : "Vias-plage est la seule station balnéaire du littoral héraultais ne disposant pas d’une allée piétonne en front de mer." faisait-il remarquer dès son entrée en fonction. Alors, très vite, le jeune édile propose un projet ambitieux pour Farinette (la plage principale de Vias) : offrir à la station balnéaire un nouveau visage en réaménageant l’avenue de la Méditerranée. Au programme : une réorganisation de l’espace, une devanture de commerces et un promenoir surélevé offrant une vue panoramique sur plus de 300 mètres ... Le hic ? Des travaux réalisés sans permis de construire, dans la bande de 100 mètres du rivage. © Hérault Tribune
Vias (Hérault) est une commune rurale de 6 000 habitants à peine, possédant un patrimoine naturel remarquable, dont :
– deux sites Natura 2000 (le "plateau de Roquehaute" et "est et sud de Béziers") ;
– Trois espaces protégés (la réserve naturelle nationale de Roque-Haute, "la Grande Cosse" et "le Clot") ;
– Et neuf zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique.
Un patrimoine naturel remarquable complété par un front de mer qui, selon Jordan Dartier et grâce aux aménagements réalisés en plusieurs phases, avait enfin fier alllure : "Vias-Plage a été totalement métamorphosée, aujourd’hui, notre front de mer a désormais fière allure". Cependant, d'autres ne l'entendaient pas de cette oreille. © Jonathan Fabre / Vias
Ainsi, plage Farinette, entre 2018 et 2019, une promenade, constituée de deux dalles de 30 à 70 mètres sur le front de mer et associée à un parking de 6 200 m², est sortie de terre. Pourtant, la commune avait une interdiction juridique, celle d’entreprendre des chantiers dans cette zone pour des raisons écologiques car le secteur de ladite promenade bénéficiait d’un PLU (Plan Local d'Urbanisme) suspendu en février 2018 par un arrêté préfectoral.
La promenade, plage Farinette. © Jonathan Fabre / Vias
Pour Simon Popy, le président de l'association FNE (France Nature Environnement) pour la zone Occitanie-Méditerranée, "les constructions illégales ont été réalisées en toute connaissance de cause", comme il l'a confié à France 3 Régions. "Cette inconstructibilité avait été confirmée par le Conseil d'État en référé, puis le tribunal administratif, la cour administrative d'appel et le Conseil d'État au fond, soit, en tout, à cinq reprises", rappelle-t-il.
Pour le maire, Jordan Dartier, ce n'est pas le même son de cloche : "C'est une décision inacceptable ! Je suis condamné sur un projet pour lequel j'ai été élu. La mairie avait lancé un marché public pour le réaménagement de la station balnéaire. Je l'exécute et j'ai obtenu des subventions de la part de l'État et du conseil régional."
FNE s’est portée partie civile afin de "rappeler les enjeux relatifs à la bonne application de la loi littoral (1986)", visant à protéger les espaces naturels et aménager de manière durable les littoraux. Pour Simon Popy, ladite loi "est trop souvent considérée comme facultative. Ce n’est pas parce que des collectivités ont réalisé des projets dans l’illégalité pendant des années que l’on doit continuer."
La condamnation du tribunal correctionnel de Montpellier se veut exemplaire : 1,25 millions d'euros, dont 1 million avec sursis, et 500 000 euros, dont 480 000 avec sursis et un dédommagement à hauteur de 10 000 euros de l’association FNE.
Le maire, lui, dénonce une décision prise à la hâte par les magistrats, tandis que Simon Popy, lui, s'estime satisfait d’une telle décision de justice, jugeant cette condamnation exemplaire et significative et justifiée par "l’attitude du maire depuis des années. Il y a eu cinq décisions administratives qui confirment l’illégalité du projet et il s’assoit dessus en remettant en cause la justice."
France Nature Environnement espère que cette condamnation dissuadera d’autres élus.