Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 57% des entreprises n'ont pas recruté un apprenti ces trois dernières années en raison de l'inadaptation de la règlementation relative à la protection des jeunes travailleurs.
Le ministre du travail semble avoir pris conscience de cette situation en publiant deux décrets datés du 17 avril 2015 visant à simplifier la procédure de formation des jeunes salariés âges de moins de 18 ans (et réformant eux-mêmes les décrets du 11 octobre 2013) en remplaçant, en cas de travaux dangereux, le système d’autorisation administrative par un système de déclaration.Plusieurs modifications sont prévues en ce sens.
Toutefois, comme rien n’est simple dans ce pays, le décret encadre cette déclaration. Tout d’abord, elle est délivrée pour trois ans. Ensuite, pour être valable, le chef d'entreprise devra mettre en oeuvre les actions de prévention nécessaires, dispenser la formation à la sécurité et obtenir pour chaque jeune un avis médical d'aptitude qui devra être renouvelé chaque année soit par le médecin du travail pour les salariés, soit par le médecin chargé du suivi médical des jeunes dans leur établissement de formation.
Enfin, la déclaration devra être adressée à l'inspecteur du travail préalablement à l'affectation des jeunes aux travaux interdits. Elle devra contenir cinq éléments :
Dans le cas où certaines informations vendraient à être modifiées pendant la durée de validité de la déclaration de dérogation, l'employeur ou le centre de formation disposeraient de huit jours à compter des changements intervenus pour transmettre l'information à l'inspection du travail.
Certes, cette nouvelle donne simplifie le processus de recrutement des apprentis ! Il est certain que le système d’autorisation pouvait être lourd et fastidieux pour les employeurs, voire décalé dans un pays avec un taux de chômage aussi important.
Qui plus est, il paraît pour le moins tragi-comique d’interdire à un apprenti des travaux en hauteur alors que telle sera la situation de sa future activité ! Toutefois, n’oublions pas que cette déclaration est soumise à une obligation de formalisme !
Qui plus est, les risques inhérents à la sécurité continuent de reposer sur la tête du chef d’entreprise puisque l’employeur est tenu de prendre, selon les termes de l’article L. 4121-1 du Code du Travail, toutes « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » ;
De même, la charte des droits fondamentaux de l’union européenne prévoit que « tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité » ;
La Cour de cassation énonce de son côté que « l’employeur tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, doit en assurer l’effectivité » Cass. soc. 28 février 2002, pourvoi n° 00-11793). S’il s’agit donc d’une simplification, elle ne limite en aucun cas les obligations de sécurité pour l’employeur !