Ceci est notre second article consacré à l’hydrogène, après une première présentation de cette énergie du futur. Tout le monde se souvient de l’électrolyse, cette expérience de Sciences Naturelles au lycée. On prend un réservoir rempli d’eau et, en faisant passer un courant électrique à l’intérieur grâce à deux électrodes, l’eau (H2O) se sépare en deux gaz, l’hydrogène et l’oxygène, ou plus exactement en dioxygène (O2) et en dihydrogène (H2).
Dans une pile à combustible se produit la réaction inverse. A partir de dioxygène (O2) et de dihydrogène (H2), une pile à combustible produit un courant électrique, de la chaleur et de l’eau. Oxygène et hydrogène sont ultra-abondants sur terre. La réaction n’engendre aucune pollution.
Produisant à la fois de la chaleur et de l’électricité, la pile à combustible apparaît donc comme le générateur domestique idéal. Oui, mais voilà : tout n’est pas rose. Les composants des piles à combustibles sont encore très coûteux et, selon les technologies utilisées, leur durée de vie peut être horriblement courte.
Les piles à combustible prévues pour le marché domestique, mais aussi pour l’équipement des voitures, sont du type PEM pour Proton Exchange Membrane. On les désigne aussi sous l’anagramme PEFC pour Proton Exchange Membrane Fuel Cell. Fuel Cell signifie pile à combustible.
Dans une pile à combustible PEM, il se produit une oxydation. C’est-à-dire une réaction chimique durant laquelle apparaît un échange d’électrons entre un oxydant et un réducteur. L’oxydant capte les électrons. Tandis que le réducteur cède les électrons.
Dans une pile à combustible PEM, l’hydrogène est amené sur l’anode et est divisé par le catalyseur en ions positifs et en électrons négatifs. Le rôle du catalyseur consiste à accélérer cette réaction. Bloqués par l’électrolyte, les électrons font le tour et se déplacent jusqu’à la cathode par un conducteur électrique.
C’est ce qui produit un courant électrique, d’une intensité de 0,7 à 1 Volt selon les dimensions de la pile. En même temps, les ions d’hydrogène chargés positivement migrent à travers l’électrolyte (en réalité une membrane échangeuse d’ions) et se combinent à l’oxygène de l’air pour former de l’eau et libérer de la chaleur, à une température de 80°C environ.
Tout ceci se passe dans chaque élément de base de la pile à combustible. La machine que l’on appelle « pile à combustible » est composée de plusieurs piles de base, montées en parallèle.
Dans les piles à combustible, deux éléments sont particulièrement critiques : le catalyseur et les plaques bipolaires. Pour l’instant, les catalyseurs sont encore en platine : un métal rare, coûteux et dont 90 % des ressources mondiales connues sont partagées entre l’Afrique du Sud (80 %) et la Russie (10 %). Nous produisons environ 230 tonnes de platine par an seulement.
A ce rythme et compte-tenu des réserves évaluées à 13 000 tonnes sur terre, nous en avons encore pour moins de 60 ans. Mais la recherche progresse et de nouveaux catalyseurs seront sans doute découverts.
Le second composant vraiment important sont les plaques bipolaires. Comme il faut juxtaposer de nombreuses piles de base pour obtenir une puissance suffisante, les plaques bipolaires séparent deux piles et ont pour fonction la distribution de l’oxygène et de l’hydrogène, l’écoulement de l’eau et la collecte du courant électrique au sein des piles.
La recherche française est particulièrement bien placée dans ce domaine. La PME de pointe Symbio FCell, installée à Fontaine dans le 38, a développé avec l’aide du CEA une nouvelle génération de plaques bipolaires.
Elles sont incorporées dans les piles à combustible PEM de 5 à 20 kW que l’entreprise fabrique avant tout pour des véhicules et des bateaux. Associées à une optimisation des électrodes (anode et cathode), ces nouvelles plaques ont permis de doubler la puissance à volume égal – 2.9 kW dans un volume d’un litre - et de simplifier l’assemblage des piles à combustible. Le but de Symbio FCell a été atteint : le coût de fabrication de ses piles à combustible a été divisé par deux.
On connaît une demi-douzaine de types différents de piles à combustible déjà développés, plus une autre demi-douzaine non-encore sortis des laboratoires. Voici un petit tableau récapitulatif des solutions déjà commercialisées.
Type | Matériau constituant l’électrolyte | Alimentation à l’anode | Alimentation à la cathode | Puissance électrique | Rendement électrique | Température de fonctionnement |
AFC (Pile à combustible alcaline= | Hydroxide de Potassium | Dihydrogène H2 | Dioxygène | 10 à 100 kW | Pile seule : 70% | 60 – 90°C |
DBFC (Pile à combustible à hydrure de bore direct) | Membrane protonique ou anionique | NaBH4 (Tétrahydruroborate de sodium) liquide | Dioxygène | 250 mW/cm² | 50% pour une cellule de base | 20 – 80°C |
PEMFC (Pile à combustible à Membrane d’échange de protons) | Membranes polymères | Dihydrogène H2 | Dioxygène | 100 W à 500 kW | Pile seule : 50 à 70%, Système : 30 à 50% | 60 à 220°C |
DMFC (Pile à combustible à méthanol direct) | Membranes polymères | Méthanol | Dioxygène | 1 mW à 100 kW | Pile seule : 20 à 30% | 90 à 120°C |
PAFC (Pile à combustible à acide phosphorique) | Acide phosphorique | Dihydrogène H2 | Dioxygène | Jusqu’à 10 MW | Pile seule : 55%, Système : 40% | 200°C |
MCFC (Pile à combustible à carbonate fondu) | Carbonate de métaux alcalins | Dihydrogène H2, Méthane, gaz de synthèse | Dioxygène | Jusqu’à 100 MW | Pile seule : 55%, Système : 47% | 650°C |
SOFC (Pile à combustible à oxyde solide) | Céramique | Dihydrogène H2, Méthane, gaz de synthèse | Dioxygène | Jusqu’à 100 MW | Pile seule : 60 à 65%, Système : 55 à 60 % | 88 à 1050°C |
Les piles à combustible que l’on utilise dans le bâtiment sont de type PEMFC. Les trois derniers types PAFC, MCFC, SOFC sont principalement employés aujourd’hui en production d’électricité pour le réseau ou en secours électrique en industrie.
Voilà, nous savons maintenant comment fonctionne une pile à combustible. Maintenant, qui en fabrique et en commercialise réellement ? C’est l’objet de notre troisième article.
Et le combustible (hydrogène, dihydrogène...) on le produit comment?
Non, pas de lien de parenté entre le Poggi de Corse et moi. En revanche, j'utiliserai cette expérimentation dans l'article sur le rôle de l'hydrogène dans le stockage d'énergie.
Pascal parent avec Philippe Poggi qui dirige la Plate-Forme MYRTE en Corse ? Cette plate-forme possède du PV (600kWc), un électrolyseur (50 Nm3/h) et une pile à combustible de 50 kW (21 M€). Merci pour ces deux articles que j'ai lu avec plaisir. Cordialement, André
Al1, c'est bien ça : la différence de potentiel atteint une tension de 0.7 à 1 Volt par composant de base. La pile à combustible BlueGen de SOLIDpower combine 204 composants de base. Ils sont associés par 4 sur une plaque. 51 de ces plaques sont empilées pour atteindre une puissance électrique de 2.5 kW et une puissance thermique de 2 kW. Vous trouverez une description plus complète de cette machine dans le quatrième article.
Merci M. POGGI pour cette rectification mais, je suppose qu'en disant "Le courant généré par une seule pile atteint une tension de 0.7 à 1 Volt." que vous vouliez dire : La différence de potentiel générée par une seule pile atteint une tension de 0,7 à 1 Volt.
C'est indéniablement la troisième révolution industrielle.
Il semble bien que je confonde souvent intensité et tension. Le courant généré par une seule pile atteint une tension de 0.7 à 1 Volt. Ces piles de base sont empilées (stacked) jusqu'à atteindre une tension et une puissance thermique exploitables. Tout cela devrait devenir plus clair lors de la présentation plus détaillée du foinctionnement des piles à combustibles Vaillant (SOFC) et Viessmann (PEMFC).
Merci beaucoup Monsieur POGGI pour cet article super intéressant dans un domaine très prometteur, peu vulgarisé et en plein essor de recherche et développement. Il doit y avoir une coquille dans la phrase "C'est ce qui produit un courant électrique d'une intensité de 0,7 à 1 volt ..." Il doit falloir lire Ampère et non Volt. Je suppose qu'il doit également y avoir possibilité de faire des montages de piles en série et // pour obtenir des DDP standards autour de 12 ou 24 volts. Sauriez-vous nous en entretenir ?
Je pense que l'auteur parle d'une intensité de 0,7 à 1A et non de volts. Il serait interressant de savoir aussi qu'elle est la tension (en Volt) aux bornes d'une plaque, donc finalement la puissance fournie par un element
Merci, c'est bien d'avoir un explicatif suffisamment vulgarisé pour appréhender mieux les informations que nous pouvons recevoir, disparates et lacunaires lors des salons, des découvertes et annonces. C'est un sujet passionnant capable de mobiliser bien des énergies, voire des savoir-faire dans nos métiers respectifs.
J'ai commis une erreur dans ce second article, elle sera rectifiée dans le troisième et le quatrième : dans le bâtiment, on trouve non-seulement des piles PEMFC, mais aussi des piles SOFC.
Merci à Pascal Poggi pour cet article. J'ai hate d'avoir la suite de cette technologie prometteuse, écologique et inépuisable.
argent
Un article à venir sera consacré à la production, mais aussi l'exploitation de l'hydrogène H2 en tant que ressource naturelle.