En 2018, le GWP global des fluides (Global Warming Power) baissera de plus de 40% par rapport au contingent autorisé en 2015. Un défi difficile à relever... et qui n'est pas gagné.

Le règlement F-Gaz prévoit une très grosse marche dans la réduction de la contribution à l’effet de serre des fluides (GWP, global Warming Power) en 2018. Le symposium d’EPEE (le partenariat européen pour l’énergie et l’environnement, une association de fabricants de matériel de Génie Climatique Européens), qui s’est tenu lundi 10 Octobre à Nuremberg en prélude au salon Chillventa 2016, a très largement porté sur la manière dont l’ensemble de la profession du froid et de la climatisation peut y parvenir.

 

La première chose à faire, selon EPEE, c’est réduire les fuites de réfrigérant dans les systèmes de froid commercial et industriels. Leurs enquêtes à travers l’Europe montrent un taux de fuite de 20% environ aujourd’hui. Il faut descendre ce taux à 10% ou en dessous d’ici 2018. C’est-à-dire en un an à peine.

 

Ensuite, il faut cesser dès maintenant d’installer des systèmes neufs faisant appel à des fluides à fort GWP. Il est tout à fait incompréhensible, selon EPEE, que l’on déploie encore des systèmes neufs faisant appel au R-404A (GWP = 3900 sur 100 ans) comme réfrigérant. De plus, le R-404A ne pourra plus être utilisé en équipements neufs en 2020.

 

Recycler le R404A et adopter le R32

 

On ne pourra plus mettre sur le marché de nouveau R-404A. Mais on aura toujours le droit d’utiliser du R-404A recyclé pour la maintenance des équipements existants. La troisième mesure recommandée par EPEE est donc d’accélérer la récupération, le recyclage et la commercialisation de fluides recyclés.

 

Ce sera difficile dans la mesure où, pour l’instant, malgré l’entrée en vigueur du règlement F-Gaz, le prix des fluides classiques n’a pas augmenté. Rien, hormis la prochaine marche 2018 du règlement F-Gaz, n’incite aujourd’hui les acteurs du marché à se lancer dans le recyclage, plus coûteux. EPEE craint que rien ne change avant 2018. Il faudra alors du temps pour développer les filières de recyclage et peut conduire à des pénuries de R404A.

 

Donc, proclame EPEE haut et fort : « Il faut que le monde du froid et de la climatisation passe immédiatement  aux nouveaux fluides ». Il s’agit du R32, connu de longue date, des HFO et des fluides naturels.

 

Les « nouveaux » fluides sont inflammables

 

Or, ces fluides sont soit inflammables (R32, propane, HFO), soit toxiques (Ammoniaque), soit fonctionnent avec des pressions très élevées comme le CO2. Ce qui rend la profession des installateurs de froid et de climatisation relativement circonspecte, lui impose un très important effort de formation et de ré-équipement. De plus, l’emploi de ces fluides n’est pour l’instant pas permis dans les bâtiments recevant du public, ni en France, ni en Europe, ni même aux Etats-Unis.

 

Pour assurer le développement de ces nouveaux fluides, la révision de la norme européenne EN378 a été entreprise. Dans sa nouvelle mouture, approuvée au cours de l’été 2016 par les différents pays membres de l’Union Européenne, elle introduit une nouvelle catégorie de fluides : la catégorie A2L.

 

Nous aurons donc désormais, quand cette norme paraîtra, ce qui devrait intervenir avant la fin de l’année 2016, 4 catégories de fluides en ce qui concerne leur inflammabilité : A1 (ne brûle pas), la toute nouvelle A2L pour les fluides « légèrement inflammables », A2 pour des fluides qui brûlent un peu plus facilement et A3 pour ceux qui brûlent et explosent franchement comme le propane ou les Isobutanes.

 

Un long processus de révision des normes

 

Une fois la norme EN378 publiée, il faudra encore adapter les normes bâtiment qui portent plutôt sur la sécurité incendie, afin qu’elles acceptent les fluides de catégorie A2L dans les bâtiments recevant du public. Ces textes sont différents dans chaque pays membre de l’Union Européenne.

 

EPEE, les fabricants de fluide et les constructeurs de matériels et de froid estiment qu’il faudra deux ans pour cette adaptation. Ils pêchent très probablement par excès d’optimisme. L’américain Steven Yurek, président de AHRI (Air conditioning Heating and Refrigeration Institute) envisageait plutôt une dizaine d’années.

 

Il rappelait, en passant lors du séminaire EPEE, que le R32, classé A2L, n’est pas encore permis aux Etats-Unis, sauf pour les climatiseurs « Window » monoblocs encastrés en façade des bâtiments.

 

Il va falloir choisir

 

Asercom, l’association européenne des fabricants de compresseur, rappelait quant à elle que les chimistes ont proposé depuis 4 ans 68 nouveaux fluides purs ou sous forme de mélanges. Asercom souligne qu’il est tout à fait impossible que les constructeurs de compresseurs testent leurs machines, dans différentes configurations et emplois, avec tous ces fluides.

 

L’association invite donc sagement à réduire l’offre à une petite vingtaine de fluides pérennes. Ce qui permettrait aux fabricants de mener tous les tests nécessaires. Car, insiste Asercom, le client final achète son compresseur ou un équipement contenant un compresseur, pour qu’il fonctionne une quinzaine d’années.

 

Il faut donc que les chimistes développent des solutions que l’on pourra encore entretenir et réparer dans dix ans et plus. Ce n’est pas gagné.

Source : batirama.com / Pascal Poggi