La mer sous vos pieds… ou presque avec des éco-pavés drainants à base de coquillage. Lancé en 2011, le projet Vecop consiste à développer un nouveau matériau pour les travaux publics, des éco-pavés drainants, en valorisant des coproduits coquilliers issus des pétoncles, Saint-Jacques et autres crépidules*…
« Nous avons été contactés par la Région car les industriels ne savaient pas quoi faire de ces coquilles décortiquées », explique Mohamed Boutouil, directeur de la Recherche à l’ESITC Caen.
Destiné à des zones à faible trafic ou à moindre contrainte, cet éco-pavé est né de la volonté des chercheurs à développer un produit innovant à base de béton formulé avec des coquilliers marins. « Lorsque nous avons commencé à réfléchir à un produit, les bétons drainants n’étaient pas connus » précise M. Boutouil.
« En plus de la recyclabilité et de l’économie des ressources, nous avons ajouté une fonctionnalité drainante permettant de répondre aux besoins d’aménagement urbain en évitant l’imperméabilisation des sols », poursui-il. Et pour l’industrie de la construction, la valorisation de ces déchets localement permet de préserver les ressources en évitant l’extraction de granulats.
La formulation d’un béton à base de coproduits coquilliers devait résoudre deux contraintes : la forme de la coquille, plutôt plate, et la présence de matières organiques et de chlorures (interdisant donc l’utilisation de ce béton avec des armatures).
Des recherches, notamment sur l’enrobage des granulats plats ayant fait l’objet d’une thèse à l’ESITC Caen et sur l’optimisation du milieu granulaire, ont conduit à la formulation d’une palette de bétons avec différents granulats.
Un béton coulé en place a également été breveté, mis en œuvre par compactage léger (pour ne pas boucher les pores) au rouleau. « Dans notre brevet, nous pouvons remplacer jusqu’à 90 % des granulats classiques par des produits coquilliers mais généralement nous utilisons un taux de substitution entre 40 et 60 % pour avoir une résistance optimale», reprend Mohamed Boutouil.
Ce dernier souligne par ailleurs qu’un béton drainant est toujours un compromis entre résistance et capacité de drainage. Les éco-pavés atteignent une résistance de 15 MPa avec une perméabilité de 2 mm/s. « Nous pouvons aller plus loin avec une perméabilité de 5 mm/s mais là encore nous perdons en résistance. »
Ce projet de contribuer efficacement à la reconstitution du cycle naturel de l’eau en favorisant son infiltration in situ se poursuit par une thèse d’hydrologie urbaine. Les premiers éco-pavés drainants ont été utilisés pour réaliser une partie du parking des nouveaux locaux de l’ESITC Caen et vont faire l’objet d’une expérimentation grandeur nature.
Ces 170 m2 de parking ont été instrumentés grâce à des capteurs de débit et de qualité de l’eau pour valider notamment les granulométries de sous-couches drainantes en usage normal.
« Il n’existe actuellement aucun guide opérationnel d’exécution des structures drainantes et des sous-couches », rappelle Mohamed Boutouil. Dans cet objectif, deux sous-couches ont été mises en œuvre : une de sable et une de gravier.
Et quatre places de parking étanches ont été réalisées permettant de mesurer le différentiel entre les calculs et la quantité réellement récupérée. Ce test en grandeur réelle enrichira la réflexion sur l’utilisation de ces produits et leur place en milieu urbain.
* berlingot de mer