Le rupteur de pont thermique a fait ses preuves. Moyen de renforcer les caractéristiques thermiques de la structure, et donc de l’enveloppe, les rupteurs de ponts thermiques sont utilisés lorsque les bâtiments sont isolés par l’intérieur. Ces techniques, qui permettent de s’affranchir d’une partie des ponts thermiques linéiques de la construction, sont aujourd’hui bien maîtrisées et incontournables.
« Les ponts thermiques sont sources de déperdition, il faut donc les traiter », insiste Olivier Huraux, chef de marché national constructeurs-promoteurs, planchers et BET chez Knauf. « Et ce, d’autant que ces problématiques peuvent en engendrer d’autres, d’humidité et de condensation», précise Thierry Rieser, gérant du bureau d’étude Enertech.
Dans les bâtiments très isolés, les ponts thermiques deviennent les seuls points froids. Ils concentrent tous les risques de condensation, et les pathologies potentielles qui y sont associées.
Ces systèmes sont désormais bien rodés mais exigent toutefois une bonne connaissance technique : « Les procédés ont évolué de manière intéressante, mais il n’y a pas de solution toute faite, particulièrement dans le cas des balcons, indique Thierry Rieser.
Cela demande un travail d’équipe entre les bureaux d’étude thermique et structure. Il s’agit de trouver le bon compromis entre architecture et structure, de façon à optimiser l’aspect technico-économique ».
Dans ce domaine, l’actualité porte sur le renouvellement des avis techniques des fabricants : « Il y a eu une sensibilisation des fabricants de planchers avec un groupe de travail au CSTB afin de mieux définir des règles communes. Et avec le renouvellement des avis techniques, les fabricants intègrent les dispositions mécaniques de l’Eurocode 8, notamment pour tout ce qui concerne le ferraillage, explique Olivier Huraux.
Pour Thierry Rieser, cet aspect est très important : « Le comportement mécanique des rupteurs et leur efficacité au plan thermique dépendent du ferraillage. C’est pourquoi il est essentiel d’optimiser les solutions pour trouver le bon compromis entre efficacité thermique et tenue mécanique ».
Autre point important que soulève Olivier Huraux et qui, selon lui, est encore insuffisamment pris en compte : le comportement au feu desdits rupteurs. « Il y a une méconnaissance de cette réglementation. C’est en train d’évoluer, notamment avec le développement des toitures terrasses. »
Dans tous les cas, assurer la performance thermique des éléments de liaison du bâtiment implique de gérer la conformité de toutes les réglementations (sécurité incendie, acoustique, accessibilité handicapés, sismique…), ce qui peut parfois s’avérer complexe.
Par exemple pour l’acoustique, il augmente parfois la transmission des bruits aériens entre logements. Un paramètre à intégrer dans le dimensionnement du doublage intérieur, qui devra prendre en compte cette donnée. Des interactions qui doivent être prises en compte lors de la conception du bâtiment.
Pour s’affranchir de la mise en place de rupteurs de ponts thermiques, les industriels de la brique ont développé des systèmes constructifs complets avec planelle isolante. Ces dernières, dotées d’un isolant face intérieure, sont mises en œuvre au droit de la dalle et dans la continuité de la maçonnerie.
Une solution simple et économique, qui traite le plus gros pont thermique et qui est aussi utilisée comme élément coffrant. Il s’agit là d’une réponse à la RT 2012 avec un système ITI.
Depuis l’entrée en application de la RT 2012, le ratio de transmission thermique linéique moyen global (Ratio Ψ) des ponts thermiques du bâtiment ne doit pas excéder 0,28 W/(m²SHONrt.K) et le coefficient de transmission thermique linéique moyen des liaisons entre planchers intermédiaires et murs extérieurs ou local non chauffé ne doit pas dépasser 0,6 W/(m.K). A savoir, le pont thermique sans traitement est de 1,60 W/(m.K).
Qu’est-ce qu’un rupteur de ponts thermiques ?
Un rupteur de pont thermique est un élément isolant qui rétablit la continuité de l’isolation lorsque celle-ci est interrompue pour une raison ou pour une autre. Il se distingue par la composition de son corps isolant (laine minérale, PSE, verre cellulaire, mousse polyuréthanne...), et varie dans sa forme selon la liaison à traiter (dalle/façade, dalle/balcon, dalle/refend...) et le type de structure.
Dans certains cas, les rupteurs sont aussi éléments structurels. Ils permettent alors de réaliser une liaison continue entre les éléments – par exemple, mur et plancher ou balcon et plancher. Dans ce cas, ils sont composés d’une bande isolante et d’armatures à effort tranchant, d’armatures en traction et en élément de compression. |
Rupteur et réglementation sismique et incendie
Placés entre les éléments de gros œuvre, les rupteurs de ponts thermiques ont un impact sur la structure, la stabilité des planchers, les modes de rupture ou la capacité de ladite structure à dissiper l’énergie transmise par le séisme. Leur insertion est donc à prendre en compte dans le calcul en zone sismique. Attention, tous ne sont pas admissibles.
Le domaine d’emploi ainsi que les prescriptions associées sont spécifiés dans les avis techniques. Côté feu, le rupteur peut avoir un impact sur la propagation entre locaux et sur la stabilité des éléments de structure. Ils doivent donc satisfaire à certaines contraintes de tenue au feu. Là encore, les informations figurent dans les avis techniques. |
Quid de l’accessibilité ?
L’impact sur la réglementation accessibilité concerne les accès aux balcons et loggias (seuil de 200 mm maximum). Dans ce cas, les dispositions constructives décrites dans les avis techniques doivent permettre de respecter cette exigence. A laquelle il convient d’ajouter la problématique d’étanchéité à l’eau qui va avec. |
Placés en périphérie des planchers intermédiaires (vide sanitaire, étages et combles), ils diminuent considérablement les ponts thermiques linéiques des liaisons murs-planchers.
Ils sont la plupart du temps associés à un système complet de plancher poutrelles. Qu’il s’agisse de rupteurs de refend transversaux ou longitudinaux, ils assurent la connexion avec les entrevous du plancher. Ils sont connectés l’un à l’autre (emboîtement) ou simplement juxtaposés.
Les rupteurs longitudinaux sont placés perpendiculairement aux poutrelles. Ils existent aussi des rupteurs de rehausse utilisés soit sur toute la hauteur de la dalle de compression, soit partiellement. Des éléments complémentaires peuvent aussi être disposés au-dessus des rupteurs.
Côté mise en œuvre il est nécessaire d’avoir une bonne connaissance des modes de pose. Lesquels figurent dans les avis techniques des fabricants et la documentation technique des systèmes planchers auxquels ils sont associés.
© Knauf
Dans ce cas, l’isolation par l’extérieur est la solution la plus simple et la plus efficace pour couper les ponts thermiques des planchers intermédiaires.
Néanmoins, les habitudes constructives étant ce qu’elles sont (structure béton et isolation par l’intérieur), s’est développée une offre dédiée pour les bâtiments collectifs et tertiaires à étages. Il s’agit en général de rupteurs en polystyrène moulé ou laine minérale rigide, mis en place en périphérie du plancher.
Ces derniers s'intercalent entre la poutrelle et la maçonnerie, en rive et en about, avant le coulage du béton. Dans tous les cas, une attention particulière doit être apportée lors du coulage de la dalle de compression, afin que les éléments ne soient pas déplacés.
Certains préfabricateurs proposent des prédalles en béton armé équipées de boîtes en polymère rigide incorporées le long des rives de la dalle. Une fois les dalles en place des blocs isolants en laine minérale compressée sont insérés dans les boîtes avant le coulage de la dalle de compression.
© Rector
Un balcon en béton génère naturellement un pont thermique majeur qu’il faut traiter.
Ici, le rupteur permet de réduire le pont thermique entreψ = 0,25 et 0,50 W/m.K environ en fonction des densités deferraillage, et donc de la portée du balcon. Les rupteurs sont mis en place dans la maçonnerie pour assurer la continuité de l’isolation en about de dalle et balcon, tout en reprenant les sollicitations de la structure.
Adaptés à l’ITI comme à l’ITE, ils ne règlent pas la totalité du pont thermique. Plus la portée est importante, plus le ferraillage est important et moins le rupteur est efficace. Une autre technique consiste à couper partiellement la dalle avec une réservation remplie d’isolant entre le mur et le balcon.
Le balcon reste porté par des accroches ponctuelles qui sont cependant autant de ponts thermiques. Dans le cas des balcons, la solution la plus efficace est la désolidarisation totale avec une structure porteuse. Elle est aussi la plus onéreuse.
© Schöck