Les architectes ont besoin d’aide pratique à la prescription bois

Les architectes ont besoin d’aide pratique à la prescription bois

L’idée selon laquelle les étudiants des écoles françaises d’architecture sont sous-formés en matière de bois est à relativiser. ici, l’atelier bois de l’ENSA de Paris-Belleville reste un exemple à suivre.




Compte tenu du choc climatique, le bois s'imposera de plus en plus en superstructure dans les ouvrages. Mais les architectes sont-ils prêts ? Plus de mille architectes sortent chaque année de la bonne vingtaine des écoles d’architecture françaises. C’est un chiffre imposant au regard des promotions de charpentiers des Compagnons du Devoir (quelques dizaines), des ingénieurs bois de l’ENSTIB et de l’Ecole Supérieur du Bois (ESB), des CAP de charpente.

 

Malgré le travail pionnier de l’architecte et enseignant Roland Schweitzer, décédé l’an dernier, ou de Jean-Claude Bignon à l’ENSA de Nancy, et de quelques autres, il était notoire que l’enseignement français de l’architecture portait la marque du matériau dominant de la seconde moitié du 20e siècle, à savoir le béton.

 

 

L’atelier lumineux de l’Ecole Nationale d’architecte de Paris-Belleville, une arme de choc pour rapprocher les étudiants d’architecture et le bois.©JT

 

Les semailles du CNDB

 

Le CNDB a assez sensiblement changé la donne au fil des numéros de sa revue spécialisée Séquences Bois, depuis plus de vingt ans, mais aussi des cursus de formation gratuits proposés aux enseignants des ENSA et aux architectes en exercice. 

 

On récolte aujourd’hui ce qui a été semé, estime Marion Cloarec, architecte et longtemps directrice de la Formation au CNDB. Seulement voilà, il y a environ cinq ans, le financement du CNDB a été remis en question et les prestations de formation du CNDB sont devenues payantes : « Malgré une prise en charge partielle dans le cadre de la formation continue, les stages revenaient soudain à plus de mille euros net pour les architectes en formation continue ». Avec l’effet rapide d’une chute des inscriptions.

 

L'enseignement de la construction bois bien ancré

 

Aujourd’hui, l’enseignement de la construction bois s’est pourtant ancré dans les cursus des écoles d’architecture, notamment par l’intermédiaire des architectes enseignants qui sont des connaisseurs et praticiens de la construction bois comme Florence Lipsky, Pascal Gontier, Marie Schweitzer...

 

A l’Ecole Spéciale d’Architecture de Paris, La Fabrique Collective autour de Fabienne Bulle s’est chargée cette année de la longue genèse des Totems du Forum International Bois Construction. De même, sous l’impulsion de l’architecte Angélique Chedemois, les étudiants en fin de cursus de l’ENSA de Clermont-Ferrand ont participé au Forum à un workshop sur les écoquartiers en bois de demain, comme une sorte de tremplin préparatoire au concours international d’urbanisme Europan qui a été lancé avec succès depuis de décennies à l’initiative d’un enseignant de cette école.

 

Pour ce qui concerne l’enseignement de la construction et de l’architecture bois, il n’existe pas de formule-type. L’ENSA de Nancy, plus spécialement axée sur l’architecture bois, associé à l’ENSTIB pour un master mixte et disposant d’une chaire spécifique, fera par exemple une autre place à ce matériau que, par exemple, l’ENSA de Nantes.

 

Mais justement, Nantes semble particulièrement performant en matière d’enseignement du bois, si l’on en croit Ludovik Bost, qui est lui-même enseignant de longue date à l’ENSA de Paris-Belleville. Qu’il s’agisse de maquettes ou de projets à l’échelle, le matériau de construction bois présente l’atout indéniable de permettre aux futurs architectes de le façonner directement.

 

 

Ludovik Bost dans son bureau de l’Ecole Nationale d’architecte de Paris-Belleville.©JT

 

Le cas Ludovik Bost

 

Le responsable pédagogique de l’atelier bois de l’ENSA de Paris-Belleville est l’exemple même d’une victime de cet effet du toucher du bois. Il passe un Brevet de Technicien « Exécution de travaux » où il apprend à fabriquer des coffrages.

 

Le bois le hante durant sa formation aux Beaux-arts, et a fortiori quand il embringue sur des études d’architecture à Paris-Belleville : « Alors qu’on avait l’habitude de désigner un mur par deux traits, j’essayais d’y voir autre chose ».

 

Dans la foulée, il suit la formation complémentaire proposée à l’époque par l’ENSTIB dans le cadre d’un DESS, et qui est aujourd’hui le master ABC : « Déjà, la formation associait des élèves ingénieurs et de jeunes architectes, ce qui était passionnant ». Le jeune architecte-ingénieur est embauché un temps par le fabricant finlandais de maisons en bois, Honka, mais il trouvera sa vocation dans l’enseignement.

 

 

Maquette à l’échelle réalisée par les étudiants du cursus RSA risques majeurs dirigé par Cyrille Hanappe, avec Ludovik Bost.©JT

 

Nous sommes alors à la fin des années 90, la période de gloire du CNDB, qui dispose de 15 responsables régionaux et emploie une cinquantaine de personnes. Il s’agit de développer un cursus de formation continue et de formation des enseignants en architecture. Ludovik Bost s’inspire de ce qu’il a appris et le CNDB développe avec lui un programme qui part des connaissances de base en matière de bois jusqu’à la pathologie et à la rédaction des pièces écrites.

 

Ces fiches sont largement diffusées et réutilisées, mais comportent un certain nombre d’erreurs que Ludovik Bost a la charge de corriger lorsqu’arrive la période de restriction budgétaire du CNDB, qui conduira à l’écroulement rapide de son système de formation.

 

Pour autant, Ludovik Bost reprend l’enseignement de la construction bois à l’ENSA de Paris-Belleville. Les cours, systématiques, s’étendent sur un semestre complet et débouchent sur la réalisation d’une maquette à l’échelle.

 

« Depuis dix ans, indique-t-il, nous avons rattrapé le retard qui existait en matière d’enseignement de la construction et de l’architecture bois. L’atelier est bien équipé, y compris sur le plan humain, avec des spécialistes motivés comme l’artiste Martin Monchicourt responsable de l'atelier "grosses machines", et Hervé Roux, responsable de l'atelier maquettes, qui organise actuellement le réseau des ateliers des ENSA».

 

Extension du domaine de la lutte

 

Ludovik Bost estime que le développement de l’architecture bois est aujourd’hui moins une question de formation initiale que d’organisation de la filière : « Les jeunes architectes reviennent nous voir et nous disent qu’ils ne pensaient pas que prescrire du bois est aussi compliqué en pratique.

 

Les disparités entre les habitudes de construction régionales n’ont pas disparu. Par exemple, le CNDB a échoué à standardiser les chevrons, et France Douglas peine à standardiser l’offre en sciages. Les sections courantes utilisées ne sont pas les mêmes à Marseille et à Rouen.

 

Certaines régions privilégient certaines essences, comme le hêtre dans les Vosges, le peuplier à Lille, le pin maritime dans les Landes. C’est un peu normal, mais il faudrait redoubler d’efforts pour clarifier et simplifier la tâche d’agences qui sont souvent installées à Paris et mènent de front plusieurs chantiers dans différentes régions ».

 

En d’autres, termes, les besoin de formation des architectes ont évolué, il ne s’agit plus tant de formation de base que d’aide pratique à la prescription, dans le dédale de réglementations parfois contradictoires et d’usages vernaculaires.

 


Source : batirama.com / Jonas Tophoven

 

1 Commentaire
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  • par Madame BOIS
  • 05/06/2019 13:38:26

N'ayant pu terminer mon commentaire, je vous recommande d'aller au Congrès de l'UNTEC à AVIGNON, les 20 et 21 juin où des Economistes pourront vous parler du travail fait par la "Commission BOIS" UNTEC.

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