Légende : Le commerce du bois, en France, c’est par exemple l’importation de sciages bruts de résineux, qui représente bon an mal an 2 millions de m3.©LCB
Après une année de croissance pour les négoces et pour les industries de seconde transformation du bois que sont notamment les raboteries, le commerce du bois fait face au choc de l’épidémie.
Arnaud Hétroit a pris la succession d’Eric Boilley, qui a bâti et longuement piloté l’association Le Commerce du Bois, à l’été 2018. LCB est sans doute l’organisme représentatif de la filière bois française qui est le plus ouvert sur l’international.
C’est aussi une association dont le périmètre est complexe, puisqu’il regroupe aux côtés des membres historiques que sont les importateurs, les négociants, les agents ou encore les raboteurs industriels, de nombreux partenaires, qu’ils soient scieurs, fabricants de panneaux, industriels du traitement ou encore partenaires maritimes et ferroviaires.
Toutes ces activités étaient plutôt bien orientées en 2019 et même début 2020, comme il le précise : « L’activité des négoces spécialisés bois a connu une nouvelle année de progression avec, pour certaines enseignes, des hausses de 5 à 6 % donc bien au-delà des 3 % de la moyenne des matériaux de construction.
Ces bons résultats s’expliquent par le regain d’intérêt pour le matériau bois mais aussi par la capacité des négociants spécialisés à accompagner cette demande, en travaillant sur leur offre produits mais aussi les services associés : conseil personnalisé, disponibilité des commandes, livraisons...
Le rabotage, qui connaissait une certaine stabilité au cours des dernières années, a réussi à tirer son épingle du jeu grâce notamment à un marché de la terrasse particulièrement dynamique. Les résultats pour le marché du bardage furent également meilleurs que prévus avec, après des années difficiles, des marges enfin retrouvées.
Les importations de sciages résineux bruts ont été en légère hausse (1%) à un peu plus de 2 millions de m3, avec un repli de l’Europe du Nord (7 %), compensé par une hausse l’Europe de l’Est (3 %) et de l’Europe de l’Ouest (4 %) " ajoute le directeur de LCB.
Arnaud Hétroit, directeur de LCB© LCB
Le passage de relais entre Eric Boilley et Arnaud Hétroit s’est accompagné depuis par une réflexion sur les outils de l’association, notamment de communication, ainsi que sur les attentes de ses membres.
"Il est apparu que nos adhérents demandent tous avec force une promotion du bois au sens large et un accompagnement dans leur démarche d’achats responsables. Par ailleurs, ils demandent également un suivi des marchés élargi à d’autres familles de produits. Nous diffusions déjà des informations statistiques, pour lesquelles nous nous efforçons de lisser les incohérences, dans les domaines des sciages résineux bruts, des panneaux et des bois tropicaux.
Pour renforcer notre offre, nous venons de recruter Alessandra Negri en qualité de Responsable Marchés et prospectives. En matière de R&D cette fois, nous travaillons avec le FCBA sur l’élaboration de deux FDES pour les bardages bois, avec ou sans traitement, ainsi que sur des tests de réaction au feu qui nous permettrons de répondre aux nouvelles exigences réglementaires introduites l’été dernier en matière de sécurité incendie » souligne le responsable.
Les raboteries ont fait face jusqu’ici à un contexte favorable.© LCB
« La crise nous a pris de court, notamment la semaine 12 avec l’arrêt quasi complet de l’activité. Dès la semaine 13, les négoces ont commencé à rouvrir pour les professionnels, en mode drive uniquement suivi la semaine suivante de la relance des livraisons", reprend Arnaud Hétroit,
"En fait, le négoce spécialisé bois est pour l’essentiel tributaire de l’activité du bâtiment et la réouverture des chantiers sera salutaire. En semaine 14, le taux d’activité des raboteries, très variable, est resté en-dessous de 15 %, avec un taux d’emploi inférieur à 25 %, selon les chiffres que nous avons fait remonter hebdomadairement au Comité Stratégique de filière.
Cette semaine, le taux d’activité de ces dernières est passé à un peu plus de 20 % avec un taux d’emploi identique. Le chiffres d’affaires des négociants spécialisés bois reste aujourd’hui encore très bas, puisque de l’ordre de 35 % de ceux habituels.
Il y a des produits qui tournent mieux : au sein par exemple des panneaux, les contreplaqués sont moins impactés que les panneaux de process plus tributaires des aménagements intérieurs et à l’arrêt quasi-complet."
"En conséquence, les industriels redémarrent avec circonspection, et il est crucial de leur apporter des informations régulières et précises sur le niveau d’activité en aval, poursuit Arnaud Hétroit. Les importations sortent également petit à petit de leur sommeil, même s’il faut préciser que les ports français n’ont jamais fermé durant ces dernières semaines, le service a été assuré, mais ce sont les commandes qui se sont taries brutalement.
La logistique reste néanmoins impactée avec des hausses importantes des coûts de transport. Ainsi le transport par container a subi des hausses importantes de l’ordre par exemple, pour les liaisons entre l’Europe et la Chine, de 50 % en acheminement normal et 25 % en acheminement non prioritaire.
Concernant le transport par camion, l’offre est réduite d’environ 30 % et certaines régions comme l’Ile-de-France ou l’Est restent très difficiles à livrer. Les tarifs des transports par camion semblent néanmoins stables du fait sans doute de contrats annuels entre nos membres et leurs prestataires."
Le Port Atlantique La Rochelle occupe une place majeure dans les importations de produits forestiers (pâtes à papier, grumes, bois transformés)© LCB
" Nous avons relayé les guides de bonnes pratiques de la mutualité sociale agricole (MSA), de la métallurgie (UIMM), du négoce de matériaux de construction (FNBM), du bâtiment (OPPBTP) ou encore des industries du bois et de l’ameublement (CSF Bois), précise le directeur
Et nous travaillons avec toute la filière afin d’alimenter le Gouvernement dans ses réflexions sur la préparation de la sortie du confinement ainsi que sur les mesures transversales de relance de l’économie et de la compétitivité. Un travail est notamment en cours, au niveau du Comité Stratégique Filière Bois sur l’analyse des conditions de relance de l’activité et les enjeux de relocalisation.
Difficile de dire aujourd’hui de quoi il aura l’air, et de combien il sera pourvu. A mon avis, tout dépendra de la vitesse et du rythme de levée du confinement et de la reprise du Bâtiment où la situation n’est pas encore clarifiée avec des oppositions manifestes de certains maitres d’ouvrages, architectes ou encore syndicats de salariés.
Nous allons aussi avoir besoin de soutiens financiers pour assurer la santé financière des entreprises, avec l’appui des banques. Les mesures annoncées, notamment en matière de prêts de trésorerie garantis par Bpifrance, vont pour l’instant dans le bon sens. Une réflexion s’imposera également sans doute, lorsque cela sera possible, sur le développement de circuits d’approvisionnement plus courts ainsi que sur la valeur ajoutée produite en France".
"L’un des risques, c’est que le développement durable soit sacrifié sur le court terme en minimisant à tort le risque climatique autrement impactant, à moyen terme, que l’épidémie actuelle et ses conséquences.
Il faut une relance verte, poursuivre le reboisement et les efforts lourds pour décarboner la construction. En résumé, pour citer l’un de mes membres : dans le monde d’après, le bois issu de forêts gérées de façon responsable doit être LE matériau » termine Arnaud Hétroit.
Source : batirama.com / Jonas Tophoven