Quelles seront les missions des référents Covid-19 désignés par les maitres d’ouvrages, tels que recommandés par le guide de l’OPPBTP ? Et quel sera le profil type de ce référent ?
Le libellé très court* consacré à l’existence de ce nouvel intervenant sur les chantiers a obligé les préventeurs à faire preuve de réflexion. C’est ainsi le cas du groupe BTP Consultants (1), qui a très tôt imaginé les contours de ce nouveau type de missions « avec pour toile de fond, le management du risque » souligne son président, Patrick Vrignon.
Tout d’abord, ce référent Covid-19 désigné par la maîtrise d’ouvrage ne peut pas être un CSPS (Coordinateur santé prévention sécurité) du chantier, car ce dernier a déjà une mission encadrée par la loi, rappelle Patrick Vrignon. Par ailleurs, le référent devra avoir une formation de type hygiène sécurité environnement (HSE) avec une connaissance des chantiers, c’est-à-dire soit un DUT avec une expérience professionnelle soit un Master HSE.
Quel sera sa mission ? Il sera aux côtés du maître d’ouvrage pour vérifier que les mesures du guide de l’OPPBTP sont bien respectées in situ et de manière efficace. « Ce qui suppose un audit régulier avec des tableaux de bord pour éviter les déviances et réajuster les mesures selon les difficultés d’application sur le chantier » précise le président du groupe.
La démarche d’audit du référent Covid-19 consistera à repérer les écarts par rapport aux préconisations sanitaires du guide de l'OPPBTP et à dresser un bilan, à la manière d’une mission de management du risque.
Ce référent, jouera donc le rôle de « la mouche du coche » pour aiguiller les entreprises afin que les nouvelles règles s’inscrivent dans la durée. Et il devra livrer des éléments au maître d’ouvrage pour mettre en place des mesures correctives, si nécessaire.
« Il s’agit d’un acte de management très fort, insiste Patrick Vrignon, dans la mesure où les habitudes du Bâtiment s’appuient sur des règles du vivre ensemble qui sont très éloignées des recommandations du guide. Il y aura donc un profond changement culturel à mettre en oeuvre ».
Ce type de danger demeure invisible en effet et il est difficile d’en prendre conscience malgré les affichages des mesures à respecter sur les chantiers, insiste le président.
La démarche d’audit consistera ainsi à repérer les écarts par rapport aux préconisations sanitaires du guide et à dresser un bilan, à la manière d’une mission de management du risque, insiste Patrick Vrignon, dont le groupe va missionner 40 référents.
Il y aura un profond changement culturel à mettre en oeuvre dans le BTP où les habitudes s’appuient sur des règles du vivre ensemble, estime Patrick Vrignon, président de BTP Consultants.
Or, un tel système de management du risque n’a jamais existé dans le secteur. « Ces systèmes s’appliquent dans d’autres domaines tels que l’industrie pétrochimique, la sidérurgie, et il faudra à terme évoluer vers ce type d’organisation qui concerne les entreprises sous-traitantes. L’objectif est de garantir que les normes de sécurité sanitaires sont bien respectées par tous » reprend Patrick Vrignon.
En effet, si le guide donne des indications précieuses sur les règles à appliquer, l’expérience montre qu’elles ne suffiront pas, à elles seules, à garantir leur application, selon le président du groupe. Pourquoi ? Les acteurs concernés ont souvent le réflexe de mettre en place des stratégies de contournement face à de telles contraintes.
Exemple cité par le président de BTP Consultants : la gestion des déchets du Bâtiment, où l’expérience montre que les entreprises ne sont pas encore en phase. D’où la nécessité de mettre en place ce système de management qui n’est pas évoqué par le guide de l’OPPBTP.
La crise du Covid-19 va donc obliger la filière du BTP à repenser la façon dont elle travaille sur les chantiers, insiste le président, les responsables de chantier ayant bien autre chose à faire que de s’occuper du respect des consignes de sécurité sanitaire.
Tous les chantiers ne seront pas concernés : seuls ceux générant une coactivité avec la présence de plusieurs lors d’entreprises nécessiteront la présence d’un référent Covid-19 à raison de 2 jours par semaine à un temps complet, de l’avis de Patrick Vrignon.
La filière est assez fournie selon le président du groupe qui estime que la profession aura besoin de plusieurs centaines de référents Covid 19 assez rapidement. Il faut les former au chantier et créer ce vivier. Perdureront-ils dans le temps ? « On n’en sait rien, mais on en aura besoin au moins jusqu’à la fin de l’année, selon l’évolution de la pandémie. Tant que les vaccins ne sont pas mis au point, le danger persistera » répond -il.
Moins de coactivité sur les chantiers aura certes des impacts économiques sur les entreprises, qui de fait seront moins productives, admet le président du groupe. L’amélioration de la productivité ne pourra cependant pas se faire au détriment des règles sanitaires.
Autre piste à l’étude : les entreprises pourront se faire aider en utilisant les nouvelles technologies. « Nous réfléchissons à ce sujet, car il existe des méthodes de tracking sur la base des objets connectés qui peuvent équiper les vêtements des compagnons et ouvriers. Ces objets peuvent permettre de vérifier les règles de distanciation respectées ou non par les opérateurs sur le chantier en fin de journée ou de semaine par exemple.
« Ce sont des technologies que nous proposons aux maîtres d’ouvrages et nous espérons les faire appliquer prochainement pour avoir un suivi en réel. Le but étant d’avoir une vision objective des situations de travail » souligne Patrick Vrignon.
Certes, le coût lié aux nouvelles règles de sécurité peut faire peur à la filière, admet le président du groupe. Mais les acteurs du BTP doivent accepter les règles et s’intéresser à ces sujets afin de prendre en charge les nouveaux dispositifs. Faute de quoi, leur responsabilité peut être mise en jeu, sans compter les arrêts de chantiers, très coûteux, qui pourront être prononcés par les services de la Dirrecte…
*« Le maître d'ouvrage pourra désigner un référent Covid-19 chargé de coordonner les mesures à mettre en œuvre » indique le guide de l’OPPBTP.
Les tarifs d’un référent Covid-19 pourront s’échelonner entre 4000 € et 15.000 € par mois en fonction de la complexité du chantier et du temps passé par le référent (de 2 jours à un temps plein)
(1) BTP Consultants est un bureau de Contrôle Technique et de Coordination SPS présent à l'échelle nationale depuis plus de 20 ans. Il gère deux autres activités avec ses filiale Citae et MBACity. La première est spécialisée dans l’assistance à maitrise ouvrage axée sur le développement durable et le diagnostic immobilier. La seconde est spécialiste du BIM management et de la maquette numérique. Le groupe de 500 personnes réalise un chiffre d’affaires de 58 millions d’euros.
Source : batirama.com / Fabienne Leroy
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Belle initiative ! Tout est dit dans la conclusion «Certes, le coût lié aux nouvelles règles de sécurité Covid 19 peut faire peur à la filière, Mais les acteurs du BTP doivent accepter les règles et s’intéresser à ces sujets afin de prendre en charge les nouveaux dispositifs. Faute de quoi, leur responsabilité peut être mise en jeu, sans compter les arrêts de chantiers, très coûteux, qui pourront être prononcés à leur encontre»