La note de conjoncture présentée par Jean-Christophe Repon (en photo), le nouveau président de la Capeb (Confédération artisanale des petites entreprises du Bâtiment) est historique. Elle fait état d’une baisse inédite de l’activité de l’artisanat du Bâtiment, liée à la crise sanitaire et économique post Covid 19.
C’est d’abord le secteur de la construction neuve qui est le plus gravement touché avec une contraction de 22 % après 14 % au premier trimestre 2020. Sur les 12 derniers mois à fin mai 2020, 409 600 logements ont été autorisés à la construction, soit 39 600 de moins que dans les 12 mois précédents (-8,8 %). Dans le même temps, 368 800 logements ont été mis en chantier, soit 41 700 de moins (-10,2 %).
Dans l’Ancien, le recul est particulièrement marquant puisque l’activité chute de 25 % après une baisse de 10,5 % au 1er trimestre 2020. A ce sujet, notons que les travaux d’amélioration de performance énergétique du logement régressent de 27 % sur la même période (comme au trimestre de l’année précédente).
Parallèlement, la trésorerie des entreprises apparaît plus détériorée, avec un solde d’opinions à - 60 % (contre 11 % au 2e trimestre 2019). En juillet 2020, le montant moyen des besoins en trésoreries augmente avec 23 000 euros (contre 22 000 euros un an auparavant). A noter que de nombreuses entreprises ont fait des demandes de Prêts garantis par l’Etat, durant cette période, relève la Capeb
Enfin, ce recul est marqué pour les entreprises artisanales implantées en Ile De France (- 30 %), suivies de celles des Hauts de France. Les autres régions restent dans la moyenne nationale (- 24%) excepté pour les régions situées sur la façade atlantique (-21 %), Pays de Loire et Nouvelle Aquitaine (- 22 %) ; Grand Est (- 21 %), Bourgogne Franche Comté et Occitanie (- 22 %)
De nombreuses incertitudes obscurcissent les projections pour l’année en cours et le début d'année prochaine, relève la Capeb, dont les risques d’un reflux de la pandémie et le refus encore persistant à ce jour d’une partie de la clientèle privée d’accueillir les artisans.
Ce n’est pas tout, les craintes du chômage feront sans doute hésiter les particuliers à engager des travaux de rénovation. La Capeb relève également les difficultés à appliquer dans certains cas, le guide de l’OPPBTP, notamment en cas de coactivité sur les chantiers (pour 15 % des entreprises artisanales).
Selon la Capeb, Il est difficile d’anticiper l’état du carnet de commandes des entreprises sur le 4e trimestre aujourd'hui, car les Français attendent les éléments concrets du plan de relance. Par ailleurs, la période des vacances va sans doute retarder les prises de décision des ménages français en ce qui concerne leurs prévisions de travaux.
Résultat : l’organisation professionnelle estime qu’une contraction de 15 % de l’activité et des pertes d’emplois sont hautement probables, sur l’année 2020. Elle se base sur deux hypothèses, l’une optimiste (- 15 à - 17 %), et l’autre plus pessimiste (- 17 à - 20 %) qui dépendra du niveau de l’emploi des Français et donc du chômage à venir.
L’organisation professionnelle remarque que la dynamique de l’emploi dans le Bâtiment est cassée depuis la fin de l’année 2018. En effet, les intentions d’embauche avaient alors amorcé un recul à ce moment-là.
Cependant 96 % des artisans sondés déclarent vouloir maintenir l’emploi, les compétences des salariés étant la véritable richesse de l’entreprise, insiste le président de la Capeb, qui écarte l’option de la baisse des salaires. Les entreprises devront être prêtes à reprendre l'activité au moment du rebond, et cela, en dépit des prévisions pessimistes d'embauche des apprentis (baisse probable de 15 à 20 % des effectifs d'apprentis à la prochaine rentrée selon M. Repon)
Enfin, concernant l’année 2021, s’il est encore très difficile d’établir des estimations, la Capeb se base sur deux hypothèses : l’une avec une croissance de + 8 à + 12 % et l’autre située entre + 2 à 5 % (calculée à partir du recul du chiffre d'affaires de l’année passée).
En attendant, les représentants de la Capeb qui doivent bientôt rencontrer la nouvelle ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, estiment indispensable de relancer la rénovation énergétique… qui ne décolle pas. « Les dossiers sont longs à mettre en oeuvre et entre les CEE et MaprimeRenov, le particulier est incapable de savoir de quelle aide il peut bénéficier » explique Jean-Christophe Repon qui ajoute : « c’est une manne d’activité que l’on ne gère pas »
En outre, le système RGE (qui assure l’égilibilité des travaux aux dispositifs d’aides) reste compliqué pour les entreprises artisanales qui risquent de se détacher de ces dispositifs, selon le président de la Capeb. « Il faut accompagner les entreprises artisanales et mieux contrôler sur le terrain pour repérer les éco-délinquants » plaide-t-il.
Le président réclame donc une meilleure lisibilité et la simplification des procédures administratives à mettre en oeuvre, « faute de quoi l’artisan préfèrera effectuer une remise au particulier, plutôt que de se lancer dans un dossier compliqué de rénovation énergétique ».
Par ailleurs, M. Repon plaide également pour une TVA à taux réduite (5,5 %) pour les travaux de rénovation globale incluant la remise aux normes des installations de plomberie et d’électricité. « Il y a encore trop peu de travaux de rénovation globale, or, il faudrait les généraliser, via une obligation à terme, pour permettre de mener à bien les objectifs de rénovation énergétiques » conclut-il.
Photo©F. Leroy
Source : batirama.com/ Fabienne Leroy