Le soleil brille de tous ses feux, le vent souffle à décorner les boeufs: la production des éoliennes ou des fermes solaires connaît parfois des pics de production qui se moquent des besoins de consommation. Que faire de ce surplus d'énergie?
"Aujourd'hui, il est perdu: on demande alors d'arrêter une éolienne par exemple", explique Christian Poumarède, attaché de direction chez RTE. Pourtant, à des centaines de kilomètres de l'éolienne ou des panneaux photovoltaïques, une ville a des besoins. Mais, pour y acheminer l'électricité depuis les régions rurales où sont généralement installés les champs éoliens ou solaires, il faudrait augmenter la capacité des lignes à haute tension, dont le coût, déjà élevé, serait d'autant moins justifié que ces surplus de production n'interviennent que "200 à 300 heures par an", selon M. Poumarède.
La solution s'impose donc d'elle-même: il faut stocker le surplus "le temps qu'une capacité se libère dans la ligne", indique Mathieu Pafundi, chef de projet chez RTE. Bref, c'est un problème "de tuyaux", résume Christian Poumarède. "On crée comme un bassin de rétention (...) qui permet de ne pas engorger les tuyaux".
D'où "Ringo", un réseau de stockage sur batteries, d'un coût de 80 millions d'euros, sur trois sites: Fontenelle (Côte d'Or), Bellac (Haute-Vienne) et Ventavon (Hautes-Alpes).Les trois centres regroupent au total 16.800 batteries. Ce n'est pas le plus important réseau sur la planète, mais la "première mondiale" réside dans le fait qu'il est entièrement piloté par des robots, assure le président du directoire de RTE Xavier Piechaczyk, devant les conteneurs emplis de batteries de Fontenelle, près de Dijon, installés en plein champ, non loin d'éoliennes.
Appelé NAZA (Nouveaux automates de zones adaptatifs), le robot informatique déclenche automatiquement le stockage et le déstockage de l'électricité sur les batteries de tel ou tel site. Et ce, "en moins d'une seconde", relève Franck Girard, PDG de Nidec ASI, la société du groupe nippon Nidec qui a développé le site de Fontenelle.
Chaque centre de stockage a une puissance de 12 mégawatts, soit la production de 5 éoliennes ou la consommation d'une ville de 10.000 habitants pendant deux heures l'hiver. Nidec, qui se revendique "leader mondial" des batteries pour les énergies renouvelables, a notamment mis au point "le premier projet au monde à l'échelle du mégawatt/heure", en Corse, selon M. Girard.
La société développe actuellement des projets en Allemagne, en Angleterre, ou encore en Finlande.Ringo sera testé pendant trois ans, le temps nécessaire, selon le patron de RTE, d'apprendre comment gérer les énergies renouvelables. "L'Europe s'est engagée vers la neutralité carbone en 2050. Pour l'atteindre, il faudra produire plus d'électricité et il faudra pour cela qu'on pilote mieux en modulant la production et la consommation", a-t-il ajouté.