Sans transition, nous sommes passés du salon Interclima où les solutions thermodynamiques au R290 étaient bien visibles, au salon Chillventa à Nuremberg où les machines au propane se trouvent sur la plupart des stands qui exposent des pompes à chaleur ou des composants pour pompes à chaleur.
Chillventa, consacré au froid, à la climatisation, au chauffage et à la production d’ECS thermodynamique et à la ventilation se tient à Nuremberg du 11 au 13 octobre 2022. Nous restons jusqu’à la fin et, à l’issue de la première matinée, il est facile de prévoir que la moisson sera riche. ©PP
A Chillventa, encore plus qu’à Interclima, exposants et visiteurs ne pensent qu’aux fluides naturels. En ouverture du salon, Bitzer, le célèbre fabricant allemand de compresseurs, a expliqué au cours d’une conférence de presse que, si de nombreuses incertitudes pesaient encore sur le détail des règlementations européennes qui concernent le domaine des pompes à chaleur et de la thermodynamique – F-Gaz, ecoDesign et REACH -, la direction est claire : l’Europe progresse vers l’emploi quasi-exclusif de fluides naturels, soit l’eau (R718), l’air, le CO2 (R-744), le NH3 (R-717) et le propane (R290).
Toute résistance est futile, comme diraient les Borgs. Bitzer considère que le développement de ces fluides naturels présente pour l’entreprise une mine d’opportunités et qu’il faut adapter les technologies pour utiliser au mieux les fluides naturels. En plus, tous nos interlocuteurs de la matinée le rappellent, il faut former les installateurs et les entreprises de maintenance à l’emploi de ces nouveaux fluides qui présentent des caractéristiques - explosivité, très haute pression, toxicité – inhabituelles.
Mais tous ces fluides naturels offrent également d’excellentes performances thermodynamiques. Le Fraunhofer Institut for Solar Energy Systems ISE, l’un des nombreux centres de recherche qui constituent le Fraunhofer Institut, a d’ailleurs publié vendredi dernier les premiers résultats de son programme de recherche LC150 (Low Charge 150 g). Le programme – commencé fin 2020 et qui se terminera en mars 2023 – a mis au point un circuit frigorifique standardisé au propane, utilisable par les participants, permettant d’atteindre une puissance de 12,8 kW avec une charge de R290 de seulement 124 g, soit 9,7 g de propane/kW pour un COP de 4,7. C’est un résultat jamais atteint avec aucun autre fluide frigorifique.
Pour l’instant, les pompes à chaleur au R290 disponibles sur le marché européen utilisent environ 60 g de propane/kW. De nouveaux modèles mettant à profit les résultats du programme LC150 pourraient apparaître en 2024. Une charge inférieure ou égale à 150 g permet d’installer la pac à l’intérieur. Ce qui ouvre la voie à des pacs air/eau bibloc au propane, à des pacs monobloc gainables et à des pacs eau/eau.
Mené conjointement par le Fraunhofer Institut for Solar Energy Systems ISE et huit fabricants européens de pompes à chaleur – BDR Thermea, Bosch Thermotechnologie, Ferroli, Kermi, Regli Energy Systems, Stiebel Eltron, Vaillant Group et Viessmann, le projet de recherche LC150 a pour but d’optimiser la conception des pompes à chaleur au R290 (propane) pour obtenir la puissance la plus élevée possible et le meilleur rendement, avec une charge de fluide inférieure à 150 g. © Fraunhofer Institut for Solar Energy Systems ISE
Les fabricants de composants sont prêts pour le propane. GMCC & Weling, un industriel chinois, propose des compresseurs rotatifs au propane aussi bien pour la climatisation à détente directe (en vert) que pour les pompes à chaleur air/eau et eau/eau (en orange). ©PP
De même, les échangeurs aluminium à microcanaux qui, à puissance égale, réduisent la charge de fluide jusqu’à 30% par rapport à un échangeur à ailettes classique, sont désormais disponibles pour le propane et même pour le CO2. ©PP
A côté des fluides naturels, on voit aussi à Chillventa des fluides manufacturés, toujours avec un GWP (Global Warming Power ou PRP pour Potentiel de Réchauffement Planétaire, soit contribution à l’effet de serre) inférieur à 150. Climalife propose par exemple le R-455A (GWP = 146), le R-1234yf (<1), le R-1234ze (<1) et son nouveau R-471A (148).
Ces fluides répondent au besoin immédiat du remplacement des fluides comme le R-404A dans les installations frigorifiques et le R-134a qui, en raison de leurs GWP très élevés, ne peuvent même plus être utilisés en maintenance.
Produit par Honeywell et distribué par Climalife, le R-471A, aussi appelé par son nom commercial Solstice N71, est un HFO non-inflammable, dont le GWP est inférieur à 150, son ODP (Ozone Depletion Potential ou action sur la couche d’ozone) est nul. Climalife le recommande pour les nouvelles installations frigorifiques en super et hypermarchés, le froid industriel, les chambres froides et les besoins de froids des commerces de proximité. ©PP
Avec ces nouveaux fluides, des industriels conçoivent des pompes à chaleur de très grande puissance et très haute température. Bitzer, le fabricant de compresseurs, indiquait ce matin que la demande pour ses compresseurs au NH3 et au CO2 augmente rapidement, poussée par le développement des pompes à chaleur de forte puissance, adaptées, par exemple, à l’alimentation en chaleur des réseaux de chauffage urbain.
Skadec, fabricant allemand de pompes à chaleur au R290, propose des pacs air/eau de 35 à 620 kW (à partir du début 2023 pour le segment 465 - 620 kW). Ces pacs peuvent être complètement équipées avec des modules hydrauliques (échangeur, circulateurs, vannes de régulation, vases d’expansion, …) pour faciliter leur raccordement. Elles atteignent une température de départ d’eau de 70°C, sans appoint électrique. ©PP
De son côté, Sabroe, une marque du groupe Johnson Controls, propose la gamme de quatre pac eau/eau Sabroe HicaHP, équipées de compresseurs à vis, affichant des puissances de 4 à 25 MW et une température de départ d’eau de 95°C. Ces pacs utilisent le NH3 (R-717). Elles peuvent être installées en cascade et sont destinées à l’industrie et au chauffage urbain.
Notre prochain article portera sur les solutions de climatisation et les pompes à chaleur de plus petites puissances pour les marchés domestiques, collectifs et tertiaires.