Rewood expose au stand E10 du Forum International Bois Construction à Lille Grand Palais (12-14 avril) et présentera sa plateforme ce mercredi 12 avril après-midi lors de la tribune des Innovations.
Auparavant salariée dans le secteur de l’aménagement, Morgane Croquelois a créé Rewood en reconversion professionnelle. L’économie circulaire n’était pas encore très connue il y a quelques années, et pourtant, l’objectif de Rewood était de viser un projet avec un potentiel de croissance. La jeune entrepreneuse a cherché de l’aide : "on n’a jamais toutes les bonnes personnes en face de soi. Parfois je n'ai pas trouvé ce qu'il me fallait. Il m’est arrivé de refaire une formation et surtout, pendant trois ans, j’ai pu rencontrer des écosystèmes et des structures pour m'accompagner dans la création de mon entreprise."
Morgane Croquelois, entrepreneuse de l'économie circulaire.
L’entrepreneuse a utilisé abondamment, pendant trois ans, toutes les aides et conseils notamment lillois pour la création d’entreprise. De sorte qu’elle se sait au milieu du gué et comprend les obstacles qui s’élèvent encore sur sa route. Pour autant, une embauche est prévue en septembre, pour une action dans la sensibilisation et la communication, et les événements des trois dernières années jouent pleinement en sa faveur. Elle a commencé juste au bon moment, elle a été servie par la chance et sa marque Rewood, par sa clarté et sa simplicité, est en elle-même un bon capital.
Selon l’Ademe, environ 7 millions de tonnes de bois et dérivés deviennent des déchets chaque année en France. 20% sont enfouis, 20% exportés. On est en situation de sous-recyclage et Rewood veut contribuer au "surcyclage". Cela paraît presque évident aujourd’hui, mais comme Morgane Croquelois le rappelle, il y a quatre ans, on ne parlait pas encore beaucoup du Made-in-France, la crise Covid et la guerre en Ukraine n’avaient pas encore amené une situation de pénurie qui perdure ; ni de REP ou des implications carbone de la RE2020. Le réemploi, c’était une problématique de "bobo".
Morgane Croquelois : "J’avais envie d’entreprendre et une réflexion approfondie au cours d’un stage de design thinking, tout au début de l’aventure, m’a fait comprendre ma motivation pour l’éco-responsabilité. J’aime le côté start-up, agile, déployable au-delà de Lille. D’un autre côté l’aspect low-tech, économie circulaire, entraide. On a souvent essayé de me rediriger vers l’économie sociale et solidaire, mais pour moi, dans le terme économie circulaire, il y a surtout le mot économie, ce potentiel de développement économique, de création de richesse.
Le périmètre de Rewood dépasse largement le domaine du Bâtiment. Pour autant, le marché du curage [une opération consistant à nettoyer un bâtiment de tous ses éléments non constructifs, NDLR] est l’une de ses cibles naturelles. Rewood y débarque sur un marché où les acteurs se sont habitués à faire d’une certaine manière depuis de longues années, et sortent vite leurs préjugés contre l’éco-responsabilité. Que propose précisément Rewood ? De trouver des réutilisateurs pour les éléments de curage avant une démolition, et pas en attendant que tout se retrouve sali et abîmé dans la même benne au moment de la déconstruction proprement dite. D’ores et déjà, la loi impose 3 à 4% de réemploi par curage et selon Morgane Croquelois, c’est un bon début.
Il y a deux ans, Rewood avait commencé à placer des bennes sur les chantiers afin de récupérer le bois. Bien vite Morgane Croquelois a compris que ce n’est pas à elle d’imposer une conduite sur les chantiers, cela doit venir des grands groupes en charge des travaux. Désormais, la REP doit conduire à ce que ces bennes spécialisées soient installées gratuitement par les éco-organismes.
Les palettes font l'objet d'une remise à niveau mais servent aussi à d'autres fins.
L’habitude du marché réel laisse Morgane Croquelois un peu sceptique : "Il y a la réglementation, et il y a son application pratique sur les chantiers. Que faire, par exemple, quand il n’y a pas assez de place pour les bennes ?" En tout cas, la mise en place de la REP devrait augmenter la disponibilité de produits bois de réemploi. Rewood ne perd pas sa raison d’être face aux éco-organismes, c’est plutôt le contraire. Par ailleurs, son périmètre d’activité déborde de la REP Bâtiment. Ainsi, le principe de REP doit être étendu à l’ensemble des emballages au 1er janvier 2025.
La même sagesse prévaut quant au périmètre du marché du réemploi selon Rewood. Pour l’heure, il se concentre sur des produits d’aménagement et pas sur les charpentes : "Il est encore difficile de réemployer les vieilles charpentes, des process doivent se mettre en place et ce n’est pas à moi de le faire". Il faut développer de la R&D spécifique actuellement en cours par Alpes Contrôles et épaulé par le syndicat de réemploi ou le syndicat du réemploi de la construction.
Le business de Morgane Croquelois n’est pas non plus assimilable à celui des AMO économie circulaire qui établissent des diagnostics PEMD (inventaire de tous les matériaux, produits, équipements et déchets sortants d’un chantier dans le cadre de travaux prévus). Rewood va travailler en collaboration avec les AMO et MO afin d'enrichir les PEMD pour ce qui concerne le matériaux bois.
L’an dernier, Rewood a pu décrocher une subvention via HDFID (Hauts de France Innovation Développement) afin de développer un logiciel dont la forme MVP (Minimum Viable Product) sera présentée au Forum Bois Construction de Lille et mise en ligne à partir du 12 avril. De fait, après une courte intervention dans le cadre de l’atelier Réemploi organisé par Bellastock pour le Forum Bois Construction de Nancy en 2022, Rewood expose au Forum Bois Construction de Lille et présente, dans le cadre de la nouvelle Tribune des Innovations, ce nouveau logiciel de qualification pour le réemploi du bois. Il s’agit de caractériser le plus précisément possible la ressource, par exemple l’essence, les dimensions, le traitement chimique etc.
Le logiciel MVP doit évoluer vers un logiciel 1.0 etc. en intégrant une plateforme en ligne mettant en relation l’offre et la demande. C’est ce que Morgane Croquelois appelle son offre "pull", auquel elle ajoute l’offre "push" qui est d’aller au-devant des clients en se servant de son logiciel. Le push est en fait une activité passionnante car ce monde du réemploi est extrêmement vaste. Ici, ce sont des lames de bardage non utilisées sur un chantier ; là, des contreplaqués bakélisés pour le coffrage ou la fabrication de parpaings ; ailleurs, les portes et les fenêtres.
Benne de bois sur un chantier.
Les habitudes du marché se placent clairement du côté de l’incinération voire de l’enfouissement, ou du recyclage dans les panneaux de process qui manquent aujourd’hui de matière première neuve à cause de la compétition avec la biomasse. Il n’en demeure pas moins que l’esprit du temps et les contraintes matérielles actuelles orientent le marché vers le réemploi, et que des structures spécialisées comme Rewood, avec leurs nouvelles connaissances, en sont des acteurs recherchés.