Droit du travail : Discrimination, calcul de l'indemnité compensatrice de préavis...

Graphique montrant un homme criant avec un mégaphone sur une femme au travail

Désigner une salariée comme "la libanaise" est discriminatoire. Étude de cas récents de jurisprudence en droit du travail par François Taquet, avocat.




Désigner une salariée comme "la Libanaise" est discriminatoire

 

Une salariée avait réclamé des dommages-intérêts pour discrimination. Elle apportait la preuve par des attestations que sa supérieure hiérarchique la désignait parfois, soit directement devant elle, soit en son absence, en tant que "la Libanaise"…

 

La Cour d’appel de Paris avait rejeté toute infraction en estimant que la salariée ne démontrait pas que ces propos, pour inappropriés qu'ils soient, aient entraîné une discrimination, c'est-à-dire une différence de traitement entre elle et les autres salariées.

 

La Cour de cassation censure cette décision en estimant que "l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés". (Cass soc. 20 septembre 2023, pourvoi n° 22-16130)

 

Ce n’est guère la première fois que la Cour de cassation prend cette position (Cass soc., 10 novembre 2009, pourvoi n° 07-42.849). Toutefois ce rappel ne peut qu’inciter les employeurs à se montrer prudents dans leurs propos.

 

Autres cas de jurisprudence

 

  • La clause de non-concurrence incluse dans un contrat de travail aux termes de laquelle l’employeur se réserve seul la faculté, après la rupture du contrat de travail qui fixe les droits des parties, de renouveler la durée de l’interdiction de concurrence pour une durée égale à la durée initiale est nulle. (Cass soc. 13 septembre 2023 pourvoi no 21-12006)

 

  • La cessation d’activité complète et définitive de l’entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement, sans qu’il soit nécessaire de rechercher la cause de cette cessation d’activité quand elle n’est pas due à une faute de l’employeur. (Cass. soc. 20 septembre 2023 pourvoi n° 22-13485)

 

  • Le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. (Cass soc. 27 septembre 2023 pourvoi no 21-14773)

 

  • L’indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au montant des salaires qu’il aurait perçus s’il avait travaillé pendant la durée du préavis. Dès lors, une cour d’appel ne peut pas limiter la somme allouée au salarié en considération de son seul salaire de base mensuel brut, sans prendre en compte les heures supplémentaires et la prime d’ancienneté qu’il aurait perçues s’il avait exécuté le préavis (Cass soc. 27 septembre 2023 pourvoi no 21-24782)

 

  • Un employeur ne peut pas refuser la prise en charge partielle des frais de transport en commun pour les trajets domicile-lieu de travail à un salarié en raison de l’éloignement géographique de sa résidence pour convenance personnelle. (Paris 14 septembre 2023 RG n° 22/14610)

 

  • Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. (Cass soc. 4 octobre 2023 pourvoi n° 21-25421)

 

  • Un employeur qui conclut un contrat à durée déterminée après un contrat de mission n’a pas à respecter de délai de carence entre les deux contrats. (Cass. soc. 27 septembre 2023 pourvoi n° 21-21154)

 

Paye – Urssaf

 

  • L'absence de signature de la mise en demeure n'en affecte pas la validité dès lors que l'organisme qui la délivre y est mentionné. (Rouen. Chambre sociale. 6 octobre 2023. RG n° 22/03298)
  • Les accusés de réception des deux mises en demeure ont été signés par leur destinataire et il est indifférent que l'un d'eux ne comporte pas de date de présentation ou de distribution, l'absence de réception effective d'une mise en demeure n'affectant pas sa validité (Rouen. Chambre sociale. 6 octobre 2023. RG n° 22/03298)
  • Selon l'article L. 244-9 du Code de la sécurité sociale, la contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, dans les délais et selon des conditions fixées par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Il en résulte que la contrainte qui n'a pas été régulièrement frappée d'opposition ne peut plus faire l'objet d'une contestation devant le juge de la sécurité sociale et qu'ainsi, le cotisant dont l'opposition à contrainte a été déclarée irrecevable, est irrecevable à contester la régularité et le bien-fondé de chef de redressement qui font l'objet de la contrainte.(Orléans. Chambre Sécurité Sociale. 10 octobre 2023. RG n° 21/02321)

 



Source : batirama.com/ Image © vectorjuice sur Freepik

L'auteur de cet article

photo auteur François TAQUET
François Taquet est professeur de droit social et avocat spécialisé dans le contrôle et le contentieux Urssaf. En plus de ses contributions régulières pour la presse, il est l’auteur de nombreux livres qui traitent de droit du travail et de sécurité sociale.
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