Réunis lundi en commission mixte paritaire, les députés et sénateurs sont parvenus à une version commune d'une proposition de loi visant à mieux réguler le marché des meublés touristiques de type Airbnb, ultime étape avant son adoption définitive au Parlement.
Le texte prévoit notamment de généraliser le numéro d'enregistrement pour tous les meublés (résidence principale et secondaire), d'obliger le loueur à fournir des justificatifs de propriété ou encore de donner la possibilité aux maires d'abaisser le seuil de location de 120 à 90 jours par an pour les résidences principales.
"C'est une victoire sur un sujet que l'on porte depuis longtemps", a salué lundi soir devant la presse Iñaki Echaniz (PS), aux côtés de sa collègue Annaïg Le Meur (Renaissance). Le Sénat devrait adopter le texte le 5 novembre et l'Assemblée le 7.
Cette CMP (Commission Paritaire Mixte), composée de sept sénateurs et sept députés, a travaillé à réconcilier la copie du Sénat et celle de l'Assemblée. Elle était composée lundi de sept parlementaires de la majorité gouvernementale et de sept de l'opposition.
"Les parlementaires et le gouvernement ont saisi l'urgence de la situation en réunissant la commission mixte paritaire rapidement. Ce texte constitue une réponse équilibrée aux besoins de nos concitoyens et aux impératifs économiques du secteur de l'hôtellerie", a salué dans un communiqué Véronique Siegel, la présidente de la branche hôtellerie de l'Umih, première organisation patronale du secteur.
Sur l'un des principaux points durs, la fiscalité, actuellement plus favorable à la location touristique de courte durée qu'à la location nue de longue durée, les députés ont obtenu un demi-succès. Autrement dit :
– l'abattement dont bénéficient les propriétaires de meublés de tourisme classés et de chambres d'hôtes devrait passer de 71 % à 50 %, avec un plafond abaissé à 77 700 euros ;
– Pour les meublés de tourisme non classés, l'abattement devrait passer de 50 % à 30 % (comme pour la location nue), avec un plafond à 15 000 euros.
"C'est déjà une belle avancée", a souligné Annaïg Le Meur, même si l'objectif demeure de parvenir à un alignement des taux. "Tout l'objectif maintenant est de porter le nu à un niveau plus élevé, soit 50 % comme cela a été adopté à l'Assemblée nationale" la semaine dernière dans le cadre de l'examen du budget, "soit 40 %", comme les sénateurs s'y sont engagés. © Régis Nescop / Le Télégramme
Les sénateurs ont accepté de permettre aux communes de limiter, si elles le souhaitent, à 90 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale peut être louée aux touristes de passage.
La question de l'obligation du DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) fait aussi partie des points de désaccord. Les nouveaux meublés de tourisme seront soumis au calendrier ordinaire, le "stock" obtenant un délai de dix ans, au lieu de cinq pour parvenir à l'étiquette énergétique D, soit la version du Sénat. "Il y a eu un lobby de la montagne et de la mer extrêmement présent sur l'ensemble du texte", a observé Iñaki Echaniz.
Le texte de la CMP entérine d'autres évolutions plus consensuelles entre députés et sénateurs, visant à octroyer un plus grand pouvoir de régulation aux maires, comme aux copropriétés.
Ce mardi, les hôteliers ont salué ce texte adopté en CMP, le groupe américain Airbnb "regrettant" pour sa part de nouvelles restrictions.
"C'est le sentiment d'avoir enfin été entendus qui prédomine. Ce texte représente une avancée majeure pour un meilleur encadrement et a une portée non seulement sur l'écosystème touristique, mais sur la vie de la cité", s'est ainsi réjoui Patrick Hayat, le président de l'Atop (Association pour un tourisme professionnel).
Aibnb, dont la France est le deuxième marché, est présent dans plus de 29 000 communes du pays. Le groupe a déploré cette proposition de loi, dans une déclaration transmise à l'AFP: "Nous regrettons l'addition de mesures ciblant la location occasionnelle qui n'auront aucun effet sur les déséquilibres du marché locatif. Bien que nous n'anticipions pas un impact notable sur notre activité, la baisse de la fréquence à laquelle les Français peuvent louer en courte durée leur logement risque de nuire à de nombreuses familles."
La plateforme de locations courte durée souligne que si le cadre législatif actuel permet à 4 000 villes françaises de prendre des mesures afin d'encadrer les locations de courte durée, "seules 350 villes s'en sont saisies ces dernières années". Estimant que "cette mesure ne permettra pas de ramener des logements au sein du parc immobilier", Airbnb dit soutenir "la mise en place de règles proportionnées dans de nombreuses villes de France".