La Comédie Française se drape d’une enveloppe biosourcée à Sarcelles
À Sarcelles, les ateliers des décors de la Comédie Française achèvent leur rénovation thermique avec l’agence Landfabrik et des solutions mêlant la paille, le bois français local et la terre du site.
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Après avoir assuré entièrement la décoration des pièces jouées à la Comédie Française, y compris en tournée, pendant 50 des 300 ans de l’existence de l’institution, l’heure de la rénovation des bâtiments dédiés à Sarcelles a sonné. La construction métallique très légère a bien résisté au temps, avec ses poteaux métalliques et une couverture métallique juste dimensionnée afin de supporter un isolant en PUR pas très épais. L’été, la température peut monter à 40 °C dans les bureaux.
Une ITE avec 22 cm de paille. © Jonas Tophoven
Démarche vertueuse
La maîtrise d’ouvrage a engagé, en conception, une démarche BDF argent avec Ekopolis bouclée début mars 2023 avec une note de 68/100. L’objectif est une division par deux des besoins en chauffage et suppression de la surchauffe estivale. En option, la mise en place de panneaux PV pour production de 100 % de la consommation électrique du site. Il est déjà question de paille hachée sur étanchéité existante protégée par sur-toiture en charpente bois couverte en bac acier. De fait, l’équipe de maîtrise d’œuvre est déjà bien constituée avec Landfabrik et Enertech en BE.
Cette surtoiture en bois local correspond parfaitement au besoin, faut pas faire faire 1300 km à des camions chargés de BLC rabotés sans noeuds, d'autant que la surtoiture est masquée. © Jonas Tophoven
Pourtant, il serait sans doute moins cher de recourir à une ITE sandwich associée à une sur-toiture sur des blocs de PSE. La Comédie Française a insisté pour choisir une solution biosourcée qui tranche avec les bâtiments industriels alentour mais, qui sait, incitera peut-être les uns et les autres à opter pour la même voie.
Des lots scindés
Fallait-il encore construire avec 2025 comme délai. L’appel d’offres a été infructueux et dans sa répétition, le lot paille et le lot charpente ont été scindés. Isovoo de Blanzy s’est finalement chargé de la paille, associé à Segond Charpente du même département de la Saône-et-Loire : bref, le Morvan. Cela veut dire le bois, du Douglas en bardage de façade vertical et une sur-toiture en épicéa local produit pas Monnet-Sève aux pannes en BMA et Arbonis pour les arbalétriers en BLC.
Le Morvan Isovoo réalise une belle référence en Île-de-France. © Jonas Tophoven
L’ITE de façade se compose d’une MOB avec des caissons incorporant de la paille en 22 cm. Isovoo a travaillé avec les cultivateurs locaux pour optimiser la qualité de l’isolant, qui est appliqué à une densité de plus de 100 kg. La MOB enferme l’exostructure métallique du bâtiment existant dans un coffrage en bois. Le bureau d'étude AIS, après analyse fine de la structure existante et échanges avec géotechnicien, a su optimiser les besoins en renforcement des nouvelles fondations et les sections de bois.
Une ATE autrichienne en attendant IELO
Le poids de la superstructure en bois repose sur les parois latérales et se décharge sur des poteaux en béton liés à des longrines. Le bas des arbalétriers laisse suffisamment de place pour 30 cm de paille hachée en vrac.
Benoît Rougelot, de l'agence Landfabrik, longtemps président du réseau français paille RFCP, relance avec ce beau chantier la construction paille en Île-de-France. © Jonas Tophoven
Landfabrik connaissait l’ATE autrichien permettant cette solution, acceptée par le bureau de contrôle Veritas. Le surpoids de 30 kg/m2 correspond à ce que l’ancienne structure métallique peut porter. Pour l’application, il faut juste attendre le bon moment et un support sec. Au pire, la couverture qui sert de support aux panneaux photovoltaïques dispose d’ouvertures par lesquelles la paille hachée pourra être insufflée.
Sarcelles redevient innovant
Effet d’opportunité : comme Benoît Rougelot a constaté que la terre du site est argileuse, cette dernière a pu être utilisée pour des enduits intérieurs, pour la loge du gardien, par Lisa Mazé. On n’est pas l’un des précurseurs du BTP (bois-terre-paille) pour rien.
Renforcement des fondations pour la descente de charge de la surtoiture. © Jonas Tophoven
Les employés reprennent actuellement leur poste. Après la tour Ravel et les Biscottes par l’agence Equateur, Landfabrik dote Sarcelles d’une troisième rénovation hors norme. Sarcelles devient pleinement un lieu architectural en Île-de-France.
Rebondissement
La paille d’Île-de-France, mutilée par la perte de l’entreprise Batisens et la fermeture du tout nouveau centre de formation de Montargis, reprend des couleurs avec :
– le lancement de la construction de l’immeuble multi-étages en paille à Paris Daumesnil par Serge Joly ;
– la seconde édition, à Paris, du congrès de la construction paille ;
– en janvier la création nationale d’un comité biogéosourcé ;
– la présentation de plusieurs projets spectaculaires, dont celui de la Comédie française au Forum Bois Construction 14 du Grand Palais du 26 au 28 février 2025 (ABF-LAB, Landfabrik, Simon et Capucine).
On attend encore :
– la rénovation scolaire sérielle avec de la paille,
– les bureaux en paille,
– les logements sociaux et les appartements d’accession à la propriété en paille,
– l’association bois-pierre(naturelle)-paille,
– Mais surtout, la prise en compte réglementaire, dans le cadre de la RE2020, de l’option structure bois, paille et terre crue pour répondre à la réglementation en matière d’inertie.
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