L'usine Soprema de Hof en Allemagne associe photovoltaïque, éolien et stockage de froid pour tendre vers l'autonomie en électricité et n'utiliser que des énergies renouvelables.

 

 

1. La nouvelle usine Soprema à Hof, près de Francfort, produit des membranes bitumées pour l'étanchéité des toitures terrasses. Doc. PP

 

Les responsables de la nouvelle usine Soprema de Hof le disent d'emblée : ce qu'ils font ici doit beaucoup au contexte énergétique allemand et à l'atmosphère pro-industrie qui règne dans cette région.

 

En Allemagne, l'électricité pour les industriels est nettement plus coûteux qu'en France. La législation encourage financièrement le recours aux énergies renouvelables par l'industrie en taxant les entreprises qui n'en utilisent pas.

 

Soprema construit une autre usine en France, mais n'y visera pas les mêmes performances énergétiques. D'abord, il est très compliqué de construire des éoliennes terrestres en France près de zones habitées.

 

La loi sur la transition énergétique (art. 139) fixe à 500 m la distance minimale entre des éoliennes et les habitations ou zone constructibles les plus proches. Ensuite, autant les quatre collectivités locales allemandes sur le territoire desquelles est construite la nouvelle usine se sont mises en quatre pour faire aboutir le projet, autant les quelques riverains du projet en France tentent tout ce qu'ils peuvent pour retarder ou annuler les travaux.

 

 

2. Une membrane bitumée comporte plusieurs couches, dont un support, le bitume et une couche de finition naturelle en ardoise, etc. pour la protéger contre les abrasions et les UV. Doc. PP

 

 

3. L'usine Soprema de Hof fabrique 60 références de membranes bitumées différentes sur une seule chaîne de production. Doc. PP

 

Un équipement en deux tranches

 

L'usine Soprema de Hof remplace une ancienne usine fermée début septembre. Elle contient pour l'instant une ligne de fabrication de membranes bitumées pour l'étanchéité des toitures terrasses. Elle est suffisamment vaste pour accueillir une seconde ligne de fabrication, prévue à côté de la première.

 

L'investissement s'est élevé à 23 millions d'Euros. Telle qu'elle est, l'usine de Hof emploie 45 personnes. Le terrain disponible s'étend sur 14 ha. Une seconde usine est prévue pour 2017 et fabriquera des panneaux de polyuréthane pour l'isolation thermique des toitures terrasse. Ce second investissement s'élèvera à 20 millions d'Euros et cette deuxième usine emploiera une quarantaine de personnes.

 

 

4. Les membranes bitumées arrivent en fin de chaîne de production à 150°C. Il faut redescendre à 30°C avant de les emballer. L'usine utilise en même temps de la chaleur et du froid. Doc. PP

 

Photovoltaïque et éolien

 

Pour sa fabrication de 15 millions de m² de membrane bitumée, l'usine consomme 2,5 millions de kWh d'électricité et environ 1,7 millions de kWh de gaz naturel, soit environ 4,2 GWh par an de consommation énergétique totale.

 

Le gaz est notamment utilisé pour fondre le bitume pour fabriquer les membranes bitumées. Les membranes finies sortent de la chaîne de fabrication à 150°C environ. Il faut ensuite les refroidir à 30°C pour pouvoir les emballer  et les stocker avant expédition.

 

Le but de Soprema est d'atteindre d'abord l'auto-suffisance en électricité, puis dans un second temps d'utiliser du biogaz à la place du gaz naturel. L'usine produit une partie de son électricité sur place grâce à 6000 m² de panneaux photovoltaïques Solarworld installés sur le toit. Cette installation est dimensionnée pour produire 400 000 à 500 000 kWh d'électricité par an.

 

Ensuite, le fabricant achète la totalité de la production de deux éoliennes de 70 m de hauteur, situées à moins de 3 km de l'usine. Ce point est important dans la réglementation allemande pour que l'industriel soit réputé utiliser du courant électrique produit par des éoliennes. Ces deux éoliennes doivent produire 1 million de kWh par an.

 

 

5. L'usine achète la totalité de la production de deux éoliennes, situées à proximité immédiate. Doc. PP

 

Biogaz et cogénération

 

Nous n'en sommes qu'à 1,5 Millions de kWh d'électricité produits sur site contre 2,5 utilisés. Soprema envisage d'ajouter une troisième éolienne en 2016, puis d'installer une cogénération fonctionnant au gaz naturel dans un premier temps.

 

Ensuite, l'usine sera alimentée en biogaz qui remplacera le gaz naturel pour alimenter la cogénération, les chaudières à condensation qui produisent la chaleur nécessaire au process, ainsi que les radiants obscurs gaz suspendus au plafonds qui assurent le chauffage des locaux.

 

L'investissement pour la production du biogaz est en cours chez un groupe d'agriculteurs proches du site. Fin 2017, le site devrait être autosuffisant en électricité. Ce qui ne signifie pas qu'il ne sera plus raccordé au réseau. Simplement, la production d'électricité sur site devrait couvrir les besoins et le réseau électrique venir en secours en cas de besoin.

 

 

6. Les 600 m² de panneaux photovoltaïques sur le toit de l'usine fournissent 400 à 500 000 kWh/an. Doc. PP

 

Aucun kWh n'est revendu

 

En attendant, la totalité de la production d'électricité est autoconsommée. Lorsque l'usine est en fonctionnement, la production alimente directement le process. Lorsque l'usine ne tourne pas – la nuit et le week-end – la production d'électricité sert à produire de l'eau glacée stockée dans un réservoir de 1 million de litres sous l'un des parkings de l'usine.

 

L'idée est simple. Comme l'usine a besoin de froid en permanence pour refroidir les membranes bitumées en sortie de chaîne, au lieu de revendre de l'électricité, il est utilisé pour refroidir l'eau du réservoir. Laquelle sert ensuite à refroidir le process.

 

Il faut pour cela de l'eau à 15°C. La température de l'eau dans le réservoir peut être descendue à 4°C. Ce qui couvre les besoins de l'usine en eau glacée durant trois jours. L'eau est refroidie par deux groupes froids air/eau de 500 kW de puissance totale. Ainsi que par deux aéroréfrigérants air/eau.

 

Selon la température extérieure, l'usine utilise en priorité les aéroréfrigérants : un échange air/eau sans compression consomme moins que les groupes froids. Lorsque la température extérieure devient trop haute pour un échange direct, les groupes froids sont lancés.

 

C'est une excellente solution de stockage d'énergie. Elle est plus simple, plus efficace du point de vue énergétique et nettement moins gourmande en investissement qu'un stockage direct d'électricité dans des batteries. Nous attendons avec impatience la suite de l'histoire. Fin 2017, tous les équipements devraient être en place, ainsi que la seconde usine, destinée à produire des panneaux de PUR. Ce sera le moment de faire un bilan.

 

 

7. En sortie de la chaufferie et de la chaîne de production, une installation de filtration imposante épure les fumées de manière à garantir zéro rejet dommageable pour l'environnement. Doc. PP

 

 

8. Les aéroréfrigérants assurent le refroidissement du stockage de 1 million de litres d'eau quand la température extérieure s'y prête. Doc. PP

 

 

9. La prochaine usine construite à côté de celle-ci produira des panneaux de PUR pour l'isolation des toitures terrasses. Il n'est peut-être pas exclu que Soprema propose un “deux-en-un” ensuite : un panneau de PUR pré-revêtu d'une membrane bitumée. Doc. PP

 

 

Source : batirama.com / Pascal Poggi