À Cormeilles-en-Parisis, le promoteur Pierre Étoile a construit 59 logements labellisés Minergie, livrés ce dernier quadrimestre 2010. Les réglementations françaises ne permettent pas de les classer BBC. La consommation d’énergie prévisionnelle apparaît au-dessus de 100 kWh/m2/an. Les méthodes du label suisse Minergie indiquent, elles, une consommation d’énergie prévisionnelle moyenne de 37 kWh/m2/an. De quoi s’interroger. Le programme immobilier de Pierre Étoile comporte d’une part 21 maisons groupées par 2 ou 3 et, d’autre part, une copropriété de 31 appartements et 7 maisons de ville. Les objectifs consistent à maximiser les apports solaires directs et l’inertie des bâtiments.
Le promoteur dénonce les excès de la RT 2005 qui privilégient le gaz au détriment de l’électricité.
1/ Les consommations électriques des pompes à chaleur, systèmes solaires, VMC, puits canadiens, etc., sont pénalisées par le coefficient d’énergie primaire de 2,58 (1). Quand on sait que l’électricité française est à plus de 80 % nucléaire et à plus de 90 % dépourvue de combustible fossile. En conséquence, l’objectif du label BBC impose le recours au gaz.
2/ Les apports thermiques de la VMC double flux et sa consommation électrique dissuadent de recourir à ce système.
3/ En France, l’inertie des bâtiments est considérée comme une masse à réchauffer. En Suisse, l’inertie est un stockage de calories, hiver comme été.
4/ Les apports de la pompe à chaleur ne sont pas pris en compte pour l’ECS, ce qui oblige à surdimensionner un appoint électrique direct.
5/ Les apports solaires des baies sud sont négligés et considérés comme des pertes de calories. En Suisse, les bow-windows sont considérés comme des radiateurs.
6/ Des surpuissances sont nécessaires pour “relancer les planchers chauffants”. Absurde avec la forte inertie thermique de ce programme.
7/ Les poêles à bois, d’une puissance de 6 kW, ne sont pas pris en compte. Des dérogations sont en cours.
8/ Enfin, EDF ajoute une petite touche. On augmente généralement la puissance souscrite, donc le gabarit des câblages électriques de 3 kW par logement, en négligeant tout délesteur. Il est vrai qu’EDF tire une partie de ses revenus de “l’abonnement à la puissance souscrite”.
1• Les réglementations françaises pour l’habitat neuf semblent à la fois timorées et rigides. À votre avis, pourquoi ?
Le président de Pierre Étoile, Marc Gédoux, note : « C’est le fameux article 5 : une technique innovante peut être acceptée en déposant un dossier au CSTB. Il y a quelques années, les procédures duraient plus de 2 ou 3 ans. Pour un chauffe-eau électrosolaire ou un poêle à bois, cela semble abusif. Espérons que le Pass’Innovation accélèrera concrètement les choses. »
2• Le recours aux énergies renouvelables pour le chauffage et l’eau chaude (2) semble défavorisé, ce qui retarde leur diffusion dans le neuf en France. Qu’en pensez-vous ?
« La pompe à chaleur géothermique dispose d’un COP (coefficient de performance) de 4,25 qui est divisé par 2,58, soit 1,65. Cela a entraîné la mise en place d’une chaudière électrique de 120 kW, inutile selon les méthodes Minergie. Le chauffage électrosolaire est aussi pénalisé par le coefficient de 2,58 qui minimise l’appoint électrique. De plus, les apports solaires directs sont négligés. En conséquence, le poêle à bois de 6 kW est obligatoire, pour un prix de revient de 4 000 €. Et il est surdimensionné. »
3• Pourquoi constate-t-on de telles contradictions entre le label de référence suisse Minergie et la réglementation thermique française (RT 2005) ? Cela va-t-il durer avec la Réglementation énergétique 2012 ?
« L’approche suisse tient compte du solaire,
actif ou passif, dans la construction. La RT 2005 ne le fait pas facilement. Elle a un train de retard sur le label Minergie. La RT 2012 se rapproche du Minergie actuel. En 2011, le label Minergie concernera la construction passive, ce qui équivaut à la future réglementation française 2020. » |