Rappelons d’abord qu’en principe, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors d’elle, de sa liberté d’expression. Cette liberté est garantie par l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. En outre, suivant l’article L 1121-1 le Code du travail « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».En ce sens, les tribunaux ont sans cesse rappelé que la liberté d’expression d’un salarié dans l’entreprise ou en dehors de celle-ci ne pouvait être punie. Seule pouvait être sanctionnée la liberté d’expression qui a pour objet de nuire à l’employeur. Ainsi, en serait il en cas de propos diffamatoires et excessifs tenus publiquement, de manquements à l'obligation de discrétion absolue, de dénigrement systématique de l’employeur, d’accusations mensongères, de propos injurieux etc etc….
Jurisprudence : attention aux amis d'amis !
En résumé, le fait de critiquer sa hiérarchie sur le réseau social ne constitue pas toujours une cause de licenciement. Encore faut il que les propos utilisés soient diffamatoires ou excessifs. Sur ce point, les tribunaux viennent de rendre deux décisions intéressantes. Dans une première décision, un employeur avait infligé un avertissement à un salarié, qui avait critiqué « son chef » sur Facebook. Après avoir indiqué que ce que le salarié écrivait sur le réseau social était public (via les amis des amis … !), les juges ont estimé que la sanction n’était pas justifiée puisqu’il n’était pas possible à des personnes extérieures, compte tenu du vocable général « le chef » d'identifier la personne visée (Cour d’appel de Reims 9 juin 2010).
3 conditions cumulatives
Récemment, le conseil de prud’hommes de Boulogne Billancourt (19 novembre 2010) vient de réitérer cette position : ce que le salarié écrit sur Facebook est public dès lors qu'il est ouvert aux amis d'amis. L'employeur peut donc se fonder sur ces propos pour licencier un salarié dès lors qu'il dénigre un supérieur hiérarchique nommément visé.
Ainsi, les propos tenus sur le réseau social ne constituent ils une cause de sanction que trois conditions sont cumulativement réunies :
- Le salarié doit avoir abusé de sa liberté d’expression
- Le réseau doit être ouvert à des amis d’amis, en un mot, avoir un caractère public
- La personne critiquée doit être nommément citée
Autant de restrictions qui doivent, pour l’employeur, inciter à la réflexion avant d’agir !
Source : batirama.com / François Taquet