Focus sur les bonnes pratiques pour réussir le Passif en logement collectif

Focus sur les bonnes pratiques pour réussir le Passif en logement collectif

Plusieurs communications du 22e Congrès PassivHaus ont porté sur les bonnes pratiques à adopter pour concevoir et construire des bâtiments collectifs de logements selon le standard Passivhaus.




Plusieurs dizaines de milliers de maisons individuelles ont été construites selon le standard Passivhaus, un peu partout dans le monde. Les immeubles collectifs ne sont pas rares non-plus, mais leur conception et leur construction sont un peu plus compliquées.

 

Rainer Pflüger, de l’Université d’Innsbruck, a présenté au 22e Congrès International Passivhaus à Munich, une communication sur la « Campagne Reichenau », en allemand dans le texte, montrant qu’en standardisant les procédés de construction, il est possible de réduire les coûts et de parvenir à de très faibles coûts d’exploitation.

 

 

 

La coordination du projet de 1100 logements construits à la Campagne Reichenau à Innsbruck a été confiée au cabinet d’architectes Stadt :Labor-Architekten. ©Stadt :Labor-Architekten

 

La Campagne Reichenau, une zone d’aménagement passive

 

Située à Innsbruck, la Campagne Reichenau est une friche de 84 000 m² où seront construits 1 100 logements, dont environ 800 logements sociaux, des terrains de sport et des locaux pour les clubs de sports. Le but est d’en faire une vitrine de constructions au standard Passivhaus, avec un coût de construction modéré et des coûts d’exploitation extrêmement réduits.

 

Commencé en juin 2017, le projet sera totalement livré en mai 2019, pour un coût total de 2,5 millions d’Euros. Plusieurs entités participent à la conception du projet : les deux promoteurs Innsbrucker Immobilien (IIG) , Neue Heimat Tyrol Gemeinnützige Wohnungs (NHT), le producteur-distributeur d’électricité local Innsbrucker Kommunalbetriebe et trois laboratoires de l’Université d’Innsbruck, Unit for Energy Efficient Building (UIBK), Unit for Intelligent Transport Systems, Unit for Environmental Engineering. Le but est de développer des solutions peu coûteuses, efficaces et reproductibles.

 

 

Le site de la Campagne Reichenau est quasi-libre. Les démolitions préalables seront minimales. Le but est de parvenir à une réalisation exemplaire, aussi bien en ce qui concerne les bâtiments que les transports et l’environnement. ©Stadt :Labor-Architekten

 

Préfabriquer pour réduire les coûts

 

Première remarque, souvent répétée par les intervenants au 22e Congrès Passivhaus et dans de nombreux documents publiés par le Passivhaus Institut de Darmstadt depuis des années, le standard Passivhaus n’impose aucune solution constructive particulière.

 

Au contraire, il s’accommode parfaitement du béton banché, de structures poteaux-poutres fermées par des murs manteaux, de panneaux de bois structuraux, d’ossature bois traditionnelle avec murs creux remplis d’isolation thermique et acoustique, etc.

 

Mais, souligne Rainer Pflüger, il demeure un potentiel d’économies dans le traitement des ponts thermiques et la démarche pour parvenir à l’excellente étanchéité à l’air que requiert le standard Passivhaus, tout en atteignant une bonne protection acoustique et le meilleur comportement au feu imaginable.

 

Les deux promoteurs impliqués dans ce projet, IIG et NHT, n’en sont pas à leur coup d’essai. Chacun d’entre eux a déjà plusieurs bâtiments collectifs passifs à son actif. Leur expérience montre que plus l’architecture est complexe et la construction difficile, plus le dérapage des coûts est probable, plus le nombre d’étapes pour réaliser un ouvrage est élevé, plus les risques de malfaçon sont importants et plus le coût de reprise et de réparation est élevé.

 

 

 

Voici le premier Bâtiment-5€/m² construit dans le Tyrol. Un T2 de 50 m² est loué 243 €/mois, TTC et charges comprises. ©NHT

 

Des composants d’enveloppe standardisés

 

Fort de cette expérience et avec l’aide de l’Université d’Innsbruck, les promoteurs ont décidé de préfabriquer les ouvrages au maximum, de manière à simplifier la mise en oeuvre et à réduire le nombre d’étapes sur chantier. Cette démarche reporte une grosse part du travail vers les concepteurs, d’une part, vers la préfabrication en atelier, d’autre part.

 

Les universitaires se sont d’abord plongés dans la littérature. Plusieurs travaux montrent, par exemple, que l’installation des fenêtres en tunnel donne un résultat insatisfaisant en termes de gains d’ensoleillement et d’étanchéité à l’air de l’enveloppe. La pose des fenêtres en applique sur la façade, l’isolation thermique par l’extérieur venant s’appuyer sur les 4 côtés du cadre dormant est plus favorable à la fois en termes de gains de chaleur gratuite, d’étanchéité à l’air et surtout de traitement des ponts thermiques. L’effet d’affaiblissement acoustique est également meilleur.

 

 

 

Les français travaillent dans le même sens : voici un bâtiment de logements sociaux conçu et réalisé par Equipe Energie à Limoges. Les coûts sont contenus, d’abord en raison de la simplicité de la conception, ensuite en détournant des matériaux industriels pour l’ossature, les parements de façades, etc.

 

 

Mur manteau et fenêtres en applique

 

Une fois la solution technique de la pose des fenêtres en applique retenue, Rainer Pflüger et ses collègues ont recherché des solutions de mise en œuvre industrialisées. Ils se sont arrêtés sur le mur manteau posé devant une structure poteaux-poutres bois, béton ou mixte.

 

Cette solution est très industrialisable et il existe une trentaine de solutions de murs manteaux certifiés par le Passvhaus de Darmstadt, suffisamment diverses pour que les architectes soient satisfaits en termes de choix esthétiques. Ensuite, les universitaires se sont demandés comment, concrètement, les fenêtres seraient fixées à l’ossature du mur manteau, de manière à atteindre une bonne performance en étanchéité à l’air et en affaiblissement acoustique.

 

Ils ont identifiés plusieurs systèmes industrialisés, conçus dans ce but : le système de montage par l’extérieur d’Illbruck, le Compactfoam, le système Blaugelb Triotherm+, TRAVframe Passiv M de Hella, Roka-Compact, etc. Toutes ces solutions se prêtent parfaitement à une préfabrication des éléments de mur manteau en atelier.

 

Montage des fenêtres en atelier

 

Finalement, la solution préconisée, puis approuvée par les Maîtres d’Ouvrages, leurs architectes et leurs Bureaux d’Etude est une structure porteuse poteau-poutre bois, béton ou mixte (notamment pour l’acoustique entre niveaux), fermées par un mur manteau préfabriqué au maximum, livré sur chantier en surfaces finies prêtes à poser avec fenêtres, protections solaires, isolation thermique et revêtement extérieur.

 

Seul le revêtement intérieur en plaques de plâtre n’est pas posé en atelier, de manière à permettre le passage des gaines et câbles électriques sur le chantier. Les cloisons intérieures et séparations entre logements sont réalisés en technique sèche sur ossature métallique ou en blocs de béton allégé.

 

5 €/m² loué, charges comprises

 

De son côté, l’ingénieur Ingelbert Spiß de NHT est venu expliquer que le but de ce Maître d’Ouvrage social était de parvenir à un coût de location des logements de 5 € TTC/m², charges comprises, y compris le chauffage. Ce n’est pas une utopie, puisque NHT y est déjà parvenu dans un bâtiment collectif, construit au standard Passivhaus à Schwartz, dans le Tyrol.

 

C’est un bâtiment R+3 et 18 logements, du T2 au T4, construit pour un coût total de 2,42 millions d’Euros et livré en avril 2017. Chaque logement possède un balcon. Le rez-de-chaussée est occupé par des places de parkings et des locaux pour abriter vélos et poussettes. NHT parvient à ces faibles coûts de loyer en exploitant deux petits trucs tout de même.

 

NHT n’est pas propriétaire du terrain et bénéficie gratuitement du droit de l’occuper avec son bâtiment. La location des parkings n’est pas comprise dans les 5 € TTC/m², soit 243 €/mois pour un T2 de 50 m². Mais NHT et d’autres promoteurs sociaux autrichiens veulent faire reconnaître ce qu’ils appellent les bâtiments-5€ comme un standard reproductible.

 

Selon Ingelbert Spiß, la clef pour parvenir à de tels bâtiments est la simplicité du design Passivhaus : la grosse partie de l’investissement va à l’enveloppe, dont la performance est durable, de manière à minimiser les coûts de maintenance et d’exploitation.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
1 Commentaire
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  • par arbuste
  • 13/03/2018 18:23:19

On dira ce que l'on voudra, ces bâtiments sont efficaces, mais Dieu qu'ils sont laids et pauvres...C'est certainement dans ce sens que les prochains progrès sont à faire.

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