Photo© EPA Paris-Saclay
L''idée de l'aménagement du plateau de Saclay au sud de Paris a démarré en 2010 dans le cadre des réflexions autour du Grand Paris. L'objectif est de créer un cluster en sciences dures de rang mondial en réunissant géographiquement des centres de recherche et des formations universitaires de haut niveau.
Autre objectif : capitaliser sur l'attractivité de Paris pour bénéficier d'un rayonnement international, tout en créant un territoire mixte en termes d'usages et autonome en termes de création de valeurs.
À cheval sur les départements de l'Essonne et des Yvelines, d'une superficie de 3,5 fois celle de Paris, le plateau de Saclay comptait déjà des établissements d'excellence assez isolés comme le campus du CNRS à Gif-sur-Yvette, l’Université Paris-Sud devenue la « Campus-Vallée », l'Ecole Polytechnique et le CEA de Saclay.
Le cœur du dispositif s'appuie sur trois nouveaux quartiers, celui de Moulon accueillant le pôle universitaire autour de l'Ecole Centrale Supélec, celui de l'Ecole Polytechnique qui va réunir le groupement NewUni. Ces deux quartiers seront reliés à terme par le quartier de Corbeville qui abritera le Campus d'AgroParisTech réalisé par Marc Mimram.
Le quartier de l'Ecole Polytechnique va abriter le groupement de Grandes Ecoles NewUni, dont l'Institut Mines-Télécom, ici en construction et réalisé par Grafton Architects. © F.Ploy
L'aménagement de ce territoire s'étire jusqu'au nord ouest à Saint-Quentin-en-Yvelines et à Versailles avec le quartier Satory, le tout devant être relié à terme par la future ligne 18 du métro.
Les chiffres annoncés sont ambitieux. Philippe Van de Maele, Directeur général de l’EPA Paris-Saclay résume les enjeux qui sont « la création d'un pôle académique de rang mondial avec un cluster qui va réunir 15% de la recherche académique française et 15% de la recherche privée française ».
Le défi est d'accueillir l'arrivée d'environ 30 000 nouveaux étudiants, de nouveaux salariés (18 000 dans les entreprises et 15 000 dans le monde académique) et de nouveaux habitants.
Environ 3,34 millions de m2 vont être construits dans cet archipel urbain dont 533 000 m2 d'établissements d'enseignement et de recherche. En injectant 3 à 5 milliards d'euros, l'Etat espère obtenir environ 11 milliards de création immobilière mixte, avec du tertiaire, des centres de recherche, des pôles universitaires et du résidentiel étudiant et familial.
Le territoire devra être durable en énergie avec un ambitieux réseau d'échanges de chaud et de froid alimenté par géothermie profonde dans la nappe d'Albien, de la récupération de chaleur fatale des process des laboratoires et de l'électricité d'origine ENR avec des panneaux solaires.
Le défi est immense. Le plateau de Saclay était jusque-là essentiellement consacré aux activités agricoles et la vie s'est abrité au cours des siècles dans la vallée de Chevreuse. Les villes existantes sont bordées de coteaux boisés en lisière nord servant de frontière avec le monde agricole.
Pour faire face à un climat assez rude avec de la neige et du vent en hiver, les architectes sollicités pour construire sur le plateau privilégient les grands jardins intérieurs comme à la future ENS ou à l'Institut Mines-Télécom, voire même comme sur la photo une vaste rue intérieure sous verrière comme à l'Ecole CentraleSupélec. © F.Ploye
« La réflexion globale de l'aménagement a été confiée au paysagiste et urbaniste Michel Desvigne. Un principe directeur est d'éviter d'étaler la ville et de grignoter les terres agricoles, comme l'illustre la création d'une réserve agricole et forestière de 4 115 hectares, la ZPNAF pour Zone de Protection naturelle agricole et forestière.
Les circuits courts pour l'alimentation sont privilégiés par le choix de foodtrucks locaux et les déchets agricoles servent à la méthanisation », précise Franck Caro, Directeur général adjoint en charge de l’aménagement de l’EPA Paris-Saclay.
La sauvegarde de la biodiversité est prise en compte avec des sites de reproduction des amphibiens protégés y compris sur le nouveau site du centre R&D d'EDF. La faible perméabilité des sols du plateau due aux terres argileuses, impliquent la création d'importants volumes de stockage d'eaux pluviales et un rejet de ces eaux dans des rigoles à très faibles débits. La terre excavée pour les nombreuses constructions est stockée et réutilisée dans les aménagements paysagers.
Un système de parcs est en création avec des bassins de rétention pour les eaux pluviales comme ici le Parc de Moulon. © F.PLoye
Côté construction, le quartier de Moulon est le plus avancé suivi de celui de Palaiseau. « Ainsi il faut densifier et étendre le quartier existant de la ZAC de Moulon, la réorganiser avec des voies vélo et des trottoirs larges et avec un tracé de bus en site propre », assure Benoît Lebeau, Directeur adjoint de l'EPA Paris-Saclay.
À noter qu'avec leur transfert, les surfaces des campus ont considérablement diminué à l'exemple du campus de l'ENS qui passe de 11,6 hectares à Cachan à 3 hectares à Saclay. Le principe est que les équipements sportifs et culturels sont mutualisés entre les différents établissements universitaires de même que les parcs et les résidences étudiantes.
« La conception est volontairement ouverte avec une rue intérieure accessible au public. L'accès par badges est limité aux salles de classe. Cette porosité revendiquée se retrouve ailleurs comme au centre R&D d'EDF où la restauration et une partie des jardins du site sont ouverts à tous », confie Benoit Lebeau.
Le premier grand établissement d'enseignement construit dans le quartier de Moulon est la nouvelle Ecole CentraleSupélec, qui a effectué sa première rentrée en 2017. Celle-ci a été construite en deux blocs séparés par une avenue, l'un réalisé par l'architecte Gigon-Guyer et l'autre conçu par l'architecte OMA, à la minéralité sombre, qui est bordé par un jardin servant à la gestion des EP de l'Ecole. © F.Ploye
Les programmes des nombreux logements étudiants construits ou en cours panachent des résidences sociales gérées par le Crous et du privé. Une charte « Habiter le Campus » a été élaborée avec des exigences de colocation, de la convivialité avec des espaces communs et une transparence pour les rez-de-chaussée donnant sur la rue. Deux exemples achevés peuvent illustrer cette prescription.
La résidence Eileen Gray du quartier de Moulon (Tank Architectes) est une résidence sociale gérée par le Crous avec 237 studios, 64 logements en colocation, un grand jardin partagé et environ 220 m2 de lieux de convivialité dont une cuisine commune et une salle de musique insonorisée.
Dans le quartier Polytechnique la résidence privée Kley Paris-Saclay (architecte XDGA-FAA) vient d'ouvrir en Août 2018 pour cette nouvelle rentrée avec là aussi une offre diversifiée en studios, T2 et appartements en colocation pour 5 étudiants. « C'est la sixième résidence construite par le groupe Kley, qui affiche un nouveau principe de résidences privées avec un travail sur l'ambiance et la déco et des espaces communs », présente sa directrice Aude Schaeffer.
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Le concept est très louable en soi mais n'existait-il pas d'autres moyens, par exemple en "recyclant" des friches urbaines ou industrielles qui sont pléthore en Ile de France ? Les terres fertiles à haute valeur agronomiques comme celles du Plateau de Saclay vont devenir des terres rares si on continue d'urbaniser 60000 ha chaque année en France ! Il y a des secteurs où on sanctuarise des vulgaires terres à silex alors que les riches terres limoneuses sont bétonnées sans ménagement ... qui décide ce genre d'ineptie ?