Monsieur Loïc D. et Mme Corinne W., son épouse, ont confié à la société CIL réalisations la construction d'une maison individuelle à Blotzheim. La réception de l'ouvrage a été prononcée en 2007.
Le 8 octobre 2018, M. D. et Mme W. ayant remarqué des désordres affectant le revêtement extérieur, les cloisons et le carrelage, ils demandent au tribunal d’ordonner une expertise afin de découvrir leurs causes ainsi que les remèdes à y apporter. Le 18 décembre 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Mulhouse leur fait droit et ordonne cette expertise.
Mais, le 15 janvier 2019, la société CIL réalisations fait appel de cette décision et demande à la Cour d’annuler l’ordonnance d’expertise. En effet, elle soutient que toutes les actions à son encontre sont éteintes, notamment l'action en responsabilité décennale, et que les époux D-W ne disposent donc pas d'un intérêt légitime à demander une expertise.
M. D. et Mme W. répondent à cela que, si la réception a bien été prononcée le 13 juin 2007, des fissures sont apparues au cours de l'été 2008 et ont fait l’objet d’une déclaration de sinistre, laquelle aurait interrompu la prescription. La Cour d'appel de Colmar dans son arrêt du 4 octobre 2019, fait droit aux époux D-W, et confirme l’ordre de procéder à une expertise.
Pour se faire, la Cour rappelle les termes de l'article 145 du code de procédure civile qui énonce que : s'il existe un motif légitime ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.
Elle mentionne ensuite que les époux D-W ont fait construire par la société CIL réalisations un bien immobilier sur lequel des fissures sont apparues. Il existe donc bien un motif légitime de faire établir l'origine et les conséquences de ces fissures, comme de déterminer la nature des travaux nécessaires pour y remédier ainsi que leur coût.
En effet, la solution du litige qui pourrait opposer les maîtres de l'ouvrage au constructeur et à son assureur pourrait dépendre des faits ainsi établis.
L’emploi du conditionnel induit qu’il ne saurait être exigé des demandeurs de l’expertise qu'ils justifient des chances de succès de leurs demandes. Ainsi, il n'appartient pas au juge des référés de se prononcer sur les chances de succès des actions qui pourraient être intentées suite à cette expertise.
En outre, la Cour juge qu’au vu des explications des époux D-W, il apparaît que leur possibilité d’agir en justice n’est pas prescrite. Mais quand bien même elle le serait, l’expertise ne serait pas annulée.
Source : Cour d'appel de Colmar, 4 octobre 2019
Source : batirama.com / Damien Aymard