Chauffage au bois : le plan du gouvernement pour réduire de moitié les émissions de particules fines

Chauffage au bois : le plan du gouvernement pour réduire de moitié les émissions de particules fines

Vendredi 23 juillet, le ministère de la Transition écologique, a publié un plan d’action pour réduire de 50%, d’ici 2030, les émissions de polluants du chauffage au bois domestique.




Devant le diesel, selon le ministère de la Transition écologique, le chauffage au bois domestique est le premier émetteur de particules fines en France. Les chiffres cités sont un peu anciens, mais, indique le ministère de la Transition écologique, en 2018, le chauffage au bois domestique était responsable de 27% des émissions nationales en PM10, 43% des émissions en PM2.5, ainsi que plus de la moitié des très fines émissions en PM1.0.

 

Or, les particules fines sont responsables de 40 000 décès par an en France selon Santé Publique France, dont 17 000 pourraient être évitées en respectant les valeurs limites recommandées par l’Organisation Mondiale de la Santé.

 

Trois causes de pollution en France

 

Le ministère cite trois causes de pollutions directement attribuables au chauffage au bois domestique. La première est la performance de l’appareil. Le ministère recommande d’utiliser un appareil récent, bien dimensionné – le surdimensionnement conduit à un fonctionnement non optimal - et bien entretenu.

 

La seconde est la qualité du combustible. Il faut employer un combustible avec un faible taux d’humidité qui permet une combustion moins polluante et plus performante du point de vue énergétique.

 

Troisième cause mise en avant : les pratiques d’utilisation. Le ministère recommande d’utiliser un allumage par le haut, d’éviter une allure de fonctionnement ralentie et de s’assurer que l’apport d’air comburant est suffisant.

 

Cette troisième raison vaut d’être détaillée. La combustion complète du bois requiert un combustible à faible taux d’humidité et avec un volume d’air comburant correspondant au volume de combustible. Si l’on veut réguler la quantité de chaleur produite par un système de chauffage au bois domestiques, tout en conservant une bonne hygiène de combustion, il faut conserver le bon ratio combustible/air comburant et donc faire varier les deux proportionnellement.

 

Les systèmes de chauffage à bûches ne permettent pas de réguler le volume de combustible. Diminuer la chaleur produite par un appareil à bûches est obtenu en abaissant le volume d’air comburant, ce qui a pour effet immédiat de dégrader l’hygiène de combustion et d’augmenter la production d’imbrûlés de toutes sortes, dont les particules fines.

 

 

 

Seuls les systèmes – poêles ou chaudières – à granulés permettent de réguler la quantité de combustible apportée au foyer en même temps que le volume d’air comburant. L’introduction des granulés est gérée mécaniquement, tandis que la modification du volume d’air comburant est obtenue par action sur le ventilateur – à courant continu – chargé d’apport d’air. L’automate de pilotage des appareils, en fonction des informations fournies par une sonde en sortie de la chambre de combustion, maintient les bonnes proportions combustible/air comburant. ©Ökofen

 

Ne pas abandonner le chauffage au bois

 

Dans le cadre de la loi Climat et Résilience, rappelle le ministère de la Transition énergétique, le parlement a voté un objectif d’une baisse de 50 % des émissions de particules fines entre 2020 et 2030 dans les territoires les plus pollués, à savoir ceux couverts par un plan de protection de l’atmosphère.

 

Le plan d’action «chauffage au bois domestique performant » permettra de répondre à cet objectif en accélérant le renouvellement des vieux poêles et des vielles cheminées au profit d’équipements performants, en développant l’utilisation de combustibles de qualité et en rappelant les bonnes pratiques d’utilisation des appareils.

 

Puisque le chauffage au bois présente un intérêt écologique – il est considéré comme un mode de chauffage neutre en carbone, même si ce point doit être considéré avec vigilance -, l’objectif du plan présenté n’est pas d’abandonner ce mode de chauffage mais de le rendre plus performant.

 

Chauffage bois : 6,5 millions d'appareils en France

 

Selon Observ’ER,  le parc actuel est composé de 6,5 millions d’appareils. La Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) prévoit d’atteindre 10 à 11 millions de logements chauffés avec de la biomasse solide à l’horizon 2028, sans augmenter la part de consommation énergétique nationale du bois afin d’atteindre un mix énergétique davantage décarboné et renouvelable.

 

Pour concilier cet objectif avec le respect des recommandations de l’OMS en matière de qualité de l’air, on doit favoriser l’utilisation d’appareils peu émetteurs. Près de la moitié des ménages (47%) qui utilisent le chauffage biomasse l’utilisent comme chauffage principal, le restant étant partagé entre l’usage d’appoint (36%) et d’agrément (17%). Par conséquent, le chauffage au bois représente près de 70 GWh de production thermique, ce qui représente la moitié de la production en chaleur renouvelable en France et 10% de la consommation finale de chaleur.

 

Si la bûche demeure le combustible le plus utilisé (86% du marché des combustibles biomasse), l’utilisation des granulés, plus efficaces pour la combustion, augmente fortement d’environ 15% par an. Malgré le renouvellement progressif du parc des équipements de chauffage, les foyers ouverts et équipements anciens peu performants, datant d’avant 2005, constituent encore 48% du parc des équipements et sont responsables d’environ 2/3 des émissions de particules fines issues du chauffage au bois individuel.

 

Les cheminées à foyer ouvert responsables de 21 % des émissions totales du chauffage bois

 

Les cheminées à foyer ouvert sont responsables de 21% des émissions totales du chauffage au bois, alors qu’elles ne constituent que 10% du parc des équipements à l’échelle nationale, soit environ 500 000 foyers en 2019. En Ile-de-France, les foyers ouverts représentent 44% des émissions du chauffage au bois résidentiel alors que le chauffage au bois constitue seulement 5% du parc.

 

Compte tenu de leur très faible rendement, de l’ordre de 15% voire moins, et de leurs niveaux d’émissions importants, les foyers ouverts constituent non seulement un gaspillage énergétique sans équivalent, mais aussi une pollution considérable alors qu’il s’agit souvent de chauffage d’agrément.

 

En Vallée de l’Arve, à la suite du constat sur la contribution particulièrement lourde du chauffage au bois résidentiel à la pollution de l’air, identifiée dans le Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA), le préfet de la Haute-Savoie a pris un arrêté en 2019 qui interdit l’usage des cheminées à foyer ouvert à partir de 1er janvier 2022. Il s’agit du seul territoire français ayant pris une décision d’interdiction définitive de l’usage des foyers ouverts. Néanmoins, dans les zones PPA, tous les préfets peuvent mettre en place une interdiction d’utilisation de chauffage biomasse non performants.

 

La vérification de cette interdiction reste une barrière pour rendre une telle mesure efficace.

 

 

Un plan d'action en cinq axes pour le chauffage bois

 

 

Le plan d’action « chauffage au bois domestique performant » prévoit donc cinq types d’actions.

 

  • sensibiliser le grand public à l’impact sur la qualité de l’air d’un chauffage au bois avec des appareils peu performants ou un combustible de mauvaise qualité. A ce titre, la vétusté d’un appareil de chauffage au bois sera désormais indiquée dans le nouveau diagnostic de performance énergétique. Les ramonages, rendus obligatoires une fois par an, seront l’occasion de rappeler les subventions disponibles pour remplacer un appareil peu performant et fortement émetteur de particules fines. Enfin, une campagne de communication annuelle et nationale sera menée par le ministère de la Transition écologique avant chaque période de chauffe, au mois octobre ;

 

  • renforcer et simplifier les dispositifs d’accompagnement pour accélérer le renouvellement des appareils de chauffage au bois. 600 000 appareils seront remplacés d’ici 2025 grâce aux aides à la rénovation énergétique des logements (MaPrimeRenov) et aux fonds air bois mis à disposition par les collectivités territoriales et l’Ademe. Ces aides peuvent atteindre jusqu’à 90% du coût d’un nouvel équipement pour les ménages les plus modestes.

 

  • améliorer la performance des nouveaux équipements de chauffage au bois en faisant évoluer le label flamme verte au-delà du seuil « 7 étoiles » pour définir des niveaux de performance plus protecteurs pour la qualité de l’air ;

 

  • promouvoir l’utilisation d’un combustible de qualité en développant un label pour attester de la qualité du combustible (faible taux d’humidité) et de son origine (issu de forêts gérées durablement). Par ailleurs, le ministère de la Transition écologique déterminera un seuil maximal d’humidité auxquels devra répondre le bois de chauffage mis à la vente afin de réduire les émissions de particules lors de sa combustion ;

 

  • encadrer l’utilisation du chauffage au bois dans les zones les plus polluées, en prenant des mesures adaptées aux territoires pour réduire les émissions de particules fines. La loi Climat & Résilience prévoit désormais que les préfets prennent les mesures locales nécessaires avant le 1er janvier 2023 pour atteindre une réduction de 50% des émissions de particules fines du chauffage résidentiel biomasse entre 2020 et 2030 dans les zones couvertes par un plan de protection de l’atmosphère (PPA).

 

Explication de texte : les fonds Air Bois

 

Les mesures annoncées comportent plusieurs acronymes qui recouvrent des notions peu connues. Commençons par le fonds Air Bois. Le dispositif des fonds Air Bois, coordonné par l’Ademe, contribue depuis 2013 à l’objectif de réduction de la pollution issue de la combustion du bois, en mettant en place des aides à destination des particuliers dans les régions les plus polluées par la combustion de la biomasse et diverses actions de sensibilisation aux bonnes pratiques et de mobilisation des professionnels.

 

Ces dispositifs sont financés à part égale par l’Ademe et le territoire (collectivité, département, région…) concerné par cette pollution de l’air. Une partie de ce fonds est également dédiée à la sensibilisation et à l’information des usagers sur les pratiques à adopter, notamment via les réseaux Faire.

 

Une quinzaine de territoires répartis dans 5 régions (AURA, Hauts-de-France, Ile-de-France, Grand Est, PACA) ont mis en place des fonds Air Bois cofinancés par l’Ademe. La programmation budgétaire actuelle prévoit que certains fonds perdurent jusqu’en 2026, tandis que d’autres, dans la Vallée de l’Arve, par exemple prennent fin dès le 31 décembre 2021. Le montant précis et les dispositions d’attribution des aides sont régionalisées d’une région zone à l’autre.

 

Les niveaux d’aides des fonds Air Bois se situent dans des tranches allant de 600 - 1 000 € (pays voironnais) à 1 000 - 2 000 € (métropole de Grenoble, Grand Annecy, Communauté de communes Arve et Salève, communauté des communes Grésivaudan), souvent conditionnés aux ressources des ménages. En Ile-de-France, le montant de l’aide est par défaut de 1 000 €, mais les particuliers peuvent recevoir un bonus de parrainage de 1 000 € s'ils participent à la diffusion d'informations sur leur démarche et à un recensement des bonnes pratiques pour limiter les émissions polluantes. Il suffit d’ajouter, au moment du dépôt des justificatifs permettant de bénéficier de l’aide, une « attestation de parrainage » signée par le particulier demandeur et la personne parrainée.

 

Le montant total dédié au dispositif des fonds Air Bois à l’échelle nationale est de 46,8 millions d’euros (période 2012-2026), dont 21 millions d’euros de contribution de l’Ademe. Cela représente un objectif d’aide à l’achat total d’environ 36 000 nouveaux équipements de chauffage domestique au bois performants.

 

Partout en France, MaPrimeRenov’ aide à financer l’achat d’un nouvel appareil pour les particuliers, avec des montants allant jusqu’à 2000 euros pour les ménages les plus modestes. Les Certificats d’économies d’énergie (CEE) sont également à disposition des ménages qui installent un équipement de chauffage domestique au bois performant. Cette aide est bonifiée en cas de mise à la casse d’une vieille chaudière au fioul ou au gaz : entre 500 et 4000 € pour une chaudière, entre 150 et 300 euros pour un poêle ou insert.

 

Peut-on aller au-delà du Label Flamme Verte 7 étoiles ?

 

Fonds Air Bois, MaPrimeRenov’ et CEE sont cumulables. Il faut que les appareils choisis atteignent ou dépassent les seuils de performance du Label Flamme Vert 7 étoiles. Les émissions en particules fines de l’appareil ne doivent pas dépasser 40 mg/Nm3 s’il est alimenté en bûches et 30 mg/Nm3 pour les granulés de bois.

 

La Directive européenne sur l’écoconception des produits liés à l’énergie encadrera l’efficacité énergétique et les niveaux d’émissions (particules fines, monoxyde de carbone, oxydes d’azote, composés organiques volatils) des appareils indépendants à compter du 1 er janvier 2022, comme elle l’a fait pour les chaudières au 1er janvier 2020. Les critères du label Flamme Verte seront alors équivalents à la réglementation.

 

Le ministère de la Transition écologique souhaite faire évoluer le Label Flamme Verte au-delà de 7 étoiles.

 

 

 

Dans la base de données Flamme Verte, on trouve 3068 appareils individuels de chauffage à bûches dont les performances sont supérieures ou égales au seuil des 40 mg/Nm3. Les meilleurs ne dépassent pas 3 mg/Nm3 et 951 appareils indépendants à bûches affichent des émissions ≤ 20 mg/Nm3, soit la moitié de l’exigence actuelle pour le niveau 7 étoiles. ©Buderus

 

En ce qui concerne les appareils individuels à granulés, autres que les chaudières, la base de données Flamme Verte recense 2 256 modèles Flamme Verte 7 étoiles. Les meilleurs ne dépassent pas 2 mg/Nm3, tandis que 1188 appareils ne dépassent pas 15 mg/Nm3, la moitié de l’exigence actuelle Flamme Verte pour les appareils individuels à granulés de bois.

 

La base Flamme Verte contient 488 chaudières 7 étoiles, dont 380 à chargement automatique (à granulés) et 108 à bûches. Depuis le 1er janvier 2021, les critères Flamme Verte 7 étoiles pour les chaudières ont évolué pour être supérieurs aux exigences de la Directive ecoDesign qui, depuis le 1er janvier 2020, a fixé de nouveaux seuils de performance et introduit l'idée de rendement saisonnier. 

 

Nouveaux critères Flamme Verte 7 étoiles pour les chaudières domestiques

  Efficacité énergétique saisonnière (?s) en % Emissions saisonnières de monoxyde de carbone (CO) en mg/Nm3 Emissions saisonnières de poussières (PM) en mg/Nm3 Emissions saisonnières de composés organique volatile (OGC en anglais, COV en français) en mg/Nm3 Emissions saisonnières d’oxyde d’azote (NOx) en mg/Nm3
Chaudières à chargement manuel 77 % pour les chaudières ≤ 20 kW, 78% pour les chaudières > 20 kW jusqu'au 31 décembre 2021, puis 79% à compter du 1er janvier 2022

600

40

20

200

Chaudières à chargement automatique 77 % pour les chaudières ≤ 20 kW, 78% pour les chaudières > 20 kW jusqu'au 31 décembre 2021, puis 79% à compter du 1er janvier 2022

400

30

16

200

 

Aucune des chaudières 7 étoiles à granulés, recensées dans la base Flamme Verte, n’atteint le plafond de 30 mg/Nm3. Les meilleures commencent à 2 mg/Nm3, les moins bonnes se situent à 29 mg/Nm3. 250 chaudières à granulés affichent des valeurs ≤ 15 mg/Nm3. ©Ökofen

 

 

A propos des 108 chaudières à bûches 7 étoiles recensées dans la base Flamme Verte, alors que le plafond est à 40 mg/Nm3, les meilleures atteignent seulement 6 mg/Nm3 et les moins bonnes ne dépassent pas 35 mg/Nm3. 76 chaudières à bûches affichent des émissions ≤ 20 mg/Nm3.

 

Bref, quelle que soit la catégorie d’appareil individuel de chauffage au bois, les matériels commercialisés en France aujourd’hui permettraient de diviser par deux le plafond des émissions de particules fines retenu pour atteindre le Label Flamme Verte 7 étoiles.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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