Les labels volontaires complémentaires de la RE2020

Les labels volontaires complémentaires de la RE2020

Le label Effinergie RE2020 résidentiel vient d’être publié. En revanche, le label BBCA sera prêt en septembre.




Les règlementations thermiques ont toujours été entourées de labels et de certifications volontaires complémentaires. Ils introduisent des exigences plus sévères que celles de la réglementation en vigueur ou bien élargissent l’assiette de la règlementation, voire les deux à la fois. Le label BBC pour la RT2005, puis les labels Effinergie applicables à la construction neuve accentuaient l’effort d’efficacité énergétique.

 

Le label BBCA, en revanche, se préoccupait principalement de l’empreinte carbone des bâtiments neufs. Tandis que la certification HQE élargit les domaines concernés, en prenant en compte l’énergie, la charge carbone, la consommation d’eau, les déchets, la protection de la biodiversité, qualité de vie dans les bâtiments et leur performance économique.

 

La certification HQE est une approche globale qui tente d’approcher l’ensemble des influences d’un bâtiment sur son environnement.

 

Divers labels officiels ont aussi accompagné les RT successives, pour préparer les acteurs de la construction à la RT suivante. Leur succès était directement proportionnel aux incitations, financières ou portant sur les règles d’urbanisme, qui les accompagnaient.

 

Le dernier exemple de ce type était le label E+C-, qui devait préfigurer la RE2020. Mais celle-ci repose sur une méthode de calcul assez largement différente et le label E+C- n’a donc pas servi à grand-chose.

 

Où en sommes-nous aujourd’hui, alors que la RE2020 s’applique au logements neufs, au bureaux neufs et aux locaux d’enseignement primaire et secondaire neufs ?

 

 

Le label BBCA sera mis à jour en septembre

 

 

Le référentiel BBCA mesure l’empreinte carbone du bâtiment. Il est développé par la Commission technique de l’association BBCA (Bâtiment Bas Carbone) et le CSTB, qui en est le garant scientifique. ©PP

 

 

Si le label BBCA atteste de l’exemplarité de l’empreinte carbone d’un bâtiment, quantifie et valorise, grâce à une mesure certifiée indépendante, la réduction de l’empreinte carbone du bâtiment sur l’ensemble de son cycle de vie (construction-exploitation-fin de vie-stockage carbone), il est en retard sur la réglementation applicable à la construction neuve, mais era prêt en septembre, selon Hélène Genin, Déléguée Générale de l'association BBCA.

 

Comme l’indique la note qui accompagne le dernier référentiel BBCA Neuf, la version V3.1 publiée en avril 2021, le label BBCA concerne en effet les bâtiments neufs entrant dans le champ d’application de la Règlementation Thermique 2012. Il est également compatible avec feu le label E+C-.

 

Un maître d’ouvrage qui voudrait aujourd’hui obtenir un label BBCA pour un bâtiment de logement dont le permis de construire a été déposé à compter du 1er janvier 2022 ou pour un bâtiment de bureaux neufs ou de locaux d’enseignement primaires ou secondaires dont le permis a été déposé à compter du 1er juillet 2022, devrait donc faire exécuter trois calculs différents : le calcul règlementaire RE2020 inévitable pour obtenir le permis de construire, le calcul RT2012 et le calcul BBCA. Il vaut mieux sagement attendre septembre, lorsque le nouveau label BBCA sera compatible avec la RE2020.

 

La méthode de calcul de l’ACV dans le label BBCA n’a pas été modifiée. Elle repose toujours sur un ACV statique. Tandis que le calcul d’ACV de la RE2020, comme chacun le sait après toutes les polémiques que cela a engendré, fait appel à une méthode dynamique. Pour l'instant, les deux résultats seraient donc différents. Nous verrons comment cela évolue lorsque nous pourront consulter la nouvelle version du label BBCA en septembre 2022.

 

 

Vers un nouveau label bas carbone européen

 

 

Bien que l'association BBCA prépare un nouveau label compatible adapté à la RE2020, elle est également engagée dans une autre tâche. En effet, le 14 mars dernier, à l’occasion du MIPIM, les principaux acteurs européens de l’immobilier neuf se sont unis pour soutenir le développement d’un label immobilier bas carbone paneuropéen.

 

 

Les membres fondateurs de cette initiative bas carbone européenne sont implantés dans divers pays européens : BPI au Luxembourg, en Belgique et en Pologne, NSI aux Pays-Bas, WO2 et ICAMAP au Luxembourg, en France et au Royaume-Uni. Generali Real Estate, BNP Paribas Real Estate ainsi que Covivio et Ivanhoé Cambridge ont, quant à eux, des implantations européennes. Struan Robertson soutient également ce projet. ©PP

 

 

L'association française BBCA fournit l’appui technique nécessaire à cette initiative européenne qui vise à promouvoir la réduction de l'empreinte carbone des bâtiments sur l'ensemble de leur cycle de vie.

 

Une commission scientifique a été mise en place pour assurer une approche indépendante. Co-pilotée par Artelia et Elioth by Egis, cette commission rassemble une équipe d’experts en analyse du cycle de vie et stratégies de décarbonation de l’immobilier.

 

Cette méthodologie européenne devait être développée d'ici l'été 2022 – ils sont en retard -, permettant aux premiers bâtiments exemplaires en Europe de demander le label européen d'ici la fin de l'année. Dans un premier temps, seuls les bureaux, le résidentiel et les hôtels seront concernés. Selon Hélène Genin, ce nouveau label européen, dont on ne connait pas encore la teneur, sera prêt pour de premières certifications de bâtiments début 2023.

 

La commission scientifique veille à ce que ses travaux tiennent compte de la révision de la Directive Européenne pour l’Efficacité Energétique des Bâtiments, lancée en décembre 2021. Elle inclura en effet une définition européenne des bâtiments « zéro émissions », qui concernera aussi bien le neuf que la rénovation.

 

Le processus de révision de la Directive devrait être achevé mi- ou fin 2023.

 

 

L’association Effinergie est prête pour le résidentiel neuf

 

 

De son côté, le 29 juin 2022, l’association Effinergie a dévoilé les exigences Effinergie adossées à la nouvelle réglementation environnementale pour les projets résidentiels, autrement dit, son nouveau label Effinergie Construction Neuve.

 

 

Le label Effinergie RE2020 repose sur la méthode RE2020, renforce plusieurs exigences et en introduit deux nouvelles. Côté enveloppe, le label Effinergie demande une réduction du Bbio de 15% : Bbiomax_label = 0,85 x Bbiomax. ©PP

 

 

En ce qui concerne les systèmes techniques, le label Effinergie demande une réduction de 10% du Cep, nr. Ce qui donne Cep, nr_max_label = 0,90 x Cep, nr_max.

 

Ensuite, l’association Effinergie exige une qualification ou une certification des BE pour réaliser les études thermiques règlementaires. Autrement dit, les BE qui effectuent un calcul Effinergie dans le neuf doivent détenir la qualification OPQIBI 1331 ou 1332. Pour enfoncer le clou, Effinergie souligne que la qualification probatoire ne suffit pas et qu’il faut une qualification à jour. De même, le BE doit prouver son savoir-faire en termes d’ACV et être titualire de la qualification OPQIBI 1333 « Etude ACV Bâtiments Neufs ».

 

L’association Effinergie demande également que soit renforcée, dans le cadre de son label, l’obligation d’informer les occupants du logement sur leur consommations énergétiques, poste par poste, de manière compréhensible et à l’intérieur du logement. Dans le but, estime Effinergie, que les occupants soient incités à agir sur leurs consommations d’énergie s’ils observent une dérive.

 

 

Le retour du Bâtiment à Energie Positive (Bepos)

 

 

Le nouveau label Effinergie RE2020 restaure l’idée de Bepos. Cette idée, comme le rappelle l’association Effinergie avec une rafraîchissante cruauté, était apparue dans la loi Grenelle II ou loi no 2010-788 du  portant engagement national pour l'environnement. Cette loi stipulait : "Toutes les constructions neuves faisant l’objet d’une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2020 présentent, sauf exception, une consommation d’énergie primaire inférieure à la quantité d’énergie renouvelable produite dans ces constructions, et notamment le bois-énergie." ©PP

 

 

L’idée du Bepos figurait dans le label E+C-. La RE2020 ne la mentionne même pas. Mais la Commission Européenne l’a remise au goût du jour dans son agenda Fit-for-55. Effinergie réintroduit donc le Bepos sous forme d’une option dans son label Effinergie RE2020. On pourra donc demander le label avec ou sans l’option Bepos.

 

Mais, naturellement, Effinergie ne souhaitait pas que cette option soit trop difficile à atteindre pour les maîtres d’ouvrage qui souhaitent afficher l’ultime vertitude du Bepos. On aboutit donc à un calcul relativement complexe.

 

Pour recevoir l’onction Bepos, le projet doit atteindre une consommation d’énergie primaire non renouvelable résiduelle, notée Bilan ep,nr,  inférieure ou égale à un écart autorisé, noté Ecartautorisé. Ce qui donne : Bilan ep,nr ≤ Ecartautorisé.

 

La "consommation d’énergie primaire non renouvelable résiduelle", selon Effinergie, est l’énergie non renouvelable importée dans le projet, dont on retranche la totalité de l’énergie renouvelable produite sur site, soit l’énergie autoconsommée + l’énergie exportée. Ce qui marque une première différence de méthode par rapport à la RE2020 qui ne tient compte que de l’énergie produite sur site et autoconsommée et ne tient pas compte de l’énergie exportée, même si la méthode Th-BCE 2020 la calcule.

 

L’indicateur Bilan ep,nr = Cep, nr + consommation Mobilier – Production exportée. L’indicateur Cep, nr contient les consommations non renouvelables des usages réglementaires, ainsi que les consommations de déplacement et la production d’énergie locale autoconsommée.

 

Le poste de consommation "Mobilier" est défini dans la méthode Th-BCE 2020 et apparaît dans les données de sortie de l’étude thermique règlementaire RE2020. La Production exportée correspond à la somme des postes de production photovoltaïque et de cogénération et fait aussi partie des données de sortie du calcul réglementaire selon la méthode Th-BCE 2020.

 

Les coefficients entre énergie primaire et énergie finale utilisés pour les consommations sont ceux de la réglementation en vigueur. Concernant la production locale d’énergie électrique, le coefficient entre énergie primaire et finale à utiliser est 2,3.

 

 

L’écart autorisé selon Effinergie

 

 

Voyons maintenant le calcul de l’indicateur Ecartautorisé. Il est exprimé en kWh/m².an et se calcule de la manière suivante :

 

Ecartautorisé = Cep, nr_max_label + consommation Mobilierref – Prodref

 

Cep, nr_max_label a été défini au-dessus. Pour l’instant, consommation Mobilierref, la consommation Mobilier de référence est égale à consommation Mobilier selon la RE2020. Prodref, la production locale d’énergie de référence, est plus compliquée à calculer. Sa formule est Prodref = Prodref_max x Mpgeo X Mpniv.

 

Dans cette formule, Prodref_max est égale à 77 en maison individuelle isolée ou accolée et à 88 en logements collectifs. Mpgeo est un coefficient de modulation en fonction de la zone climatique où se construit le projet. Il varie de 0,83 en zone H1b à 1,17 en zone H3, en prenant une valeur différente dans chaque zone climatique, sauf les deux zones H2b et H2c pour lesquelles il est égal à 1.

 

Mpniv est un coefficient de modulation en fonction du nombre de niveaux du projet. Il est égal à 1 pour 1 ou 2 niveaux, puis décroit jusqu’à 0,5 à partir de 5 niveaux. Il s’agit sans doute de tenir compte du fait qu’on installe des panneaux photovoltaïques surtout en toiture et que plus il y a de niveaux, donc plus il y a de logements dans un immeuble collectif à surface de toiture égale, plus la production photovoltaïque par logement est réduite. Effinergie propose sur son site un outil de calcul pour calculer l’écart autorisé.

 

Par conséquent, une maison individuelle de deux niveaux en zone climatique H3 sera Bepos au sens Effinergie, si elle consomme moins de 77 x 1,17 x 1 = 90,09 kWh/m².an. Un logement collectif dans un bâtiment de 5 niveaux ou plus sera Bepos en zone H3 s’il consomme moins de 88 x 1,17 x 0,5 = 51,48 kWh/m².an.

 

 

Cette approche du Bepos selon Effinergie pourrait être remise en cause si la révision de la Directive Européenne sur l’Efficacité Energétique des Bâtiments impose une définition unique des bâtiments à "énergie quasi-nulle" à travers l’Europe. ©PP

 

 

Les exigences carbone du label Effinergie RE2020

 

 

Le label Effinergie renforce également les exigences en matière de confort d’été – le fameux indicateur DH –, avec force modulations, sauf dans les zones climatiques H2d et H3 (les plus chaudes) où il conserve les valeurs règlementaires.

 

 

En matière d’empreinte environnementale, le Label Effinergie avance d’un cran le calendrier prévu par la RE2020 pour les indicateurs Icénergie et Icconstruction. ©PP

 

 

Icénergie prend les valeurs suivantes dans le cadre du Label Effinergie RE2020 :

 

Date du dépôt de permis de construire 2022 à 2024 A partir de 2025
Maisons individuelles ou accolées 160 kg eq. CO2/m² 160 kg eq. CO2/m²
Logements collectifs raccordés à un réseau de chauffage urbain 320 kg eq. CO2/m² 260 kg eq. CO2/m²
Logements collectifs autres cas 260 kg eq. CO2/m² 260 kg eq. CO2/m²

 

Tandis que l’indicateur Icconstruction prend les valeurs suivantes dans le cadre du label Effinergie RE2020 :

 

Date du dépôt de permis de construire Jusqu’au 30/06/2023 Du 01/07/2023 au 31/12/2024 2025 à 2027 A partir de 2028
Maisons individuelles ou accolées 640 kg eq. CO2/m² 530 kg eq. CO2/m² 475 kg eq. CO2/m² 415 kg eq. CO2/m²
Logements collectifs 740 kg eq. CO2/m² 650 kg eq. CO2/m² 580 kg eq. CO2/m² 490 kg eq. CO2/m²

 

Voilà où nous en sommes pour l’instant. Le label officiel qui accompagnera la RE2020 est toujours en cours de développement. Ses auteurs sollicitent d’ailleurs les contributions jusqu’au 7 septembre.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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