Défis du Bois : vingt ans d’engouement !

Construction du cadeau de jumelage pour la ville de Schwäbisch Hall. © Défis du Bois 3.0

La 20e édition du challenge de l’école d’ingénieur du bois d’Epinal, l’ENSTIB, produit des présents d’Epinal pour les villes jumelées de Gembloux (Wallonie) et de Schwäbisch Hall (Bade-Wurtemberg).




Le maire d’Épinal, Patrick Nardin, a eu le nez creux. En passant commande à l’ENSTIB pour commémorer les 60 ans du jumelage avec Schwäbisch Hall (Bade-Wurtemberg, Allemagne) et les 50 ans de celui avec Gembloux (Belgique), il pouvait au mieux se douter des enjeux nationalistes de l’élection européenne du 9 juin. Il a programmé une cérémonie pour la paix et l’amitié entre les peuples le dimanche 16 juin, jour du couronnement des Défis. C’était quelques heures avant le début de la campagne électorale française pour les législatives, qui fait suite à la dissolution de l’Assemblée Nationale le soir du 9 juin, après une première campagne française et européenne marquée par la défiance envers l’Europe et les étrangers.

 

 

 

Construire pour la durée

Pour autant, l’objectif de ces Défis du Bois 3.0 chiffre rond version 2024 n’était pas politique. Depuis 2015, la version 3.0 impose des ouvrages pérennes, à la fois par souci d’économie de bois, et de lien avec la réalité constructive. Ainsi, une caravane de huit tiny houses en bois du projet Pixel Passager des Défis de 2023 a été répartie début avril entre Épinal et le parvis du Centre Prouvé de Nancy pour accompagner le Forum Bois Construction en guise de Totem.

 

La construction pour Épinal ressemble à une version déjantée des stations service de recharge de batterie fabriquées par BinderHolz en Europe pour les autoroutes. © Défis du Bois 3.0

 

 

 

 

Un challenge aménagé

Comment adapter l’idée de cadeaux de jumelage aux règles des Défis ? On s’est décidé pour trois ouvrages (Gembloux, Schwäbisch Hall, Épinal) composés de trois parties. Ainsi, trois équipes de cinq personnes ont travaillé non seulement sur leur ouvrage, mais aussi sur son imbrication avec les deux autres. Dans chaque équipe, comme d’habitude, des architectes, des ingénieurs, des compagnons. Et des casques de cinq couleurs : jaune pour le responsable de l’outillage, bleu pour la communication, rouge pour la sécurité, vert pour l’environnement, orange pour le chantier. Pas de palmarès.

 

Les équipes au complet devant la structure destinée à la ville de Gembloux. © Défis du Bois 3.0

 

 

 

 

Travail en amont

Le bois, du Douglas, a été intégralement fourni par SIAT, les assemblages par Simpson. Il fallait bien du Douglas classe d’exposition 3B pour dresser des ouvrages exposés aux quatre vents : jardin de la roseraie à côté de la Maison Romaine à Épinal, un parc non loin d’une rivière à Schwäbisch Hall, un parc à Gembloux. La prise en compte en amont du site et de la ville d’accueil, de son histoire, des liens qui rassemblent ces villes jumelées, l’accessibilité au public, le confort et la sécurité conditionnent les projets bien en amont de l’étape de la construction proprement dite, qui suit directement la présentation publique du sujet de l’épreuve. L’édition jubilée et le donneur d’ordre valaient bien cet investissement supplémentaire.

 

 

 

Biomimétisme pour Épinal

Dès novembre 2023, les équipes ont rencontré Dominique Calvi, parrain de l’édition 2024, au cours d’une véritable master class autour de leurs projets. Le projet spinalien est une structure réciproque, où chacun des trois "parapluies" ou corolles prend appui sur les deux autres par une poutre centrale.

 

Casque orange pour le responsable du chantier, casque rouge pour la sécurité. © Défis du Bois 3.0

 

 

"L’œuvre pour Epinal symbolise la complémentarité et la singularité des trois villes tout en évoquant la réciprocité des liens tissés entre les jumelles. La forme des trois branches est similaire mais chacune se distingue par l’usage de systèmes constructifs différents. Chaque branche est supportée mais sert également de support, telles des mains liées entre elles. L’une représente une feuille en toiture reposant sur 4 poteaux, l’autre une rose dont les pétales s’enroulent les uns autour des autres comme des fractales, la dernière suggère un arbre dont le tronc massif s’efface vers une canopée évanescente. Toutes incarnent la situation de l’œuvre à la Roseraie de la Maison Romaine", expliquent les organisateurs.

 

 

 

 

Évocation du beffroi

L’œuvre pour Gembloux symbolise "un lieu de rencontre composé de trois structures qui ne peuvent tenir l’une sans l’autre. À elles trois, elles rappellent la hauteur caractéristique du beffroi de Gembloux, haut de 35 m et classé au patrimoine de l’UNESCO. Le choix d’une charpente à petits bois dite à la Philibert Delorme impose la forme de coque de la première structure ; la deuxième, tel un houppier, est recouverte de voiles pour mieux rappeler la tradition du textile vosgien et constitue par là même un abri pour les passants ; enfin la troisième complète le tout afin de sublimer et de mettre en valeur la clé d’assemblage par une porte volontairement fermée pour mieux découvrir l’espace intérieur ainsi dessiné".

La structure pour Schwäbisch Hall construite indéniablement sous la pluie. © Défis du Bois 3.0

 

 

 

Bien sûr, ce n’est pas la Seine …

Enfin, "l’œuvre pour Schwäbisch Hall illustre l’amitié entre les peuples au travers d’un lieu de rencontre, le banc de l’amitié. La structure s’inspire de l’architecture traditionnelle des colombages. Le passage couvert ainsi formé par un jeu de niveaux se courbe pour mieux suivre le lit de la rivière locale, la Kocher, et ainsi se situer dans son environnement. Ce tunnel propose différents usages : on le traverse, on s’y repose, on y discute … L’œuvre est ainsi composée de trois modules : un grand espace ludique pourvu de chaises longues et de hamacs en bois, un module intermédiaire disposant d’un mange-debout inclinable permettant de contempler un paysage cadré et un dernier module de repos offrant des assises ‘cocons’".

Le programme souhaitait que les structures incarnent l’esprit de fête lié à ces jubilées de jumelages. En tout cas, les projets rompent clairement avec l’orthogonalité et l’ennui. La compétition entre neuf différents projets reviendra sans doute avec la prochaine édition. Il n’est pas trop tôt pour devenir le donneur d’ordre des Défis du Bois 3.0 de 2025.




Source : batirama.com / Jonas Tophoven

L'auteur de cet article

photo auteur Jonas TOPHOVEN
Jonas Tophoven est journaliste de la presse professionnelle de la construction et du bois en France et en Allemagne depuis 30 ans. Le thème qui lui tient particulièrement à cœur est la réduction drastique des émissions de GES dans la construction, première émettrice humaine du monde devant l'agriculture, avec un impact renforcé en France. Il a d'abord travaillé pendant 12 ans sur la construction sèche, puis depuis 15 ans sur la construction bois préfabriquée et il collabore depuis 10 ans à la programmation des quelque 150 conférences annuelles du Forum Bois Construction, congrès des acteurs de la construction biosourcée.
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