Un PNCB (Prix National de la Construction Bois) 2024 recentré

Prix Spécial : la piscine CAO de Saint-Denis. © Métropole du Grand Paris

La reprise en main institutionnelle du jury national se traduit en 2024, paradoxalement, par une certaine dépolitisation du palmarès, mais soulève quelques questions quant à la représentativité des 8 projets primés.




Les éditions régionales, c’est pour cette année 717 candidatures portées par la plupart des organisations interprofessionnelles régionales française de FiBois. Un énorme travail qui se reproduit d’année en année, avec une faible visibilité nationale quant à des proclamations ou publications égrenées au fil de l’année. Il s’agit vraiment de démarches régionales, même si de nombreux projets méritent de concourir au niveau national – ce qui explique l'intérêt de cette étape supplémentaire. En principe, les lauréats régionaux ont tous eu lieu en octobre, quand est officiellement décerné le prix national débattu en juillet. Le travail d’enregistrement des candidatures a commencé dès janvier.

 

Réhabiliter un équipement : restructuration du château Cantenac-Brown, par Philippe Madec qui a eu pour ainsi dire les mains libres tout en s'efforçant de fondre l'extension dans l'existant. © Luc Boegly

 

 

 

Présidence lauréate

84 projets ont concouru pour le prix national, donc un peu plus d’un dixième. Dans la brochure du Prix, un graphique montre la belle répartition géographique hexagonale. Le jury est en principe présidé par une agence d’architecture lauréate de l’une des catégories du Prix national précédent. La tradition est maintenue cette année, puisque le président Cédric Ramière vient de l’agence CoCo Architecture lauréate du PNCB de la catégorie Aménagement pour les Granges Périgourdinnes aménagées en gîte à Beynac et Cazenac dans le 24.

 

Apprendre, se divertir : Espace Sport&Nature Sorèze/Revel, la couverture du catalogue annuel, une nouvelle référence bois pour Apache Architectes et Sud Charpentes, les stores extérieurs qui semblent flexibles étaient pensés ainsi mais restent finalement fixes. © Adrià Goula

 

 

 

Un jury institutionnel national

La catégorie Aménagement a été divisée en deux, avec l’aménagement extérieur et l’aménagement intérieur. C’est toujours ainsi avec ce PNCB depuis ses débuts, il y a toujours des changements de formule. Par exemple, la dernière fois, les ingénieurs avaient eu pour ainsi dire leur prix, mais cette fois, on n’en parle plus. Tout de même, les ingénieurs d’IBC sont doublement représentés, et les architectes triplement, tout comme les constructeurs (FFB, CAPEB, UICB).

 

Réhabiliter un logement : transformation d'ancienne ferme en deux foyers d'habitation, une autoconstruction par un architecte sachant accompagné de Descotes Bois, dans un département 42 en point e sur le bois même si le maire de la commune a d'abord mal apprécié cet ouvrage qui n'a rien de vernaculaire, mais joue avec le bardage claire-voie devenant brise-soleil, la trame étroite en charpente moisée permettant un grand débord de toiture, des aménagements intérieurs de qualité. © Benoît Alazard

 

 

  

La part des JOP

Dans ce contexte de reprise en main du prix national par les fédérations nationales, on pourrait imaginer que le jury fasse des choix politiques. C’est le cas avec un nouveau prix spécial qui semble vouloir rattraper un palmarès fait de beaux petits objets, loin de montrer au monde de la construction tout ce que le bois peut faire. Le CAO de Saint-Denis est un fleuron des équipements olympiques, et la cérémonie de remise des prix en plein Batimat a été précédée d’une conférence de l’ancien responsable de France Bois 2024, Georges Henri Florentin, sur les installations olympiques et le bois. Lors du Prix Régional IDF, de la même manière, un ouvrage olympique avait été mis en avant, le E3 du Village des Athlètes par Dream, Savare et Simonin.

On note cependant une présence de la construction en bois massif pour le lauréat de la catégorie Travailler-Accueillir, une mise en valeur générale de bois locaux (Douglas, mélèze, châtaignier), le recours aux isolants biosourcés (liège, fibre de bois, coton, jute), la prise en compte de l'inconfort estival et d'objectifs énergétiques de niveau passif. Au bout du compte, le palmarès 2024 s'inscrit dans la continuité des palmarès précédents, on dirait même qu'il y a un style PNCB. Surtout, le prix a réussi la performance de bien intégrer la part de la rénovation (3 prix sur 9).

 

Habiter une maison : la petite mason noire à Valojoulx (24), marie parfaitement le vernaculaire et les références modernes, grâce à Sapines Architectes mandataire et client, et la SARL Lavergne. Le noir vient du goudron de pin naturel, et la beauté de ette solution qui joue la transparence au rez-de-chaussée et l'occultation à l'étage donne envie de la visiter, les fondations légères et le plateau en pente pour stocker le bois sont bienvenus. © Céline Pérrinet Lhermitte

 

 

 

Un reflet de la construction bois actuelle ?

Malgré le passage de 7 à 8 catégories (la réduction à 4 catégories entreprise précédemment n’a pas tenu), et ce nouveau prix spécial, la représentativité du palmarès 2024 est problématique. La construction bois française de 2024 se caractérise par d’impressionnants bureaux en bois, par des groupes scolaires exceptionnels, des évolutions majeures dans la construction bio et géosourcée, et parallèlement un fort déploiement des solutions mixtes. Le Prix national, par contre, fait la part belle au bel ouvrage en bois visible.

 

Aménagement intérieur : l'Usine Maison de la Nature à Cavalaire-sur-Mer, un délice pour les photographes car on s'y perd entre les deux escaliers monumentaux et la charpente, en fait c'est une sorte de sculpture intérieure. © Florence Vesval

 

 

 

Un parti pris sympathique

Mais on peut aussi dire les choses autrement. Pour rencontrer des ouvrages en bois qui parviennent à afficher leur matière, le jury doit descendre vers des constructions de petite taille. Et ce n’est pas nouveau. À vrai dire, le PNCB s’est toujours distingué par son intérêt pour les petites opérations provinciales, celle qui risqueraient de passer inaperçues. C’est sa force. On pourrait aussi déduire de ce palmarès que pas mal d’opérations importantes et souvent mixtes sont finalement assez laides ou banales au regard de ce travail de dentelle de ces bâtiments primés, cachés et inattendus.

 

Aménagement extérieur : Halle de Missillac (44), renoue avec les halles de marché en bois du passé, tout en adoptant une écriture épurée et moderne. © Gaëtan Chevrier

 

 

 

Retrouver une représentativité

Ce travail de mise en lumière des architectes du bois n’est pas remis en cause. La réduction du catalogue annuel au sein duquel les lauréats n’étaient que des projets parmi beaucoup d’autres change un peu la donne. Comment utiliser ce palmarès pour faire la promotion du bois sur les marchés sensibles ? Il y avait le site Panoramabois, mais suite à l’offensive d’une association des photographes d’architecture, le site est en maintenance depuis des mois.

 

Travailler-Accueillir  : maison médicale pluridisciplinaire à La Salle-les-Alpes, alliant la beauté à une structure en bois peu transformé, avec du mélèze local brut. © Iota Architecture

 

 

Les organisateurs ont trouvé une nouvelle idée : faciliter la visite des opérations lauréates. Du travail pour le FiBois d’IDF, Aura, Nouvelle Aquitaine, Pays de la Loire, Sud. D’autant que les réalisations sont effectivement étonnantes. En attendant le lancement de la prochaine opération, qui démarrera dès janvier 2025.

 

Prix Spécial : la piscine CAO de Saint-Denis, avec sa toiture concave d'une portée record qui évite l'émission de 2 000 t de CO2 et compense plus ou moins les 14 000 m3 de béton pas toujours "bas carbone" de l'infrastructure. © Salem Mostefaoui

  

Source : batirama.com / Jonas Tophoven

L'auteur de cet article

photo auteur Jonas TOPHOVEN
Jonas Tophoven est journaliste de la presse professionnelle de la construction et du bois en France et en Allemagne depuis 30 ans. Le thème qui lui tient particulièrement à cœur est la réduction drastique des émissions de GES dans la construction, première émettrice humaine du monde devant l'agriculture, avec un impact renforcé en France. Il a d'abord travaillé pendant 12 ans sur la construction sèche, puis depuis 15 ans sur la construction bois préfabriquée et il collabore depuis 10 ans à la programmation des quelque 150 conférences annuelles du Forum Bois Construction, congrès des acteurs de la construction biosourcée.
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