Sur ce chantier de bâtiment public, les planchers intermédiaires sont constitués de modules bois autoportants d’environ 8 m de longueur allant de mur à mur sans appuis intermédiaires. Ce jour-là, c’est l’ensemble d’une trame de ces modules qui s’est effondrée. L’expert dépêché sur place constate que, dans cette zone, le plancher prend appui sur des cornières métalliques fixées, pour une extrémité du module bois, sur un voile béton, les cornières étant là toujours en place, et pour l’autre extrémité, en partie basse de la joue, d’une poutre béton.
Les fixations ont lâché
Ce sont les fixations de cette dernière cornière qui ont lâché par rupture du béton de la poutre, entraînant la chute de l’ensemble des modules bois du plancher qui y étaient appuyés. L’examen de la sous-face de la poutre béton au droit des fixations montre que le béton est éclaté en cône, de manière caractéristique. L’empreinte du perçage des chevilles métalliques à expansion y est bien visible. Les mesures prises par l’expert montrent que les chevilles ont été placées à une distance moyenne de l’ordre de 25 mm par rapport au bord de la poutre.
Chevilles métalliques à expansion
Les cornières métalliques supportant le plancher ont été fixées au béton par des chevilles métalliques à expansion. Ces chevilles avaient fait l’objet d’une note de calcul qui les considéraient en “plein voile” béton, ce qui était effectivement le cas dans la majorité de ce chantier. Le cas des fixations sur poutre béton n’avait pas été abordé dans la note de calcul, le BET l’ayant élaboré n’ayant pas été informé de cette particularité. Les fixations en plein voile se sont avérées résistantes, y compris lors du sinistre.
La distance au bord : une notion fondamentale
En revanche, lors de la mise en œuvre des chevilles sur les poutres, la notion de “distance au bord”, un paramètre fondamental de la résistance de toute fixation à expansion, avait été oubliée. Pour éviter l’éclatement et la fissuration du béton et, par là même, supporter la charge appliquée aux chevilles, il est impératif de respecter les données du fabricant concernant la position de la cheville par rapport au bord de la pièce béton support. La distance entre chevilles voisines et l’épaisseur du béton dans lequel la cheville est ancrée sont également des critères fondamentaux de l’efficacité de la fixation.
L’ATE : un référentiel incontournable
Conformément à la réglementation, les chevilles utilisées ici faisaient l’objet d’une évaluation technique sous la forme d’un ATE (agrément technique européen). Véritable référentiel pour la mise en œuvre de la cheville concernée, ce document spécifie les paramètres à respecter et notamment la valeur de la “distance au bord” minimale. Dans le cas présent, elle était de 80 mm et non de 25 mm comme relevé sur place. La rupture du béton par fissuration lors du serrage de la cheville était dès lors quasi inéluctable. C’est là l’origine du sinistre. La consultation de l’ATE propre à la cheville utilisée et le respect des spécifications y figurant aurait évité le sinistre.
Bernard Messey – Socabat Orléans
Fondation d’Excellence SMA
N’oubliez pas le guide ATE
Les chantiers de bâtiment ont de plus en plus recours à des dispositifs de liaisons entre éléments avec une mise en œuvre rapide. L’utilisation de fixations homologuées est obligatoire lorsque leur défaillance présente un risque pour la sécurité des utilisateurs ou usagers. Ce point s’applique en particulier aux chevilles métalliques. En effet, dans le cadre de la directive européenne 89-106 CEE “Produits de construction” qui couvre les chevilles métalliques pour la fixation dans le béton, un guide a été rédigé par l’EOTA pour permettre d’apposer le marquage CE rendu obligatoire par la Directive rroduit de construction. Le guide ATE différencie la mise en œuvre dans des zones de béton fissuré ou non fissuré. L’ATE attaché à chaque fixation le spécifie, tout comme les paramètres de mise en œuvre admissibles pour la cheville examinée. Dans ce cadre, pour les fixations à caractère structurel, il est nécessaire d’utiliser exclusivement des chevilles sous marquage CE et titulaire d’un ATE.