Légende : La plateforme Sophia, Trophée Eurobois, place la gestion de l’information au centre du jeu. ©Biesse
Quatre typologies d’« exposants innovants » permettent de comprendre les enjeux de la filière. Le premier, Biesse, un major italien, étonne avec le nouveau service qu’il propose : la plateforme Sophia.
Le stand de Biesse à Eurobois avait l’air d’un petit salon à lui tout seul. Avec son centre de taille Uniteam aux couleurs de Biesse, l’industriel taille les profils de deux maquettes spectaculaires de 6 m de haut que les Compagnons vont assembler sur le salon.
Si son stand expose des dizaines de machines, et sans doute autant d’innovations, c’est Sophia qui a remporté un Trophée Eurobois. L’innovation ne réside pas ici dans un composant de machine plus ou moins ingénieux : elle porte sur la relation entre le fournisseur et son client.
Grâce aux technologies de l’information, il devient possible de recueillir de nombreuses informations sur le fonctionnement des machines installées. Dans le cadre d’une relation de service d’un nouveau genre, Biesse va exploiter ces informations afin que la machine soit utilisée de façon optimale, qu’elle ne se mette pas en panne, que le client en tire le maximum.
Biesse dépasse le schéma de la hotline et cela vaut désormais pour toutes les machines que l’Italien vend, des plus grandes aux plus petites. La plateforme Sophia va accompagner le client au moins pendant une année complète, libre à lui de souscrire ensuite ce service. Le fournisseur devient un peu son propre client, mais attention ! Les données que Biesse récupère et gère ne sont en aucun cas des informations commerciales.
La 2e typologie d’exposant étudiée sur le salon concerne Bernard Bruno. Ce dernier a dirigé une entreprise de menuiseries aluminium mais depuis trois ans, au sein de Green Window, il propose à des franchisés un concept simple et innovant de menuiseries mixtes bois-alu.sur le principe de l'ouvrant caché ou ouvrant visible.
Exposant à Batimat, cet habitué d’Eurobois s’y intéresse naturellement aux exposants de machines pour la menuiserie. Le regard qu’il porte sur l‘offre du salon est un peu décapant : «Je ne m’intéresse pas tant aux machines à commande numérique qu’à la transitique, à ce qui permet de supprimer les temps morts entre deux opérations et de fluidifier la production.
Et je reste un peu sur ma faim. Par ailleurs, je suis de ceux qui s’intéressent tout particulièrement aux 20 derniers mètres d’une chaîne de fabrication, c’est-à-dire là où il n’y a plus de production de poussières de bois avec les lourdes implications d’équipement que cela entraîne.
Bernard Bruno, concepteur industriel et visiteur d’Eurobois, était venu sur le dernier salon EquipBaie.©JT
Aujourd’hui, en France, il devient possible d’assembler des profils en bois fournis par des industriels. FCBA a homologué en 2017 une fenêtre bois avec non plus des profils à double enfourchements, mais des profils bois à coupe d’onglet assemblés avec des tourillons associés à des cônes Hoffmann.
Le concept Green Window met le bois alu à la portée d’artisans équipés non pas de centres d’usinage mais d’outils semi-automatiques, pour des budgets bien plus réduits. C’est la transitique/ergonomie qui fait la productivité, pas la commande numérique ».
Bernard Bruno aborde la menuiserie bois alu non pas comme un transformateur de bois, mais comme un menuisier alu. Les machines à commandes numériques des grands fabricants font des prouesses, mais ne répondent pas toujours selon lui aux nouveaux besoins de mixité, aux capacités d’investissement et à l’ergonomie de la fabrication.
Le 3e acteur repéré sur le salon révèle également les nouveaux enjeux de la construction bois. Souvenez-vous de Concept 345 né dans l’esprit d’un fabricant français qui avait oser concevoir des centres de taille de charpente. Deux ans plus tard, Concept 345 est toujours là, une Maxitaille et une Minitaille sont en service.
Entre temps, la jeune équipe s’est engagée dans une voie complémentaire. La taille de charpente, en France, ne se résume pas à des centres de taille. Il existe des outils semi-automatiques très répandus comme ceux de Stromab ou de Tigerstop, entres autre.
La réflexion de Concept 345 a été la suivante : nous pouvons créer de nouveaux centres de taille à commande numérique, mais nous pouvons aussi équiper d’une commande numérique un outil semi-automatique déjà installé chez le client pour un investissement réduit.
On retrouve en germe les approches qui sont déjà de plus en plus fréquentes chez les utilisateurs et les donneurs d’ordre : ne plus viser la productivité mais la flexibilité, prendre en compte l’énergie grise, le cycle de vie des produits.
Le stand bien fréquenté de Concept 345 a été taillé par une machine de taille de Concept 345 ! © JT
Quatrième exposant repéré, la société Bareyre qui est l’un des principaux acteurs français de la fabrication de moulures et de profils en bois. Cinq moulurières tournent dans l’entreprise. Il y a quelques années, le marché s’est resserré et l’entreprise Bareyre a repensé son métier. Le nombre de ses distributeurs a été réduit à des spécialistes, qui couvrent toujours la majeure partie du chiffre d’affaires de l’entreprise.
Mais en complément, le fabricant a développé une activité de distribution aux professionnels, nécessaire selon elle à l’évolution des besoins du marché du Bâtiment. Ce complément permet de développer la fabrication sur mesure, notamment de profils vernis, ignifugés ou laqués prêts-à-poser.
Cet équilibre subtil entre distribution spécialisée et fabrication sur mesure a permis à l’entreprise de franchir un nouveau cap, et de sortir de l’ombre pour exposer à Eurobois. A cette occasion, le directeur de production est allé faire un tour du côté des exposants de machines.
Il compte remplacer deux de ses moulurières et faire également l’acquisition de l’un de ces nouveaux métiers que propose Weinig pour refendre le bois dans son épaisseur. L’investissement de près d’un million d’euros devrait se finaliser dans les mois qui viennent. Il conférera à Bareyre un surcroît de flexibilité et de réactivité, pour mieux répondre encore au marché émergent du sur-mesure.
Arnaud Sérafin, technico-commercial chez Bareyre, vient du monde de la distribution et le connaît. ©JT
Source : batirama.com/ Jonas Tophoven