Le bois face au défi bio-sourcé

 Le bois face au défi bio-sourcé

Actualité oblige, les matériaux bio-sourcés sont une nouvelle fois très présents au Forum Bois Construction, même si la nouvelle version du DTU 31.2 les exclut des techniques traditionnelles.




Légende : Prototype de façade pour la Ferme du Rail, Atelier B1, jeudi 4 avril au matin.©JT

 

Pour le marché émergent des matériaux de construction bio-sourcés, le bois a toujours été le grand frère un peu dédaigneux, à l’image de ce que subissait le bois face au béton. La notion même de bio-sourcé ne vient pas de la filière bois. Pour autant, les imbrications sont de plus en plus évidentes.

 

Si le chanvre contourne couramment la construction bois avec son béton de chanvre, la paille dispose depuis 2012 de règles professionnelles qui la rattachent étroitement au monde du bois.

 

Quant à la laine de bois, son développement en Europe Centrale doit tout à celui du bois structurel. Cela ne traduit pas forcément un parti-pris alternatif. Il est souvent affirmé que la laine de bois cadre mieux avec la construction bois que les laines minérales, notamment en termes de régulation de l’humidité et d’inertie thermique. Il en va de même pour la ouate de cellulose qui est en général un matériau recyclé mais in fine d’origine ligneuse.

 

Une émergence difficile

 

Comment jugez de l’évolution du marché des matériaux bio-sourcés de la construction en France ? Le chanvre, spécialité française à l’échelle internationale, se structure en Ile-de-France aussi, mais dispose d’autres exutoires que la seule construction.

 

La paille est disponible comme nulle part au monde, mais son usage ne s’est toujours pas banalisé, ne serait-ce qu’à cause des contraintes dimensionnelles imposées par un bottelage qui s’avère être souvent un re-bottelage. L’épopée industrielle qui a vu se créer coup sur coup, en France, plusieurs sites de production de fibre de bois, s’est soldée par un échec cuisant, les principaux acteurs étant repris par leurs antagonistes, ou liquidés.

 

Quant à la ouate, les additifs au sel de bore, pour lesquels il n’existe pas à ce jour de véritable alternative, font l’effet d’une épée de Damoclès et freine l’imbrication de la construction bois dans l’économie circulaire du papier.

 

L’un des signes de cette débâcle, c’est la difficulté qu’à la filière bio-sourcée de se structurer en France. C’est pour l’heure un tout petit secteur ou tout le monde se méfie de tout le monde, pour rester poli. Et le marqueur de ces difficultés, c’est à présent l’exclusion de cette famille d’isolants du nouveau DTU 31.2. L’argument invoqué est le manque de recul, comme cela sera précisé dans le cadre de l’atelier C1 justement dédié in extenso, dès jeudi matin, à cette importante étape de la profession.

 

 

Julien Lamoulie (FCBA) présente les grandes lignes du nouveau DTU 31.2, en janvier 2019 pour l’UICB.©JT

 

Le climat n’attend pas

 

Malgré sa fragilité économique, la filière bio-sourcée fait parler d’elle, et un rapprochement s’est opéré sur le plan institutionnel au sein de l’UICB, l’union des industriels de la construction bois, rejoints par l’AICB, l’Association des Industriels de la Construction Bio-sourcée.

 

L’association Karibati travaille avec l’UICB, tandis que la première édition du congrès Fibra, dédié au monde bio-sourcé, a eu lieu à Paris l’automne dernier avec un indéniable succès. A cette occasion, un universitaire a évoqué ce qui se produit exactement avec l’exclusion des isolants bio-sourcés du DTU 31.2.

 

Le climat change à toute allure, il faut réagir tout de suite, le recours à des matériaux fixant du carbone et renouvelables s’impose, mais le système du Bâtiment ne se laisse pas perturber son train de sénateur.

 

Et l’universitaire d’évoquer la situation internationale où de fait, malgré toutes les mises en garde et la recherche de solutions constructives alternatives, ce sont les matériaux traditionnels, industriels et à fort impact climatique qui connaissent les plus fortes progressions.

 

 

Extension d’une école à Bourgueuil en bois-paille par l’agence Desmichelle.© : Desmichelle

 

De la paille à la pelle

 

La construction bois-paille s’est développée en France malgré l’hostilité ou l’indifférence d’une filière qui est plus que jamais le pré carré des industriels de la laine minérale. Compte tenu de ce frein, sa réussite est éclatante et sa vitalité manifeste.

 

En 2016 à Lyon, un premier rendez-vous avait été organisé à l’occasion de la réalisation, locale, de plusieurs gymnases exceptionnels en bois-paille. Sans oublier les évocations du R+7 bois-paille de St Dié-les-Vosges par Le Toit Vosgien dès 2008 et La Boiserie à Mazan en 2012, qui reste bien comme l’une des prouesses du BE bois Olivier Gaujard.

 

Cette fois, la paille est un peu partout, mais par la force des choses. On en trouve des brins dans le logement social, dans l’habitat participatif, dans Réinventer Paris (La Ferme du Rail) et surtout dans l’atelier C5 du vendredi, prolongé l’après-midi par une table ronde en salle C. Plus que jamais, cette année, le Forum est le point de rencontre de deux mondes, celui de l’industrie du bois et celui de la construction bio-sourcée.

 

 

Encore de la paille pour cette école maternelle de l’avenue Vincent Auriol à Paris.© LA Architecture

 

Mieux que le bois ?

 

Le bois pourrait prendre la tête d’un large mouvement bio-sourcé incluant les bio-matériaux et les produits de recyclage. Pour cela, il faudrait une volonté politique et une stratégie. Mais il faudrait surtout que la filière bois cesse de se considérer comme l’optimum environnemental de la construction a priori. Au point de ne pas avoir l’impression de devoir faire un quelconque effort.

 

Car d’autres matériaux bio-sourcés ont des atouts redoutables, en tout cas d’une grande utilité pour décarboner la planète en stockant du carbone beaucoup plus rapidement que le bois. A l’échelle globale, en tant que matériau de structure, le bambou mérite autant d’attention que le bois, comme le rappellera au Forum Dominique Gauzin-Müller, initiatrice du prix Fibra dédié à l’architecture bio-sourcée.

 

Elle anime le vendredi matin un atelier A4 intitulé « L’école du bio-sourcé », où il sera certes question d’architecture scolaire bio-sourcée, mais aussi de l’école que constitue ce segment pour la construction en général, comme elle l’a été il y a 20 ans pour le démarrage de la construction bois non résidentielle en France.

 

 

Perthes© Tracks

 

Inscription en ligne sur : http://nvbcom.fr/billetterie/

 


Source : batirama.com/ Jonas Tophoven

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