Le montage MOB sans équerres

Le montage MOB sans équerres

Hilti lance en France, à partir de mai 2023, une solution révolutionnaire de montages d’éléments à ossature bois par inserts, le bien nommé Hilti Connector Wood (HCW). Avant-première au 12e Forum Bois Construction.




Avant de lancer son connecteur HCW, Hilti a déjà développé ses stations d'implantation robotisées PLT. Le nouvel insert de 40 mm de diamètre se visse en usine, par outil électroportatif, sur un pré-percement cylindrique appliqué sur des tasseaux de bois d'une largeur minimale de 80 mm et d'une longueur minimale de 400 mm. Pour les autres cas de figure, il existe une variante à visser HCW L.

 

Les inserts et les goujons sont disposés à intervalle d'environ 80 cm. Applicable à la fixation des MOB sur dalle ou à l'étage, mais aussi aux panneaux CLT, et partant aux modules 3D en bois, le faisceau d'innovation station implantation et connecteur HCW remonte la pose sur chantier au niveau technologique de ce qu'attendent les constructeurs d'aujourd'hui.

 

La construction bois en quête de renouvellement

 

Si la construction biosourcée est une révolution pour le monde de la construction, la filière bois, et a fortiori celle de la construction bois, est étrangement peu innovante : manque de R&D, concentration sur des machines d'atelier standard à amortir, longue marche d'accréditation par les laboratoires, réglementations tatillonnes et surtout, absence de volonté d'innovation dans l'esprit des acteurs issus de la charpente, ce métier extraordinaire où tout a été inventé et qui permet aux compagnons de reconstruire Notre-Dame à la mode médiévale ou romantique.

 

 

L'insert HCW est vissé par outil électroportatif dans un préperçage réalisé notamment par outil de taille à commande numérique.

 

 

Si ce n’est que la reconstruction de Notre-Dame est justement devenue un vecteur d’innovation, ne serait-ce que parce que la reconstruction reste fidèle au résultat, pas aux moyens de levage de l’époque. Pour le reste, la filière charpente, devenue une filière de constructeur, est en train de changer. La nécessité de refonder les activités de construction sur la non émissivité impulse de nouvelles idées, tandis que les grands groupes internationaux lancent leur R&D sur la niche du bois/biosourcé afin de tirer profit de son épanouissement annoncé. Cette vague d'innovation se développe à tous les niveaux, celle de la start-up, mais aussi celle des grands lancements européens de solutions qui vont changer le monde de la construction, enfin.

 

La MOB fait le job

 

La construction par éléments à ossature bois, la MOB, est hégémonique en Europe sur le marché de la construction bois, et l’émergence progressive des panneaux massifs CLT n’y change pas grand-chose.

 

 

Cette variante est utilisée lorsque l'insert ne dispose pas d'un volume de bois suffisant.

 

 

Il y a dix ans, en Allemagne, un leader de la "maison toute prête", le Fertighaus allemand, détournait une Conturex de Weinig en principe adaptée à la production de montants de fenêtre, afin de disposer de la précision nécessaire pour intégrer des inserts permettant d’accélérer le montage des éléments sur site. Une initiative isolée.

 

L’inertie atteint ses limites

 

Sans doute, le développement français de la MOB a pu se faire grâce à la précision de ses règles de l’art. La contrepartie, c’est que tout reste figé par un DTU 31.2 infiniment révisable. Sybois s’était lancé comme spin-off du fenestrier Millet avec une approche de paroi perspirante qui est restée une exception. Les centres de taille tournent, on essaie tant bien que mal d’intégrer la maquette numérique sans toujours tout détricoter, le modulaire 3D s’annonce comme la grande solution sans évolution technique décisive.

 

 

Grâce à une station robotisée type PLT300 ou PLT400, des goujons sont fixés aux bons endroits sur la dalle ou sur le plancher bois.

 

 

La standardisation des méthodes constructives a sans doute eu du bon pendant un certain temps pour créer un marché des fournitures, des prix et de l’emploi. La prochaine étude nationale sur la construction bois, probablement actuellement en cours pour l’année 2022, devrait révéler un véritable bond, déjà attendu pour 2020 mais entravé par la Covid. Enfin, le marché de la construction bois française va renouer avec le niveau 2010 du début de ces enquêtes, qui devaient pourtant tracer l’évolution de ce marché vers une part de marché de 20% en 2020.

 

La construction bois prend un grand clac

 

A présent, le marché n’est plus seulement aux mains des entreprises familiales de charpente. Les majors prennent le pli et apportent de nouvelles notions de sécurité des chantiers et d’efficacité indépendante du savoir-faire spécialisé. Une entreprise de charpente voit évoluer le métier de montage avec une certaine réserve, car le travail sur site n’a plus grand-chose à faire avec la qualification des charpentiers. Le Major y voit par contre une aubaine.

 

 

L'entraxe des goujons, entre 80 cm et 1 m, suffit pour stabiliser la paroi sans nécessité d'équerres ou d'étaiement.

 

 

Globalement, le Challenge Canopée de Xylofutur, développé jusqu’en août 2022 par l’infatigable François Vulser, a contribué à répandre dans le milieu conservateur de la construction bois un souffle de french tech. La machine à bois française ressort un peu la tête de l’eau, la construction biosourcée innove en permanence.

 

C’est dans ce contexte d’effervescence et d’émulation qu’Hilti se décide à jeter un gros pavé dans la mare. L’insert HCW a déjà fait son chemin et ses preuves dans les pays germaniques. Hilti France fait le pari que le marché français est mûr pour l’adopter. De quoi s’agit-il ? En atelier, les éléments d’ossature bois sont équipés d’un insert. Grâce à une station robotisée type PLT300 ou PLT400, des goujons sont fixés aux bons endroits sur la dalle ou sur le plancher bois. Quand les éléments arrivent sur le chantier, ils se clipsent et la paroi tient, sans équerres et sans étaiement.

 

Les "béta-testeurs" français enthousiastes

 

Hilti calcule que le temps de montage est réduit de 30%. Ce n’est pas tant la durée qui compte, mais la capacité induite de réagir à un marché de l’emploi particulièrement tendu. Les "béta-testeurs" français mesurent l’intérêt de l’approche sur de premiers chantiers. Peu d’entreprises de construction bois françaises disposent à ce jour de stations, alors qu’a contrario les entreprises de construction traditionnelles et notamment les Majors sont habitués à utiliser les stations robotisées Hilti pour gagner en précision et en productivité.

 

 

Le montage sur site devient si simple...

 

L’insert d’Hilti va faire faire un bond au marché français, d’une part à cause de la professionnalisation de la pose des éléments, d’autre part grâce à la facilité d’utilisation des stations. Cerise sur le gâteau, les premiers retours des "béta-testeurs" montrent que les Français ont envie de se saisir de cette approche pour l’utiliser à de multiples fins. C’est l’effet français typique des nouveautés germaniques, combinaison de l’application technologique à l’allemande et de l’invention française.

 

Une innovation peut en cacher beaucoup d’autres

 

Pour Hilti, l’introduction de l’insert HCW ne se fera pas comme une trainée de poudre. Mais elle va booster tout le potentiel de cette approche. Elle va stimuler le marché traditionnel des accessoires de montage avec des équerres et étais, les outils des bureaux d’étude, le marché de l’équipement machine et électroportatif et surtout celui des assemblages. Car une fois que l’élément MOB est posé, autant l’enclencher avec son voisin.

 

Si le vissage sur site cède la place au clipsage, l’ensemble du marché de la construction bois évolue vers le montage réversible, donc vers la possibilité de désassembler de façon non destructive, ce qui permet de rallonger notablement la durée de vie des systèmes constructifs.  

 



Source : batirama.com/Jonas Tophoven/ Photos © Hilti

L'auteur de cet article

photo auteur Jonas TOPHOVEN
Jonas Tophoven est journaliste de la presse professionnelle de la construction et du bois en France et en Allemagne depuis 30 ans. Le thème qui lui tient particulièrement à cœur est la réduction drastique des émissions de GES dans la construction, première émettrice humaine du monde devant l'agriculture, avec un impact renforcé en France. Il a d'abord travaillé pendant 12 ans sur la construction sèche, puis depuis 15 ans sur la construction bois préfabriquée et il collabore depuis 10 ans à la programmation des quelque 150 conférences annuelles du Forum Bois Construction, congrès des acteurs de la construction biosourcée.
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