Quand on remplace le panneau massif en bois par une dalle en béton, on détériore la performance carbone. Mais si l’on réduit la dalle béton en l’associant à des poutres en BLC (bois lamellé-collé), on réduit la facture carbone par rapport à une solution tout béton. En principe. On obtient donc une solution moyenne avec des inconvénients et des avantages.
L’atelier IBC, C2, du dernier Forum Bois Construction à Nancy, a donné l’occasion d’analyser sous l’angle des ingénieurs deux solutions de planchers bois-béton, étayée par des réalisations. Deux ans auparavant, toujours à Nancy, un atelier dédié aux planchers mixtes avait permis de faire le tour des nombreuses solutions existantes, notamment en bois-béton. Et cette année, le lendemain, un atelier sur les nouvelles mixités débouchaient sur un point d’étape concernant le système Hybridal de Cruard, la dalle HOBOA développée par Horizon Bois et la nouvelle dalle mixte APB2 inventée par Charpente Houot. À la Tribune des Innovations, ArcelorMittal proposait parallèlement son Cofrawood associant le bois et l’acier.
Florence Grandchamp, délégué générale de l'association IBC, modère cet atelier dédié pour la première fois. © Forum FBC
Les planchers mixtes ne se contentent pas de concurrencer les planchers CLT en plein développement international, mais aussi les solutions de plancher bois selon les règles de l’art, qui représentent encore, selon l’enquête nationale de la construction bois, l’essentiel du marché. Mais on sent bien que le marché ne s’accommode pas tout à fait des solutions tout bois, d’autant qu’elles conduisent le plus souvent à surajouter une épaisse chape ciment pour de multiples raisons, sans parler de toutes les plaques de plâtre et laines minérales.
L’atelier C2 développe une approche en trois temps. En premier lieu, Pierre Brégeon d’Arborescence intervient sur la "résistance et optimisation des planchers bois : innovation, analyse comparative de solutions". Ce qui le conduit à dresser la longue liste des critères auxquels doivent répondre les solutions de plancher. On entre alors dans la pratique de développement avec la solution Atomwood développée par GA Smart Buildings pour son nouveau siège social à Toulouse, et le cas du chantier belge Woodhub Serenitas, qui est également un siège social pour le major belge CFE. Dans ce second cas, l’entité BLC du groupe, LTS, produit sous licence ou franchise des éléments mixtes selon le principe CREE qui vient d’Autriche, mais qui est actuellement présent dans neuf pays, y compris en Asie.
Philippe Courtois de Wood Shapers et Sacha Berg de Cambium détaillent la solution CREE. © Forum FBC
Si GA Smart Buidings avait choisi la solution CREE au lieu de développer Atomwood avec l’aide de l’ingénieur Valéry Calvi, il y aurait plus de bois lamellé-collé dans les nouveaux bureaux. Atomwood est conçu pour que le plancher s’intègre facilement dans un environnement de béton. D’ailleurs, de temps en temps, une solive est également en béton. Chez CREE, la visée est de faire reposer le plancher sur des poteaux en bois. D’ailleurs, la performance majeure du chantier Woodhub accompagné par l’ingénieur Sacha Berg de Cambium, ce sont ces façades en bois préfabriquées de 12 mètres associés en préfabrication à des poteaux. S’il faut que le plancher et ses solives se calent dessus, il faut absolument contrôler les tolérances d’un gros-œuvre en béton.
Le chantier Woodhub, c’est sans doute du jamais vu en France. Cela se rapproche un peu de la solution Eiffage développée pour le lot E du Village des Athlètes, avec une MOB intégrant des poteaux porteurs en LVL (Baubuche), et un plancher béton sur solive, il est vrai coulé sur dalle de compression. Avec l’approche hors site de Wood Shapers en Belgique, Philippe Courtois de LTS dispose d’une solution à montage ultra-rapide réservant une grande part au bois. Mais Sacha Berg révèle que dans la configuration non orthogonale et en triangle du nouveau siège, les concepts constructifs sont poussés dans leurs retranchements.
Valéry Calvi du bureau d'ingénierie Calvi et Caroline Morin de GA smart buildings explique le plancher hybride Atomwood. © Forum FBC
Les formules savantes présentées par Valéry Calvi et Sacha Berg pour justifier le calcul de ces systèmes hybrides doivent leur complexité au fait que les matériaux bois et béton ne se conduisent pas de la même façon et que les connecteurs sont fortement sollicités. Elles masquent surtout une équation économique qui n’a pas été dévoilée.
On a déjà connu il y a dix ans une approche hybride développée par Bouygues et Yves-Marie Ligot puis Vinci et qui utilisait le mur MOB comme élément coffrant du plancher béton. Une opération à Lormont, une rue Rébière à Paris, et finalement on n’en entend plus parler. Ce qui marche vraiment bien, c’est la construction en poteau-poutre et dalle béton avec peut-être un peu de bois en façade, comme on la pratique couramment, en tout cas on dirait que c’est la solution la moins chère et vivement le déluge.
Face au système CREE international et bien balisé, le développement de l’Atomwood a permis d’effectuer des tests de résistance au feu concluants, et de montrer une application concrète et importante sur le siège de GA Smart Buildings. Cruard multiplie les chantiers avec son Hybridal devenu aussi Hybrimur, HOBOA se prépare à l’ascension de la tour rennoise Horizon, Charpente Houot apporte une nouvelle touche et ainsi, petit à petit, les connaissances progressent et s’affinent, la panoplie des solutions se diversifie. Il faut de nombreux chantiers pour trier le grain de l’ivraie.
Source : batirama.com / Jonas Tophoven © Nicolas Girod
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Les solutions hybrides se multiplient en France, mais également à l’international, sans rivaliser véritablement avec la poussée mondiale des panneaux CLT.